Parmi les candidats au Grand Prix du Patrimoine (GPP) 2021.
L’Association pour la Renaissance du Caudron Simoun (Pontoise), présidée par Stéphane Lanter, est connue pour son chantier de remise en état de vol d’un très rare Caudron C-635 Simoun mais elle a d’autres projets en cours… Dont ce Nord 1002, dont le dossier a été déposé dans le cadre du GPP de l’AeCF. Ce type d’appareil a pour origine un quadriplace « tout métal » développé par Willy Messerschmitt pour un challenge international d’avions de tourisme en 1934. Dénommé Bf-108 pour la version de série, l’appareil innove avec son type de construction, faisant appel à une armature de duralumin recouverte de feuilles métalliques à rivets noyés pour en faire un revêtement travaillant.
Les principes de construction du Bf-108 seront repris peu après sur le Bf-109… Les deux monomoteurs partagent un même concept de train rétractable dans les voilures mais aussi des volets hypersustentateurs et des bords d’attaque extensibles, un réglage du plan fixe pour la compensation. Le Bf-108 sera utilisé lors de la Seconde Guerre mondiale comme avion de liaison. À partir de 1942, la production du 109 reste en Allemagne mais celle du 108 est déplacée en France, aux Mureaux, au sein de la Société nationale des constructions aéronautiques du Nord (SNCAN).
À la Libération, le Bf-108 devient le Nord 1000 tandis que la SNCAN prend le nom de Nord-Aviation. La production se poursuit avec les derniers moteurs Argus disponibles puis un Renault 6Q Bengali de 220 ch – motorisation prévue pour les Caudron Goéland et Simoun – est installé pour poursuivre la production jusqu’en 1946. D’où les désignations de Nord 1000 Pingouin (Argus As-10), puis 1001 Pingouin I (Renault 6Q11) et 1002 Pingouin II (Renault 6Q10).
Ce qui nous amène au projet de l’association, un Nord 1002 sorti d’usine en janvier 1946 (n°202) et, après une dizaine d’années dans l’armée de l’Air, passé entre les mains de différents propriétaires français, allemand, américains – avec une décoration hollywoodienne de Bf-109 de la Luftwaffe pour tourner dans plusieurs films. Cette décoration « réelle » a donc été retenue par l’équipe de restauration, pour lui redonner la livrée portée dans le film « Hindenburg », dernier rôle tenu à l’époque. Le quadriplace a été acquis par l’association en 2012.
Mais auparavant, cellule et moteur sont passés par la case Atelier. L’association pour la Renaissance du Caudron Simoun dispose d’un stock important de Renault Bengali 6Q mais sans offre de maintenance ou de restauration sur le marché pour ce type de moteur, il a fallu tout faire sur ce moteur stocké depuis 1978, avec la réalisation d’un nouveau GMP par cannibalisme de pièces sur les différents moteurs disponibles. Sélection de chaque élément, nettoyage, métrologie, appairage et validation ont ainsi précédé le remontage.
Les compétences développées autour de ce GMP (Renault Bengali 6Q et hélice Ratier), avec la participation de deux anciens, Jean-Claude Lombard et Jean Bonnet – tous deux âgés de 85 ans – seront fort utiles pour le chantier en cours du Caudron Simoun, projet également assuré sous la responsabilité de Jean-Pierre Chellet. C’est d’ailleurs en étant confrontée à la problématique de la motorisation du Simoun que l’équipe a décidé de passer par une étape intermédiaire, celle du Nord 1002. Une équipe s’est ainsi constituée autour de cet appareil et surtout s motorisation avant d’appréhender la phase finale du Caudron Simoun.
L’hélice Ratier-Figeac a été démontée, radiographiée, équilibrée dynamiquement avant la repose de 800 billes et ressorts de pieds de pales, pour cette bipale à pas variable par système électrique – innovation à l’époque – avec recâblage et essais sur banc. Le tout a été suivi par une longue période d’essais au sol et de mise au point des différents équipements périphériques, avec divers domaines de compétences à maîtriser : carburation, allumage, graissage, refroidissement, etc.
Côté cellule, les deux demi-coques du fuselage ont été inspectées, nettoyées et repeintes. Les ailes, repliables, ont été démontées et inspectées avant remontage.
Toute la cabine a été refaite avec démontage des commandes de vol, mise en place de nouvelles verrières, vérification des sièges fixés entre longeron et faux longeron de voilure, etc. Il en a été de même pour le système de rétraction du train principal, avec un mécanisme par vis sans fin.
Si l’instrumentation est « d’époque », pour répondre à la réglementation actuelle et au suivi du moteur, transpondeur, radio et EDM (Engine Data Monitoring) ont été installés. ♦♦♦
Photos © Association pour la Renaissance du Caudron Simoun
http://www.caudron-simoun.com