43 histoires d’aviateurs passés par Rennes-Saint-Jacques.
Brillante initiative que celle de l’aéro-club d’Ile-et-Vilaine (ACIV, aujourd’hui ACRIV, aéro-club de Rennes Ile-et-Vilaine) que de publier un ouvrage de témoignages de certains de « ses » membres. Résultat : 43 récits dont tous les auteurs partagent un point commun. Ils sont passés par cet aéro-club « le plus actif de l’ouest de la France » (une flotte de Piper PA-19 et Rallye, deux avions IFR dont un Cherokee Six et jusqu’à six salariés dans les années 1980), même si tous ne se connaissent pas car ils couvrent plusieurs générations, des années 1970 à nos jours.
Ainsi, de 1932, année de création de l’aéro-club aux années récentes, on découvre 43 parcours très diversifiés, révélant une fois de plus qu’un aéro-club peut servir de tremplin à des carrières passionnantes, servant de creuset à des passions qui évoluent du loisir au métier.
Ces 43 auteurs ont pour la plupart fait une carrière dans le domaine aéronautique et/ou sont toujours actifs à titre privé en aviation générale, l’ensemble ayant pratiqué toutes les palettes disponibles sur le marché, du modèle réduit au Concorde en passant par le jet d’affaires ou militaire, l’hélicoptère ou l’ULM…
Ils sont ainsi pilotes d’aéro-club, voltigeurs, pilotes d’essais ou de chasse, pilotes de présentation, vélivoles, pilotes de ligne ou de lignes (électriques !), instructeurs, hôtesses de l’air, contrôleurs aériens… jusqu’à l’élève pilote de ligne tout juste sorti du cursus ATPL à l’ENAC. S’ils sont passés par le club de Rennes, leur parcours les a ensuite entraînés dans différents domaines, ce qui fait la richesse des récits, très diversifiés par leur contenu. Cela va bien
au-delà de l’histoire de cet aéro-club, simplement retracée en préambule. Ce sont des récits de pilotes…
D’un chapitre à l’autre, à lire dans l’ordre que l’on souhaite, on passe ainsi d’un appontage de qualification de nuit sur Grumman E2C Hawkeye à la dispersion « particulière » des cendres d’un défunt au-dessus d’un golfe corse, via un foudroiement en Mirage IIIR dans la couche, le témoignage d’un ancien président du club ou de Henri Charrier (35 ans de club dont 27 comme chef-pilote), ou encore à quatre heures de roulage cauchemardesque en A380 à CDG par temps de neige avec canicule (39°C) en cabine, un ravitaillement « difficile » de nuit en Mirage IV, un feu moteur sur Cessna Citation, en planeur au-dessus de la Cordillère des Andes, le dévachage d’un planeur prévu en 3 heures qui finissent par faire 28 heures, l’atterrissage
de nuit d’une Corvette réacteurs éteints, le convoyage in extremis d’un ULM entre la Corse et Rennes, une commande de profondeur soudainement inactive après un décollage en biréacteur (MS-760 Paris) lors d’un test… Bref, on ne s’ennuie pas un instant.
Chaque récit évoque des expériences vécues par leurs auteurs, avec une centaine de photos et illustrations agrémentant le tout. En fin de chaque court chapitre, un commentaire sur leur vision du club permet de rappeler l’ambiance de l’époque, une anecdote, des personnages du monde associatif, avant de s’achever par un très bref parcours du signataire du récit. En fin d’ouvrage, après un chapitre de « synthèse » rassemblant toutes les expériences évoquées pour parler de l’acte de voler et des compétences ainsi associées à acquérir pour être pilote, le lecteur non-aéronautique trouvera de plus un lexique expliquant les différents sigles utilisés et quelques formules du jargon de pilotes…
Au gré des pages, on lit – parfois entre les lignes – l’évolution de cette aviation légère et de la réglementation afférente à cette activité, dont on attend toujours les résultats en matière de sécurité des vols en contrepartie de nouvelles et nombreuses contraintes. L’organisation d’un meeting en campagne, possible jusqu’aux années 1980, en atteste. Un aéro-club assurait alors plus qu’aujourd’hui un important rôle d’ascenseur social, en brassant les « catégories socio-professionnelles », avec des formations pour les jeunes subventionnées par l’État, un reliquat de l’Aviation populaire des années 1930…
« Raconter une histoire est un acte de transmission, où savoir et expérience se partagent.
Elle simule l’imagination, sert de pont entre les générations ». Tel est l’objectif de la publication de ces récits complétés de quelques entretiens animés par Jean-Gabriel Charrier, coordinateur de l’ouvrage mais aussi fils de l’ancien chef-pilote du club, ancien pilote inspecteur de la DGAC, pilote de ligne, auteur d’ouvrages liés aux facteurs humains (L’intelligence du pilote. Faire face) et animateur du blog MentalPilote.
Objectif atteint. Lecture recommandée pour tous ! ♦♦♦
– Voler, raconter. Histoires d’aviateurs. Sous la direction de J.-G. Charrier. 410 p. 25,00 €. Contact : jg.charrier@free.fr