Retour d’expérience sur l’utilisation d’une trentaine de Pipistrel Vélis en France.
Suite de la première partie du Webinaire sur le Vélis
Le CEO de Pipistrel, Gabriel Massey, a évoqué les évolutions du Vélis en cours ou à venir. Il est ainsi question d’un nouveau logiciel concernant le contrôleur du système de propulsion, avec l’objectif de récupérer de l’énergie lors des trajectoires en descente afin de recharger les batteries. 6% de gain pourraient ainsi être obtenus autorisant 7 minutes de plus de vol soit… 1 tour de piste supplémentaire lors d’une séance d’instruction. Cette évolution, permettant un plan de descente amélioré et un gain de vitesse de 25%, devrait se faire avant la fin 2023, la certification du système devant être accélérée par son usage déjà en cours aux USA sur des Vélis classés en « Experimental ».
Une amélioration concerne l’introduction d’un préchauffage des batteries pour l’hiver, point qui a entraîné quelques difficultés au démarrage l’hiver dernier. A ce jour, environ 60% de la flotte française a reçu le « kit hivernal », le solde devant être traité avant l’hiver 2023.
Dans les projets en 2023 figurent encore la suppression de la limite de la température ambiante, permettant d’imaginer des vols avec une température ambiante pouvant aller jusqu’à -20°C. Un couvercle de l’entrée d’air est également sur la liste des évolutions. L’extension de la durée de vie de la batterie fait aussi partie des développements en cours avec actuellement l’objectif de 1.500 cycles (à raison de 45 mn par cycle en moyenne). Le calendrier d’application de ces diverses évolutions doit faire l’objet d’une réunion du constructeur avec l’EASA lors du salon Aero à Friedrichashafen, ces jours-ci.
Une incertitude demeure encore sur la durée de vie d’une batterie. Il faut donc suivre son « état de santé » (SOH, State Of Health) sachant que dès qu’une cellule de batterie (2.400 au total) atteint moins de 80% de sa capacité, sa durée de vie aéronautique est considérée comme atteinte mais pas sa durée de vie au sol. Différentes sociétés peuvent alors lui redonner une seconde vie avec l’usage par des opérateurs terrestres, ou la recycler.
Le patron de Pipistrel évoque d’autres développements en cours dont l’activation d’une charge rapide jusqu’à 50 kW (45 Amp) contre 22 kW (32 Amp) actuellement. Une nouvelle batterie serait déjà certifiée mais il reste à valider l’infrastructure de recharge, avec sans doute l’évolution du standard de la prise d’alimentation envisagée (CCS2). L’objectif est d’atteindre 30 à 40 mn comme durée de recharge.
Il faut ainsi évoquer l’installation en cours (ou achevée) de chargeurs fixes à Pontoise et Etampes – avec un partenariat comprenant Aéroports de Paris (ADP), Total Energie et la FFA – afin de permettre aux Vélis de Toussus-le-Noble de sortir de leur local, en pouvant rejoindre et recharger sur deux terrains avoisinants. Green Aerolease espère que l’autonomie de l’appareil atteindra 1h30 à l’horizon 2024, nécessitant la mise en place d’un réseau d’aérodromes disposant d’une borne de recharge, d’où la sensibilisation effectuée sur ce point des gestionnaires de plates-formes par Green Aerolease.
Il est précisé que le constructeur a retenu le concept de recharge, batteries restant en place sur l’appareil, et non pas par échange de batteries, et ce pour plusieurs raisons évidentes. Dans le cas d’un échange de batteries, il faudrait vidanger le liquide de refroidissement des batteries et une APRS serait alors nécessaire… sans compter l’usage répété des branchements-débranchements des circuits, pouvant altérer les connexions électriques. De plus, les deux packs, devant et derrière le cockpit, affichent chacun près de 75 kg… L’échange de batteries demeure donc une opération de maintenance et ne peut s’envisager comme une simple manoeuvre opérationnelle sur le terrain.
Green Aerolease considère que si les 25 à 30 mn de recharge sont prochainement atteintes (contre 35 à 40 mn actuellement), il n’y aura pas de problème sur ce point car entre les vols de 30 à 40 mn de durée en moyenne (pas besoin d’une recharge complète de la batterie seulement en partie « consommée »), il faut bien changer d’équipage, faire un débriefing à l’élève « descendant » et un briefing à l’élève « montant à bord » et donc il n’y aura pas de temps mort dû au temps de recharge… Les principales attentes technologiques doivent donc porter plus sur l’autonomie des batteries que sur leur temps de recharge.
Le webinaire s’est achevé par quelques questions-réponses. Il n’y a pas encore de qualification de classe électrique pure, type SEP (Single Engine Piston). Dans les cartons administratifs figurerait une « variante » électrique en quatre vols de 40 mn et avec au moins 3 heures de thermique et/ou d’électrique pour proroger.
Pour Green Aerolease, si l’autonomie du Vélis atteint prochainement 1h30, il sera possible d’effectuer un PPL à 100% sur motorisation électrique… On se permettra de mettre un bémol à cette affirmation car il est bien difficile d’effectuer tout le programme prévu lors d’un test PPL en moins de 1h30. En pratique, selon des FE(A), la durée moyenne est plus proche des 2h00 à 2h30 comprenant navigation, déroutement et exercices de maniabilité. La technologie progresse mais il manque encore de l’autonomie pour être serein à bord et ne pas regarder à chaque instant la charge restante…
Si Pipistrel, alors sous la direction d’Ivo Boscarol, a incontestablement pris de l’avance avec son Vélis après un développement technique permis par une cellule déjà « amortie » (Sinus, Virus, etc.) et des motorisations électriques progressivement développées sur des prototypes – y compris l’unique Taurus G4, « quadriplace » vainqueur du Green Flight Challenge en 2011 en Californie, le tout sous la direction technique de Tine Tomazic – il reste à faciliter la diffusion de l’appareil auprès des utilisateurs, sujet sur lequel Green Aerolease s’est fortement impliqué, prenant les risques à la place des opérateurs via un contrat de location.
Mais pour Charles Cabillic il reste encore à trouver un modèle économique car les autres appareils en cours de développement et susceptibles d’arriver ces prochaines années
sur le marché affichent un prix de vente 2 à 2,5 fois celui du Vélis (déjà pas donné…) et ces tarifs vont inévitablement les orienter vers les écoles professionnelles, jusqu’à la formation IFR. Ainsi, dans les faits, le Vélis pourrait rester le seul appareil à motorisation électrique à la portée de (certains) aéro-clubs. une chose est sûre : la transition énergétique doit inévitablement passer par l’aviation légère car la technologie va le permettre bien avant que cela devienne une réalité pour l’aviation commerciale… ♦♦♦
Photos © Pipistrel, Green Aerolease, ENAC, aéro-club Brest Finistère
NB : bien que webinaire en diffusion publique – donc avec la possibilité de faire des images d’écran… – et avec l’annonce en direct de la diffusion sur demande du powerpoint, Pipistrel n’a finalement pas souhaité que ce dernier soit diffusé. Quelques imprécisions pourraient ainsi susbsister dans cette synthèse faute des données détaillées du constructeur. On s’éloigne de la philosophie d’Ivo Boscarol avec sans doute l’entrée en fonction du service juridique de Textron Aviation !