Le moment où les roues viennent au contact de la piste à l’atterrissage…
La boutade est connue : un bon atterrissage est celui où l’appareil est resté intact et que tous ses éléments sont toujours réunis. Sur le sujet, on préférera un dicton ancien : « Un pilote
ne vaut pas mieux que son dernier atterrissage ». Même si c’est très réducteur, cela calme…
et cela impose d’être exigeant à chaque atterrissage et de rester humble, donc de savoir se remettre en question si le résultat obtenu n’est pas jugé satisfaisant…
Pour un retour au sol jugé acceptable en fin d’arrondi, il est avant tout nécessaire d’afficher la bonne assiette afin de retrouver le « plancher des vaches » en premier au niveau du train principal, roulette avant suffisamment levée sur appareil à train tricycle, et roulette au contact du sol pour un atterrissage 3-points sur appareil à train classique. Mais cela ne suffit pas…
Au moment où les roues entrent en contact avec la Planète, on peut ressentir parfois un déport latéral de son corps, ce dernier venant appuyer quelques fractions de seconde sur le flanc de la cabine. C’est le résultat d’une accélération transverse trahissant un retour au sol imparfait car les roues du train principal n’étaient pas parfaitement alignées avec l’axe de la piste ! Ce point sera donc à travailler lors des prochains atterrissages pour atteindre l’absence totale d’accélération latérale pour l’équipage.
Cette désaxe des roues principales par rapport à l’axe de piste, de quelques degrés seulement mais suffisamment pour subir cet « à-coup », provient d’une insuffisance de contrôle au niveau de l’axe de lacet, ce dernier pouvant de plus être perturbé par les effets moteur à la réduction totale de la puissance – cette action devant intervenir au plus tard en début d’arrondi
si l’on ne veut pas qu’une puissance résiduelle rallonge la distance entre le début d’arrondi
et le toucher des roues. La réduction totale du régime moteur doit donc être assurée
par une action volontaire, maintenant la manette à fond en arrière, et cela peut aussi, avec
un peu d’expérience et de mémoire auditive, se confirmer par le niveau sonore habituel.
Il va donc falloir agir sur les palonniers pour, durant tout l’arrondi, maintenir les roues principales parallèles à l’axe de piste, qui plus est à cheval sur le pointillé s’il s’agit d’une piste en dur. N’ayant généralement pas le visuel sur les roues principales dans cette phase de vol,
le parallélisme roues-piste devra donc être contrôlé par l’observation visuelle de la trajectoire de l’appareil, « l’effet vitesse » dans le pare-brise bien séparé en deux parties égales avec des points de fuite équilibrés de chaque côté. Le « vecteur vitesse » et la sensation du « défilé du paysage » venant à soi doivent être ainsi parfaitement alignés avec l’axe longitudinal de l’aéronef.
Évidemment, c’est plus simple à écrire qu’à réaliser car il s’agit d’une phase dynamique avec, lors d’une période de moins de 10 secondes environ, une variation de multiples facteurs :
les effets moteur sont entrés en jeu avec les effets gyroscopiques, le couple moteur, voire
la traction dissymétrique si l’assiette est bien marquée, sans oublier une diminution de la vitesse donc de l’efficacité des gouvernes aérodynamiques, et encore faut-il évoquer
une très probable diminution de la stabilité de route… Sans jouer de l’orgue aux pieds, il va falloir rapidement contrôler tous les effets entraînés par ces paramètres en régime « instationnaire », en gardant l’axe de l’appareil parallèle à la piste et en le corrigeant dès
le moindre écart.
En instruction, avec une piste suffisamment longue, il est possible avec un filet de gaz pour maintenir l’appareil en vol près du sol de démontrer la possibilité de petites variations autour
de l’axe de lacet et ainsi faire varier la trajectoire aux palonniers pour venir chercher le pointillé central de la piste car avec un faible écart, il n’est pas question de jouer sur l’axe de roulis, les ailes devant être maintenues horizontales.
Qui dit action au palonnier pour ramener le nez de l’appareil à la position souhaitée dit effet secondaire, plus ou moins marqué selon les machines, effet imposant donc une éventuelle correction aux ailerons pour éviter le roulis induit par la gouverne de direction. Il faut prendre en compte aussi la désaxe du pilote par rapport à l’axe longitudinal de l’appareil si ce dernier, cas d’une majorité de nos aéronefs, utilise une disposition côte à côte en cabine (parallaxe).
Il est alors nécessaire de visualiser une parallèle à l’axe longitudinal de l’aéronef découpant ce dernier en deux parties égales et ne pas prendre la pointe du cône d’hélice comme référence. Se servir d’une marque ou de la trappe à huile sur le dessus du capot moteur, ou l’axe à partir d’un instrument en sommet de la planche de bord, peut aider. Les pilotes de monoplaces ou biplaces en tandem sont évidemment avantagés sur ce point.
Si l’on pratique surtout des pistes en herbe, la légère accélération transversale au toucher des roues peut être atténuée sans que le pilote ne s’en rende vraiment compte car les pneus
du train principal ont eu la courtoisie d’encaisser la dérive de l’appareil au contact de l’herbe,
se déformant pour absorber l’effet indésirable, sans compter la « mollesse » du sous-sol qui participe à atténuer l’effet. Mais lors d’un prochain atterrissage sur piste en dur, au sol plus ferme pour les pneus, il en sera tout autrement…
Sur piste en herbe et encore plus sur piste en dur, l’effet pourra aussi être nettement plus ressenti lors d’un atterrissage vent de travers insuffisamment contrôlé : soit l’appareil s’est posé sur l’axe mais avec les roues principales non parallèles à la piste faute d’une action suffisante sur le palonnier « sous le vent », soit les roues sont bien alignées sur la piste mais l’appareil
a dérivé « sous le vent », faute d’une action suffisante aux ailerons pour rester sur l’axe central
de la piste. Bref, à vos palonniers ! ♦♦♦
Photos © F. Besse / aeroVFR.com