Un premier survol du Guide de l’instructeur VFR édition 2021 à l’usage des instructeurs.
Après l’annonce de la récente édition (la troisième même si on en trouve quatre !) du Guide de l’instructeur VFR édité par l’ENAC, il a été précisé sur ce blog qu’au listing des modifications apportées à la précédente édition n’était communiqué, ce qui est bien dommage en termes de communication ! Certains lecteurs l’ont souligné également dans leur commentaire. La page 5 de la nouvelle édition est assurément un peu « courte » sur le sujet puisque « l’objet de la dernière mise à jour » est simplement expliqué par les mots « Nouvelle édition » ! La communication de la DSAC en la matière arrivera peut être prochainement (?).
Parfois « l’école de pilotage à la française » évolue subrepticement, notamment à la suite d’accidents dans l’aviation commerciale ayant pu amener à faire évoluer certaines pratiques subitement trouvées obsolètes. On se souvient par exemple de l’abandon du décrochage avec perte minimale de hauteur, évolution voulue un temps par la « doctrine » mais oubliée après l’accident de l’AF447.
Aussi, à partir de l’édition « papier » du 17 novembre 2014 (édition 2), une tentative est ici faite pour souligner les principales modifications apportées par cette nouvelle édition datée de mai 2021. Les deux versions ont été « survolées » rapidement et il s’agit donc là d’une première analyse, forcément non exhaustive. Globalement, il n’y a pas de révolution – la liste des leçons listée en début de guide reste inchangée – sinon on peut penser que la DSAC l’aurait indiqué auparavant – mais certaines leçons ont été déplacées. Il s’agit plus souvent d’une amélioration du texte, notamment par la publication de précisions plus détaillées ou claires, ou par une réorganisation de certaines leçons, ou encore des schémas nouveaux ou revus.
Il est rappelé ici ou là que telle ou telle leçon est dense et qu’elle ne peut être traitée en une seule fois et qu’elle est donc à découper, ce que faisaient déjà tous les instructeurs mais c’est désormais clairement indiqué ! Il faut savoir que ce document est réalisé en premier lieu pour les instructeurs de l’ENAC, donc appelés à former des élèves destinés à l’aviation commerciale – même si a disparu ici ou là les trois niveaux auparavant recherchés : « leçon vue, assimilée PPL, assimilée CPL » !
On notera que la police plus faible ou électroniquement condensée a permis d’alléger la présentation en l’aérant ou d’ajouter ici ou là certaines précisions, avec parfois une meilleure hiérarchisation par l’usage du gras. Ce peut être par exemple : « En fonction du niveau d’accoutumance préalable du stagiaire, les leçons 1 et 2 peuvent être groupées », ce qui était déjà le cas en pratique… L’instructeur n’étant pas infaillible, en plus des « erreurs fréquentes des élèves » sont plus souvent citées celles du FI, comme une « mauvaise gestion du volume de travail ».
Une bonne chose est l’arrivée d’un sommaire (pages 3 et 4) permettant de retrouver rapidement une leçon sans avoir à feuilleter le guide… Dans le sommaire détaillé des différentes phases de la progression, le Décrochage a été déplacé pour rejoindre Changement de configuration et Vol lent, arrivant plus tôt dans le cursus. L’item Approche et Approche interrompue évoque le plan de 5% mais ne parle plus de 1.3.Vs. À la place, il y est question de « vitesse de référence » – plus employée en aviation commerciale et donc par les élèves de l’ENAC.
Dans le déroulé du Briefing théorique, dans la partie Organisation, en début de guide, il est ajouté que « pour les simulations de situations anormales, des normes de sécurité peuvent être définies par un manuel de sécurité exploitant, il convient aux formateurs de se référer à ce document pour l’organisation des séances ». On le verra, une approche plus orientée ou renforcée « sécurité » est bien présente dans de nombreuses pages.
Dans l’explication de la leçon en vol, à l’item Perception, le texte précise bien ce que l’élève doit percevoir : 1) le comportement naturel de l’avion et/ou le résultat à obtenir. 2) la méthode de pilotage : les manoeuvres à effectuer (affichage et correction), le circuit visuel adapté. Pour les exercices désormais regroupés en une seule case, il est précisé qu’il « est essentiel que ces tâches soient exécutées en autonomie complète en fin de vol afin de mettre en place une évaluation objective du niveau, non biaisée par une intervention de l’instructeur. Une erreur classique de l’instructeur à ce stade est de continuer à guider. Si des guidages sont nécessaires, c’est qu’il faut revenir à la phase Actions ».
Leçon par leçon, passons en revue les évolutions constatées lors d’une rapide lecture. L’analyse plus poussée sera à faire par les instructeurs au gré des formations d’élèves en cours…
Mise en oeuvre, roulage et vol d’accoutumance
Dès l’alignement, il est bien précisé désormais quelle doit être la méthode de freinage : 1) réduction de puissance. 2) action sur les freins. Le positionnement des ailerons lors d’un roulage par vent de travers est mieux détaillé.
Assiette, inclinaison et ligne droite
Pour la visualisation des assiettes caractéristiques, le « RPB sur l’horizon » est complété de « cette assiette est représentative de l’assiette de référence 0°, qui dans les conditions standards correspond au palier croisière ».
Après la définition de l’inclinaison, la nouveauté réside dans une présentation détaillée du lacet inverse absente de l’édition précédente, cet effet secondaire n’étant que juste évoqué auparavant.
La rubrique « assurer l’anti-abordage » a été réécrite et si son importance est bien indiquée, le terme de « circuit visuel » a disparu… Il réapparaît heureusement plusieurs pages plus loin et dans différentes leçons.
Dans le plan de la leçon, au niveau des perceptions de l’Assiette et de l’Inclinaison, les textes sont beaucoup plus développés, avec des précisions évidentes mais à rappeler comme l’objectif recherché, un maintien d’une assiette et non pas d’une altitude ou d’une vitesse puisqu’aucune référence instrumentale ne doit être utilisée à ce stade de la progression. D’où l’arrivée en fin de leçon d’erreurs possibles côté instructeur.
Utilisation du moteur et du compensateur
Avant d’aborder les effets de l’augmentation de puissance sur la trajectoire, le guide propose deux pages sur les différents effets moteur (couple, souffle).
L’ordre d’apparition du compensateur et des trois assiettes caractéristiques a été modifié. Le rôle du compensateur est bien d’annuler un effort mais « à assiette stabilisée » précise désormais le document.
Alignement et décollage
Il est indiqué que cette leçon est atypique puisqu’elle ne peut pas être traitée en une seule fois mais s’inscrit dans la durée (bon sens !). La méthode pour s’aligner est plus détaillée, pour être « assis sur la ligne », rouler quelques mètres pour assurer du bon alignement de la roulette de nez, etc. Le conseil de ne jamais utiliser le frein de parking sur la piste reste à débattre s’il faut maintenir la position un certain temps… Au lâcher des freins, les « talons au plancher » sont bien indiqués. Le décollage et la montée initiale sont détaillés, avec une sensibilisation à l’influence du centrage qui était absente auparavant. Les courbes de puissance pour différencier les appareils à faible ou fort excédent de puissance sont plus explicites. Lors de la présentation du briefing Décollage, la gestion des erreurs et des menaces (TEM) apparaît. Les briefings Départ et Atterrissage ont été reportés à leurs places respectives…
Assiette-vitesse et Assiette-trajectoire
L’assiette à piquer bénéficie d’une formule indiquant qu’à puissance constante, une variation d’assiette de 1° correspond à une variation du taux de chute (Vz) dont la valeur est égale à (1/Fb) x 100. Ainsi, avec un facteur de base de 0,6, 1° de variation d’assiette entraîne 170 ft/mn (et non pas 170 Kt/min…)
Le circuit visuel sommaire se complexifie à partir de cette leçon avec des explications plus détaillées lors de corrections d’écarts, en vitesse à puissance constante ou en trajectoire à puissance constante.
Relation puissance vitesse incidence
Une page théorique s’est ajoutée avec un rappel des paramètres fondamentaux : incidence, calage de l’aile, pente, assiette… Le circuit visuel en décélération ou en accélération bénéficie d’un paragraphe et d’un schéma additionnels.
Contrôle du cap
La fonction HDG (Heading) du PFD (Primary Flight Display) s’invite dans l’utilisation du directionnel.
Palier, montée et descente, symétrie du vol
La conduite du vol en descente bénéficie d’un tableau détaillant tous les cas lors de la démonstration du couple vitesse/taux de chute.
Virages en palier, montée et descente, symétrie du vol
Avant d’attaquer le sujet, une page rappelle l’équilibre des forces en virage. Pour la symétrie, la représentation de l’avion vu du dessus avec les différents cas de vent relatif est plus explicite que les illustrations précédentes qui jouaient uniquement sur l’orientation du fuselage durant le virage… Le circuit visuel avant la mise en virage, en virage et à la sortie de virage, est étalé sur trois pages pour noter son importance, qu’il s’agisse du virage à puissance constante ou à vitesse constante – ce qui sensibilise mieux au risque de collision qu’un simple « rappel de l’anti-abordage ». Il en sera de même pour les virages en montée et en descente… On notera que s’il est bien indiqué Virage dérapé intérieur et Virage dérapé extérieur, à chaque fois, entre parenthèses, est précisé Glissade et Dérapage. Ce n’était pas le cas sur la version de novembre 2014…
Relations dans le virage
RAS !
Effets du vent traversier sur les trajectoires sol
Idem
Changement de configuration
Un schéma amélioré pour noter l’impact des volets sur les Cz et Cx.
Décrochage
Cette leçon a été « avancée ». Auparavant, elle figurait… après Atterrissage, Circuits de piste et Approche finale. Il est donc bien vu de la faire avant ces trajectoires proches du sol. Les effets de l’AF447 sont bien notables dans ce chapitre avec le rappel de l’incidence comme paramètre fondamental et la nécessité de pousser sur le manche jusqu’à la disparition des symptômes.
Vol lent
Il arrivait plus tôt auparavant, désormais placé après le décrochage. Cette précédente leçon étant faite, l’élève devrait être moins tendu lors du vol lent ! Les courbes de puissance nécessaire et de puissance disponible sont mieux présentées. Une nouvelle page évoque l’alarme de décrochage continue ou ponctuelle avant d’aborder les procédures de sortie du vol lent.
Chargement, centrage et stabilité longitudinale
Leçon déplacée mais à l’identique.
Approche et approche interrompue
Le 1,3.Vs a disparu de l’approche standard dans l’énoncé mais l’objectif est bien la mise en place de la visualisation du plan de 5%, le suivi de l’axe et la gestion de la vitesse. Quelques rappels de définition précèdent la leçon avec point cible, point d’aboutissement, point de toucher, palier de stabilisation, Vref (définie par le constructeur et à adopter en approche finale sans vent en configuration atterrissage), Vapp, objectif de stabilisation. Sans commentaires pour le reste inchangé.
L’atterrissage
L’arrondi consiste à passer d’un plan de 3° à un plan de 1°… En pratique, il est plus utilement précisé que l’incidence doit continuer à diminuer, par variation de l’assiette à cabrer jusqu’à l’obtention de l’assiette d’atterrissage. Si la procédure en cas d’atterrissage manqué est présente, la gestion des rebonds n’est pas mentionnée, ce qui fait partie certes du perfectionnement. Par contre, pour le « touch » (touché-décollé d’après M. Toubon…), il est – enfin – écrit noir sur blanc que l’élève devra à terme être capable de maîtriser la totalité du « touch an go » (pilotage et prise de décision).
Circuits d’aérodrome
RAS mis à part un schéma mieux détaillé et une page sur la nécessité parfois d’adapter (écartement, hauteur, éloignement, etc.) le circuit rectangulaire en fonction des contraintes locales.
Virage engagé
Cet item arrivait auparavant juste après le décrochage. Il aurait pu figurer après les virages à grande inclinaison et ainsi rapprocher les pannes en phase de décollage des circuits d’aérodrome ou, mieux, après les décollages et montées adaptées.
Pannes en phase de décollage
RAS
Virage à grande inclinaison
RAS
Le lâcher
Il aurait pu être rappelé que le terme « solo » derrière l’immatriculation de l’avion peut permettre au contrôle et/ou autres usagers de noter la présence d’un jeune « solo » dans le circuit.
Décollages et montées adaptés
RAS. Le schéma sur les gains de hauteur en fonction des vitesses affichées en montée est plus « démonstratif » que le précédent où les variations semblaient bien faibles.
Approches et atterrissages adaptés
RAS mais la relecture n’a pas poussé jusqu’à corriger Atterissage en Atterrissage pour les volets à 0° ou sur piste limitative !
Interruption volontaire du vol
Le processus décisionnel s’appuie désormais sur le FORDEC (Faits, Options, Risques, Décision, Exécution, Contrôle). L’analyse du terrain d’atterrissage s’appuie sur la formule mnémotechnique du vol à voile, soit le VERDO (Vent, Etat, Relief, Distance, Obstacles). La procédure de l’IVV est plus détaillée avec les reconnaissances haute et basse lors de la leçon.
Vol moteur réduit
Schémas et photos revus (avec un DA40 pour les différentes visualisations avec sa longue aile).
Vrille
RAS
Procédures anormales et d’urgence
Le préambule rappelle la priorité Pilotage-Trajectoire-Communication.
Virage à forte inclinaison en descente moteur réduit
Le passage « dans le trou de nuages » pour retrouver le sol bénéficie de plus de pages avec phases de préparation, de contrôle de la descente, et d’après passage sous la couche nuageuse.
Estime élémentaire
La détermination des composantes des vents traversier et effectif est plus détaillée.
Le cheminement
RAS
Navigation
RAS
Application au voyage
RAS
Radionavigation
RAS
Égarement
RAS
Pertes des références extérieures
Utilisation du GPS
Au final, la pagination s’est accrue. Ceci est dû à l’apport d’explications supplémentaires dans plusieurs leçons, avec ou sans nouveaux schémas. Les commentaires sont ainsi plus détaillés, ce qui sera utile notamment pour de jeunes instructeurs, même si certaines précisions relèvent du bon sens et que les pratiques indiquées sont déjà réalisées.
L’ordre des leçons a été modifié. Certains concepts ont évolué (approche à la vitesse de référence qui n’est pas forcément 1,3.Vs comme c’est le cas déjà depuis des années sur des avions légers d’ancienne génération…). Des procédures (FORDEC, VERDO) peuvent être utiles à formaliser les actions à mener en cas d’urgence. Pour une meilleure uniformisation des formations au sein des ATO/DTO, l’utilisation de ce nouveau guide s’imposera donc car les évolutions ne sont pas cosmétiques même si l’apprentissage du pilotage n’est pas révolutionné ! A vos guides ! ♦♦♦