Premier vol du démonstrateur en mode hybride-électrique.
C’est par le site internet de Daher, ce jour, qu’a été annoncé le premier vol hybride-électrique du démonstrateur EcoPulse effectué… le 29 novembre dernier. Lancé en 2019, soutenu par le Conseil pour la Recherche Aéronautique Civile (CORAC) et cofinancé par le gouvernement français et l’UE, il s’agit d’un démonstrateur d’avion à propulsion hybride distribuée (DEP Distributed Electric Propulsion) sur la base d’une cellule de TBM. Le programme de recherche est mené par :
– Daher : le constructeur à la charge de l’installation des équipements et systèmes, des essais en vol, de la conception globale, des analyses de sûreté de fonctionnement et de l’approche réglementaire en relation avec la DGAC.
– Safran : la société fournit l’ensemble du système propulsif électrique (hors batteries) composé d’un turbogénérateur (turbine combinée à un générateur électrique), d’un système de management de la puissance électrique et de propulseurs électriques intégrés (ou e-Propellers) comprenant les moteurs électriques et les hélices.
– Airbus : le constructeur assure l’optimisation aérodynamique du démonstrateur, les contrôles avion assistés de la propulsion distribuée et le développement de la batterie à haute densité énergétique (800 V/350 kW).
EcoPulse constitue ainsi une excellente plate-forme pour d’évaluer et de déterminer les caractéristiques attendues pour les futurs projets d’avions hybrides. Ce démonstrateur, destiné à rester unique, a pour objectif « de faire monter en maturité des briques technologiques qui pourraient contribuer aux efforts de décarbonation de l’industrie aéronautique ». Il doit permettre « d’évaluer plus particulièrement les avantages de la propulsion distribuée, l’efficacité énergétique globale à bord (réduction de la consommation de carburant) ainsi que la propulsion électrique et la batterie haute tension vis-à-vis de leur potentiel d’intégration sur les futurs avions ».
La propulsion DEP repose sur une seule source d’alimentation électrique indépendante, ou une association de sources électriques, pouvant alimenter plusieurs moteurs distribués sur l’ensemble de l’appareil. Sur l’EcoPulse, la batterie haute tension intégrée alimente les six moteurs électriques avec le turbogénérateur embarqué de 100 kW. Ce dernier contient une turbine à gaz compacte couplée à un générateur électrique.
« Au coeur de l’architecture de la DEP se trouve un PDRU (unité de distribution et de redressement, développée par Safran) dont le rôle est de protéger le réseau haute tension et de distribuer l’énergie électrique disponible, ainsi que des harnais électriques haute tension ». La DEP offre une commande différentielle de la poussée. Ainsi, les moteurs électriques seront commandés individuellement par le FCC (calculateur de commandes de vol, conçu par Airbus), notamment pour « effectuer les opérations de commande latérale (limitant ainsi la dépendance à un gouvernail physique et/ou des ailerons de grandes dimensions, et réduisant potentiellement la masse et la traînée) et de commande de vitesse ».
Daher a apporté « des modifications au poste de pilotage pour permettre au pilote d’engager simplement les différents modes de la DEP (comme la commande de couple ou la commande de vitesse) à l’aide d’un nouveau bandeau spécial et ensuite piloter l’avion en utilisant la commande des gaz pour la puissance (simplement constituée de deux manettes, gauche et droite, une pour chaque aile) et un mini-manche pour la direction et la trajectoire de l’appareil ».
Les pilotes « n’auront pas à se demander ce que fait chaque e-Propeller et/ou chaque gouverne en temps réel (en situation isolée ou combinée) car cet aspect est entièrement géré par la logique du FCC. Il leur suffira de dire à l’appareil ce qu’ils veulent qu’il fasse à l’aide des commandes de vol. Une autre fonctionnalité utile est que, contrairement aux turbines à gaz classiques (turbopropulseurs), le déplacement angulaire de chaque rotor d’e-Propeller peut être contrôlé et commandé précisément de façon digitale (au degré près). Chaque hélice peut ainsi être automatiquement synchronisée en phase par rapport aux hélices voisines pour réduire le bruit et les vibrations en vol. Cet aspect constitue une autre « brique » technologique importante ».
Les premiers vols sur la seule puissance de la turbine Pratt & Whitney ont eu lieu quelques mois plus tôt, avec les e-Propellers (hors tension) à l’arrêt. 10 heures de vol seront ainsi enregistrées en mai et juin dernier. Puis l’installation complète (chaîne d’alimentation électrique haute tension, comprenant turbogénérateur, batterie et les e-Propellers) a été installée et testée au sol. Un premier essai au sol de la batterie « sur chariot » avait alors permis de faire tourner simultanément les 6 moteurs électriques jusqu’à une vitesse de 1.200 tr/mn. Chaque motorisation utilise une hélice tripale fournie par Duc Hélices, installée sur un moteur électrique de 50 kW (ENGINeUS), lui-même logé dans une nacelle.
Ces essais en vol préliminaires avec la turbine ont permis aux pilotes d’essais « de faire voler l’avion démonstrateur avec le turbopropulseur existant situé dans la pointe avant pour, dans un premier temps, porter leur attention sur l’aérodynamique, l’inertie supplémentaire et les autres effets des nacelles et de leurs hélices sur la manœuvrabilité globale de la plateforme ».
Ce 29 novembre, ce fut donc le premier vol avec les six e-Propellers montées sur la voilure et en fonctionnement, turbine en marche pour assurer la sécurité. La cellule du TBM avait été recouverte de brins de laine pour « visualiser » les écoulements en aval des motorisations.
Ce vol a duré 1h40. L’équipage d’essai (dont l’identité n’a pas été communiquée) a activé « les propulseurs électriques et vérifié le bon fonctionnement de l’ordinateur de commandes de vol, de la batterie haute tension, de la propulsion électrique distribuée et du turbogénérateur électrique hybride du démonstrateur ». ♦♦♦
Photos © Daher. En ouverture, image numérique de l’EcoPulse