De l’intérêt d’initier ses passagers réguliers à la pratique du pilotage sans aller jusqu’au brevet complet.
Ce samedi 9 avril, un pilote a eu un arrêt cardiaque en plein vol, alors qu’il était accompagné d’une passagère non-pilote. Parti de Lorient vers la presqu’île de Quiberon, d’après la presse régionale, le pilote, âgé de 66 ans, aurait ressenti une vive douleur dans la poitrine avant de perdre connaissance. Sa passagère, âgée d’une trentaine d’années, a repris les commandes du monomoteur de construction amateur, un Viking Dragonfly, biplace côte à côte à ailes en tandem, de type canard.
Elle est parvenue à maîtriser en partie la trajectoire du biplace dont la course s’est achevée dans un marécage. La passagère est parvenue à s’extraire de l’appareil pour alerter un promeneur qui a appelé les secours. A l’arrivée de ces derniers, le pilote était décédé. Selon le Codis du Morbihan, la passagère, en état de choc, est saine et sauve.
Au-delà de ce qui restera un « fait divers » dans l’actualité, il faut prolonger l’information en abordant l’utilité d’initier au pilotage ses passagers réguliers, notamment les conjoints. C’est aux Etats-Unis que le concept Pinch-Hitter a vu le jour il y a plusieurs décennies. Le terme de Pinch Hitter provient du base-ball, avec un batteur prévu en remplacement en cas d’urgence. Dans les faits, il s’agit d’impliquer ses passagers réguliers dans le pilotage, pour deux raisons : la première est de pouvoir apporter une assistance lors du vol en participant au suivi de la navigation, à la veille anti-collision, etc. La seconde est d’être capable de ramener l’appareil au sol en cas d’incapacité du pilote.
D’où la mise en place de stages Pinch-Hitter donnant des bases théoriques pratiques au stagiaire (commandes de vol, instrumentation, gestion carburant, communication, etc.) et aussi les rudiments du pilotage (contrôle de la trajectoire, changements de configuration, etc.), le tout selon un programme méthodique, assuré par des instructeurs formés à cette spécificité. En cas d’urgence, l’objectif est de ramener l’appareil au sol en sauvant l’équipage, même si l’aéronef est endommagé.
Si des aéro-clubs français évoquent les stages Pinch-Hitter sur leurs sites internet, tels le cercle aérien de Lestrem, les aéro-clubs de Dinan, Saint-Brieuc, Lorient, du Pays rochefortais ou encore de Versailles, peu ou pas de stages sont réalisés en pratique… faute d’une demande. L’aéro-club des Grèves du Mont Saint-Michel fait partie des associations ainsi à le proposer, avec une formation en quelques heures : 5 heures de cours au sol et 5 heures de vol. Ces dernières permettent d’aborder les bases du pilotage, la navigation, la communication, le retour au sol… Le tout peut se dérouler sur un week-end Un diplôme de fin de formation peut être délivré – ce n’est pas un brevet !
C’est une excellente initiative, permettant d’impliquer les conjoints, les enfants, parents ou amis dans la gestion d’un vol, au-delà du vol de découverte ponctuel beaucoup plus limité.
Et cela peut servir un jour – de nombreux cas réels en attestent dans le monde – en cas de défaillance subite en vol du pilote aux commandes – le concept HomeSafe d’un retour automatique de l’appareil au sol n’est pas encore pour demain sur avions légers…
En attendant, lors d’un prochain vol, en croisière, il est toujours possible de dire à son passager/sa passagère habituel(e) « Et si maintenant je perds connaissance, que fais-tu ? ». Et d’expliquer les rudiments du pilotage depuis la place droite, la compensation, la gestion carburant, l’usage de la radionavigation ou de la tablette GPS, l’usage de la VHF avec les fréquences adéquates. Un premier pas vers un prochain stage Pinch-Hitter ! ♦♦♦
Photo © AOPA-USA