L’arrêté du 10 novembre 2021 sera pleinement applicable à compter du 12 avril prochain !
Edit du 8 décembre 2021 : Lien vers les documents en bas d’article sur la page DGAC
Ces 26 et 27 novembre, France Spectacle Aériens – regroupant tous les acteurs des manifestations aériennes : organisateurs, pilotes de démonstration, directeurs des vols, commentateurs, etc. – tenait sa convention annuelle après l’annulation de l’édition 2020. Placée sous le thème « 2022, résilience… préparons le futur ! », cette convention a connu le samedi une série de présentations, allant d’une étude économique et stratégique à la réflexion sur l’empreinte carbone des meetings en passant par les travaux de l’European Airshow Council ou le modèle suisse des meetings plus « verts ».
Le vendredi, deux ateliers étaient organisés, le premier traitait des procédures à suivre pour bénéficier de la présence des forces armées. Le second, sans doute le plus attendu concernait l’arrivée de la nouvelle réglementation française régissant désormais l’organisation des « manifestations aériennes ». C’est cet unique sujet qui fait l’objet de cet article.
Oubliez l’arrêté du 4 avril 1996 régissant jusqu’à présent ce domaine. Publié peu avant la convention FSA, l’arrêté du 10 novembre 2021 relatif aux manifestations aériennes est désormais entré en vigueur. Cela faisait quelques années que ce projet réglementaire était en chantier, la DGAC ayant demandé au départ la création d’un organisme regroupant tous les acteurs – d’où la naissance de FSA… – pour avoir un seul interlocuteur. S’en sont suivies de nombreuses réunions de travail au sein du Groupe de travail sur les manifestations aériennes (GTMA).
Au final, le résultat, comme l’a rappelé en préambule Jean-Noël Bouillaguet, président de FSA, ne répond pas aux attentes des acteurs et FSA s’est prononcé à plusieurs reprises « défavorablement » face à ce texte réglementaire. La DGAC a décidé de passer outre et de l’appliquer. Dans l’après-midi, la venue de Damien Cagé, le nouveau patron de la DGAC, a été considérée comme un « acte fort », celui d’une DGAC qui confirme être attentive au devenir des manifestations aériennes.
Pour le patron de la DGAC, nouvellement en poste et qui a signé le texte que ses services lui ont présenté, l’aéronautique se trouve à un « moment sensible, délicat » pour différentes raisons (pandémie, transition écologique, aviation bashing). La DGAC entend bien soutenir l’aéronautique dans son ensemble, sans laisser de côté une facette comme les meetings, car c’est un tout et ce sont les meetings qui, souvent, constituent le premier contact du grand public avec l’aviation.
Mais il faudra savoir « prendre la vague » qui vient et savoir rebondir, d’où de nécessaires évolutions ou adaptations, car le pouvoir politique l’impose, pression qu’il faut impérativement prendre en compte. Revenant sur le nouvel arrêté, Damien Cagé n’est pas contre d’en revoir prochainement certains points du contenu si, sur le terrain, des difficultés d’application voient le jour lors de la prochaine saison, avec une justification à fournir pour en modifier le texte, l’objectif principal étant la sécurité des vols.
C’est Olivier Outtier (DGAC) qui a eu la charge de présenter à l’assistance les points essentiels modifiés par rapport à l’arrêté de 1996. Le premier point à noter est que l’on ne parle plus de manifestation aérienne mais de… spectacle aérien. Là où l’on comptait des événements de taille faible, moyenne et grande, désormais il n’y a plus que deux catégories : le Spectacle aérien public (SAP) – regroupant les ex-catégories moyenne et grande – et le Spectacle aérien public simple (SAP simple) ! Si ce dernier bénéficie « d’allègements », les deux autres sont désormais logés à la même enseigne…
Les compétitions, les manifestations privées (moins de 5.000 personnes mais sans appel au public) ne sont pas considérées comme des SAP. Il s’agit alors de « manifestations aériennes » et non pas de « spectacles aériens ». Les événements 100% militaire et le Salon du Bourget sont « hors cadre » de cette nouvelle réglementation. Tout ce qui touche à l’aéromodélisme au sens large (drones compris donc), en extérieur mais aussi en intérieur, a droit à sa réglementation et sa désignation de SAPA – Spectale aérien public d’aéromodélisme.
On note qu’une journée Portes ouvertes pour « encourager le développement de l’aviation légère et non pour constituer un spectacle public » (donc sans figure de voltige, sans vol en formation, sans dérogation aux règles de l’air, sans coordination nécessaire) n’est pas un « spectacle aérien ». Cette « manifestation aérienne » doit être organisée sur l’aérodrome habituellement exploité par le type d’aéronefs présentés. L’organisateur doit être soit un organisme de formation soit un organisme créé afin de promouvoir l’aviation sportive et de loisir… agréé à cet effet. Si l’on prend le terme agréé dans sa définition stricte, un groupement de clubs ne pourrait pas le faire collectivement car ils sont affiliés et non pas agréés (cas des fédérations).
S’il y a appel au public, ou plus de 5.000 personnes attendues, ou un plateau comptant plusieurs présentations, l’événement n’échappera pas au concept de SAP et donc à l’autorisation préfectorale. À noter que désormais une « lettre d’intention » doit être systématiquement envoyée à J-120, avec le lieu, les dates (répétitions et meeting), les noms du directeur des vols et son adjoint. Ceci passera par des formulaires CERFA (ministère de l’Intérieur) – qui ne sont pas encore en ligne à cet instant… – permettant de connaître le statut de l’événement : SAP ou SAP simple.
Cette lettre d’intention a pour but « d’initier le dialogue » avec l’envoi désormais à seulement quatre destinataires : préfet, DSAC locale, Police aux Frontières et le maire. Avec une anticipation à J-120, toute manifestation devant avoir lieu en avril prochain doit donc envoyer cette lettre avant la mi-décembre ! Applicable depuis le 17 novembre dernier, la réglementation sera appliquée pour tout événement organisé après le… 12 avril 2022. C’est demain !
Après la lettre d’intention à J-120, vient la demande d’autorisation à J-45. Point positif, l’autorisation préfectorale doit être délivrée à J-10 au plus tard et pas la veille comme on l’a trop souvent vu ces derniers temps. Il a été précisé qu’il ne peut y avoir d’arrêté de refus. L’autorisation doit comprendre l’événement, les répétitions et préciser les dérogations souhaitées (notamment hauteurs de survol).
Côté organisateurs, la nomination d’un directeur des vols suppléant doit être systématique. Un protocole doit être établi avec la DSNA au niveau de la responsabilité du contrôle avec la gestion de la circulation aérienne et de l’espace aérien à proximité. Pour les secours, on ne parle plus de zone publique et de zone réservée, mais de « côte piste » et « côté ville »… L’arrêté précise que des règles alternatives restent possibles, le texte devant servir de base de départ, avec des arguments justifiant l’évolution souhaitée avant avis de la DGAC.
Les responsabilités des directeurs de vol (DV) n’ont pas diminué. Les DV actuels bénéficieront des « droits du grand-père » s’ils ont une expérience récente (moins de 36 mois) mais à partir de 2024, la formation sera obligatoire pour les nouveaux DV, avec le statut de DV apprenti au départ, sur SAP simple avant de monter en grade progressivement. La « qualification » (le terme n’est pas utilisé) sera obtenue après un entretien avec des inspecteurs de surveillance de la DSAC – il faudra s’assurer d’une même homogénéïté de traitement dans les diverses DSAC/IR. Un jeu de rôle est prévu pour traiter de cas concrets, au-delà de la vérification d’un certain niveau de connaissances aéronautiques (un titre aéronautique semble nécessaire en pratique) et la maîtrise de la réglementation en vigueur.
Même à l’issue d’un SAP simple, le DV devra envoyer un compte rendu sous 30 jours, permettant à la fois des retours d’expérience mais aussi une traçabilité de son activité dans le cadre de sa « prorogation » en tant que DV… Si les organisateurs échappent à ce formatage – un organigramme avec la répartition des tâches est vivement conseillé (exemple ci-dessous), ce n’est pas le cas des pilotes de présentation. Ainsi à partir de 2024, il leur faudra participer à un Retex (retour d’expérience lors de réunions) et ce tous les 5 ans. Ces réunions d’échanges ne seront pas organisées par la DGAC mais déléguées à des organismes extérieurs, comme les ateliers techniques de FSA.
Pour les pilotes de démonstration, on notera que trois entraînements au préalable à une démonstration publique sont nécessaires. Il faut avoir participé à trois SAP pour avoir le droit de déroger à la limite basse des présentations, fixée à 500 ft/sol. La définition des zones utilisables par rapport au public doit permettre désormais des passages « à l’anglaise » ou Banana Pass.
Chaque pilote pourra remplir une fiche de participation, définissant sa prestation, les limitations techniques ou météorologiques (plafond, visibilité, vent de travers). Il est vivement recommandé aux organisateurs d’envoyer en amont de l’événement un « Pilot Book » aux présentateurs, faisant office de premier briefing avec présentation de la plate-forme, des axes et distances au public, repères visuels, fréquences, dégagements, etc. Ceci doit permettre, le jour du spectacle, de limiter le briefing du DV au strict minimum et aux spécifications du jour (météo). ♦♦♦
Photos © F. Besse / aeroVFR.com
Schémas © DGAC/DSAC
– La DGAC a diffusé lors de la convention FSA un « guide DSAC » explicitant les différents articles de l’arrêté. Il devrait être téléchargeable prochainement…
– En pièce jointe, ci-dessous, l’arrêté du 10 novembre 2021 relatif aux « manifestations aériennes » qu’il faut pourtant désormais appeler « spectacles aériens » !
Lien vers la page du site DGAC concernant les manifestations aériennes avec notamment les formulaires CERFA liés à la nouvelle réglementation.