Catégorisé en « Incident grave », l’événement survenu à un Cessna 525A CitationJet en août 2020 révèle qu’il ne faut pas – parfois – faire entièrement confiance à son instrumentation. Voici le résumé tel que rédigé par le BEA…
« Le pilote, accompagné de membres de sa famille, a prévu un vol au départ de Paris-Le Bourget à destination de Deauville-Normandie (14). Dès le lever des roues, le pilote a été confronté à la défaillance de l’écran de son PFD de gauche. Il a appliqué la procédure relative à la panne d‘un PFD et basculé l’affichage des informations de son PFD gauche vers l’écran central (MFD). Il a ensuite constaté des incohérences d’informations d’altitude et de vitesse affichées entre le MFD et le PFD de droite ».
« Note : L’enquête n’a pas permis de reproduire la panne du PFD de gauche et d’en comprendre l’origine. Aucun lien n’a pu été établi entre la défaillance du PFD de gauche et les incohérences des informations affichées ».
« Le pilote a informé la contrôleuse du Bourget, avec qui il était encore en contact, des difficultés techniques rencontrées. Sur proposition de la contrôleuse il a déclaré une situation d’urgence. Il a ensuite été transféré en fréquence vers les services de contrôle de Paris-Charles de Gaulle. Le pilote s’est retrouvé dans une situation difficile où il évoluait :
– en monopilote avec un avion hautes performances,
– sans pilote automatique et avec des alarmes sonores, notamment de survitesse,
– dans des conditions météorologiques ne permettant pas l’acquisition de références visuelles extérieures à tout instant ».
« Le pilote a accordé la priorité au pilotage de son avion en utilisant les indications d’assiette et de roulis et en sélectionnant une poussée compatible avec la configuration de l’avion. Bénéficiant du guidage radar, il n’a pas appliqué la procédure dédiée aux situations d’incohérences des informations d’altitude et de vitesse. Il a cherché à lever le doute avec l’aide de la contrôleuse ».
« Cependant, au cours de ce guidage, sur la base d’une information erronée d’altitude qui était supérieure à l’altitude réelle de l’avion, la contrôleuse a demandé à plusieurs reprises au pilote de descendre. Entre 9 h 34 et 9 h 42, les informations d’altitude fournies à la contrôleuse lui indiquent que l’avion est stable à environ 3.000 ft alors qu’il est en réalité descendu de 5.000 vers 1.600 ft ».
« Lorsqu’il a eu l’indicateur de pente d’approche (PAPI) et la piste en vue, le pilote a estimé qu’il était en mesure d’effectuer l’atterrissage à vue. L’atterrissage s’est déroulé sans difficultés particulières. L’examen de la chaîne anémo-barométrique a montré que les incohérences des informations d’altitude et de vitesse trouvaient leur origine dans la contamination du tuyau raccordé à la prise statique droite ».
« Le transpondeur 1 de l’avion, associé à la chaîne ADC1 défaillante, fournissait une altitude erronée au contrôleur. Cette information erronée a été utilisée par le pilote et la contrôleuse pour aboutir à un biais de confirmation sur l’altitude de l’avion. Ce biais a pu significativement augmenter le risque de collision avec le relief ».
« La possibilité de biais de confirmation dans une situation de ce type avait été mise en évidence par l’enquête du BEA sur un événement de 2010. Une consigne opérationnelle avait été diffusée aux services de contrôle de la navigation aérienne après l’événement de 2010, et intégrée dans les Manuels d’exploitation. Toutefois, la contrôleuse en poste n’avait pas souvenir de cette consigne et de la procédure d’urgence associée ».
« La séparation de l’avion avec les trafics potentiellement conflictuels a été assurée mais les autres items de la procédure d’urgence n’ont pas été effectués. Le pilote n’a pas été informé que les contrôleurs ne pouvaient pas l’aider à lever le doute sur son altitude et il ne lui a pas été demandé d’éteindre le mode C de son transpondeur. Le guidage radar réalisé par la contrôleuse a permis au pilote de rejoindre l’aéroport du Bourget ».
En VFR, l’incident aurait été moins grave avec les références visuelles permettant d’estimer une altitude mais le problème pourrait impacter le respect de l’espace aérien…
NDLR : sur l’illustration d’ouverture, les points rouges représentent les altitudes affichées sur l’écran radar du contrôleur. Elles correspondent aux informations envoyées par le transpondeur 1 de l’avion et sont issues de la chaîne anémo-barométrique gauche (ADC1) disponibles sur le MFD. Les points noirs indiquent des altitudes annoncées par le pilote dont la source est la chaîne anémo-barométrique droite (ADC 2), disponibles sur le PFD de droite et l’altimètre de secours. Ces altitudes sont les altitudes réelles de l’avion. ♦♦♦
En téléchargement, le rapport complet du BEA :
CitationBourget