Le catalogue de l’exposition éponyme au musée de l’Air et de l’Espace.
Déjà évoquée sur aeroVFR, se tient actuellement au musée de l’Air et de l’Espace, au Bourget, une exposition temporaire (jusqu’au 3 mars 2024…) concernant les années folles de l’aviation. Si vous n’avez pas le temps de vous rendre au Bourget, le catalogue d’exposition mérite le détour, car très complet, fruit d’une dizaine d’auteurs de disciplines multiples. Il s’inscrit dans la lignée des travaux déjà menés par l’historien Emmanuel Chadeau (Le rêve et la puissance. L’avion et son siècle, Ed. Fayard, 1996).
Sous-titrée « l’aéronautique au coeur de la modernité (1919-1939 », l’exposition et donc le catalogue évoquent l’entre-deux-guerres, avec une nouvelle dynamique née après la fin du premier conflit mondial. Il ne s’agit donc pas de l’histoire de l’aviation durant cette période mais du rôle de l’aviation dans les transformations de la société, qu’il s’agisse de l’architecture, des arts, du voyage, de la relation au temps… le tout se traduisant par la construction d’aérogares mais aussi l’usage de nouveaux matériaux utilisés dans le mobilier en s’inspirant de la production aéronautique.
L’une des représentation de l’aviation, c’est aussi le domaine de la vitesse – qu’il s’agisse du courrier postal ou des premières lignes aériennes devant rapprocher les hommes à l’échelle des continents après le défrichage de nouvelles lignes par l’Aéropostale ou des raids audacieux – et une nouvelle perspective de la Terre vue d’en haut. Ainsi, le monde aérien est abordé sous différents angles, historique (les débuts de l’aviation commerciale après les grands raids), sociétal (un monde encore très masculin symbolisé par des pilotes comme Jean Mermoz, un milieu cependant bousculé par quelques aviatrices), culturel (l’aéronautique servant d’imaginaire aux créateurs notamment dans le domaine cinématographique), artistique (de la photo aérienne aux affiches des compagnies) et bien sûr technique…
Pour ce dernier point, au-delà d’équipements, d’instruments, de moteurs ou de vêtements spécifiques, un seul appareil est exposé dans le cadre de cette exposition, répartie en deux secteurs au sein du musée. L’un se trouve classiquement dans le hall de l’entre-deux-guerres – près du Breguet « Point d’Interrogation » et d’un fuselage de Farman Goliath – l’autre expose affiches, photos, mobilier, maquettes de soufflerie et… l’unique Caudron C-714R emblématique du niveau de la recherche aérodynamique à la fin des années 1930. Même si ce racer signé Riffard n’a jamais volé, n’étant pas achevé avant le second conflit mondial et déjà dépassé par le record de vitesse décroché par un Me-209. Caché dans un entrepôt de Renault sur les Champs-Elysées durant l’occupation, repeint d’un bleu sombre non conforme au bleu Caudron pour une exposition à la Libération, ses formes ne lassent pas d’être admirées… L’occasion de le voir avant sans doute son retour dans les réserves du musée…
Plongée en piqué sur la ville, par Tullio Crali (1939)
L’étude de l’impact de l’aéronautique dans la culture visuelle et la modernité des années 1920-1930 est articulée en une dizaine de chapitres, illustrés des nombreux objets exposés. Les textes permettent d’aller plus loin dans la connaissance de cette période qui s’achèvera mal car l’aviation devient rapidement un objet de puissance pour les différents pays, mise au service de l’impérialisme. L’aviation civile va laisser place à l’aviation militaire et la charge utile passe alors de passagers pacifiques à des bombes. Un moyen de locomotion révolutionnaire a été dévoyé comme en attestera le tableau « Guernica » de Pablo Picasso… ♦♦♦
Photos © F. Besse/aeroVFR.com
Illustrations © MAE
– Les années folles de l’aviation. Multi-auteurs. Ed. Liénart/MAE. 220 p. 30,00 €