Le Rolls-Royce Merlin, le moteur qui a « gagné la Seconde Guerre mondiale »…
Un avion sans moteur n’est rien et même, toute conception d’un avion doit passer par le choix d’une motorisation, point essentiel sur lequel sera bâtie ensuite une structure pour répondre à un cahier des charges. Durant la Seconde Guerre mondiale, à l’apogée des moteurs à piston avant que l’ère de la propulsion par réaction ne prenne la suite pour l’aviation militaire et commerciale, les motoristes cherchaient toutes les solutions possibles pour développer toujours plus de puissance…
Dans cet ouvrage, Gordon Wilson s’est intéressé à l’un de ces moteurs, ou plutôt à une motorisation qui a connu de multiples dérivés au fil du temps. Il s’agit du Rolls-Royce Merlin. Dans une première partie, il raconte la « naissance d’une légende » de 1904 à 1934. On découvre ainsi les deux personnages dont les noms seront liés à jamais : Frederick Henry Royce et Charles Stewart Rolls. Rien ne prédestinait ces deux hommes à se rencontrer, sauf la passion pour l’automobile. Leurs conditions sociales, leurs formations les séparaient mais ils se sont retrouvés autour du développement d’un moteur pour faire mieux que les constructeurs automobiles du moment.
Ils s’entourent d’autres techniciens. Tous deux s’intéressent évidemment à l’aéronautique balbutiante et au début de la Première Guerre mondiale la société Rolls-Royce reçoit une commande du gouvernement britannique pour produire un V8 Renault et des moteurs aéronautiques pour ce qui deviendra la Royal Air Force. Là encore, les créateurs de la société préféreront créer leur propre moteur, l’Eagle un V12 à refroidissement liquide qui prend l’air en décembre 1915. De nombreux constructeurs vont retenir ce GMP qui se fait aussi connaître par la première traversée de l’Atlantique Nord en juin 1919, avec Alcock et Brown aux commandes d’un Vickers Vimy.
La division aéronautique du constructeur de voitures ne va pas s’arrêter là et poursuivre la conception de différents moteurs – Hawk, Falcon, Condor, Eagle XVI, Kestrel, Goshawk, Buzzard… – dont celui destiné à un projet de chasseur développé par Supermarine au début des années 1930, un certain Spitfire. Il s’agit d’un V12 à refroidissement liquide, de maître couple réduit avec ses 60° d’angle. Ainsi, le Merlin B développe 950 ch sur banc en février 1933. La puissance passe à 1.030 en 1937 avec le Merlin II installé sur Spitfire et Hurricane.
Après 90 pages sur cette partie historique, et sans doute la plus intéressante car la moins connue, et la présentation de tous les composants d’un moteur à piston, l’auteur passe ensuite au développement des chasseurs Hurricane et Spitfire puis aux Bataille de France et d’Angleterre. Les chapitres suivants passent en revue, un à un et en détail, les différents avions ayant été équipés pour certains modèles d’un Merlin ou d’un Packard : De Havilland Mosquito, Avro Lancaster, North American Mustang (qui passera de l’Allison au Packard V-1650 version sous licence du Rolls-Royce Merlin). Un chapitre regroupe rapidement d’autres avions motorisés Merlin : Whitworth Whitley, Avro Lincoln, Avro Tudor, Avro York, Bouton-Paul Defiant, Curtiss Warhawk, De Havilland Hornet et Sea Hornet, Fairey Barracuda, Battle et Fulmar, Hawker Sea Hurricane, Westland Welkin, Vickers Wellington – n’en jetez plus…
Il faut 8 pages et quelques tableaux pour évoquer l’évolution du concept depuis le PV12 originel jusqu’à l’ultime Merlin 620 en passant entre autres par les Merlin II, 21, 64 et bien d’autres. Même si le Merlin se fait dépasser en puissance à la fin de la guerre par d’autres motorisations anglaises – comme le 24 cylindres Napier Sabre – il traversera la guerre apportant ses performances et sa fiabilité. D’où le sous-titre de l’ouvrage qui semble bien choisi, « le moteur qui a remporté la Seconde Guerre mondiale ». On peut décrire le Merlin comme le moteur à piston le plus significatif des années 1940…
Un dernier chapitre évoque le passé récent, avec notamment le Battle of Britain Memorial Flight toujours utilisateur de Merlin au quotidien, quelques musées et aussi la société californienne Vintage V12, spécialisée dans les révisions de Merlin pour de riches collectionneurs. Au final, un ouvrage très britannique sur un moteur britannique.
God save the Merlin ! ♦♦♦
Photo © CC / Jaw
– The Merlin, par Gordon Wilson, Ed. Amberley. 258 p. dont un cahier de 16 pages de photos. 16,00 € Texte en anglais.