Trois dérogations de la DSAC aux règlements européens AirCrew, AirOps et Maintenance pour permettre l’usage en France de Vélis Electro…
Le Vélis Electro, développé et produit par Pipistrel avec l’expérience acquise sur l’Alpha Electro, est le premier biplace à motorisation électrique certifié par l’EASA le 10 juin 2020. Depuis cette date, il peut donc être commercialisé mais son usage pose problème car la mise sur le marché de ce biplace, destiné à la formation de base en local, a pris de cours le législateur, alias l’EASA.
Aussi, pour permettre la diffusion en France de cet appareil, la DSAC a donc dû établir trois dérogations pour couvrir les spécificités du biplace. La première (DSAC/NO/MQC/20-056) concerne la gestion du maintien de navigabilité et l’entretien du SW-128 (commercialisé sous la désignation Vélis Electro).
Cette dérogation « maintenance » est valide jusqu’au 31 décembre 2022, période prenant en compte l’entrée en vigueur – tel que prévu à cet instant par l’EASA… – du règlement concernant les « exigences de maintien de la navigabilité pour les aéronefs à propulsion électrique », programmé pour le second trimestre 2022.
Cette dérogation « Maintenance » définit les mesures compensatoires (par rapport aux « autres » aéronefs) à respecter par le propriétaire de l’aéronef, les organismes de gestion du maintien de la navigabilité et ceux chargés de la maintenance. Ces organismes doivent notamment obtenir de la part de l’OSAC des « agréments » avec la catégorie Electrique dans la classe Moteur. Les habilitations nécessaires aux titulaires d’une licence Part-66 sont aussi précisées.
Précisons que Pipistrel a déjà organisé plusieurs stages de formation à destination des mécaniciens amenés dans le futur à intervenir sur le biplace à motorisation électrique. Ce stage est d’une durée de 5 jours, organisé à l’usine du constructeur. La maintenance du SW128 doit se faire dans un cadre agréé.
La seconde dérogation (NCO/D71.2/01) traite des règles de mise en oeuvre relatives au règlement UE 2018/1139. Ceci concerne les opérateurs et pilotes exploitant un SW128 selon la Part NCO (Non Commercial Operations). Il faut en effet déroger à certains points liés aux moteurs thermiques, notamment en matière de carburant et lubrifiant.
Ainsi, le commandant de bord ne doit commerncer son vol en VFR que si l’aéronef « transporte suffisamment d’énergie électrique utilisée pour la propulsion » pour :
– de jour, décollage et atterrissage sur le même aérodrome, ce dernier restant toujours en vue, puis voler au moins 10 mn à l’altitude de croisière normale.
– de jour, voler en direction de l’aérodrome d’atterrissage prévu, puis voler pendant au moins 30 mn à l’altitude de croisière normale, ou
– de nuit, voler en direction de l’aérodrome d’atterrissage prévu, puis voler pendant au moins 45 mn à l’altitude de croisière normale.
Sur les deux derniers points, le législateur a pris un peu d’avance sur la réalité car l’autonomie du Vélis Electro approche les 50 mn, ce qui en fait un avion de vol local rapproché, voire de tours de piste car les navigations avec les « réserves réglementaires » ne sont pas réalistes.
Comme pour du carburant, les passagers ne doivent pas embarquer, rester à bord ou débarquer lorsque les batteries utilisées pour la propulsion sont rechargées ou remplacées. Personne n’est autorisé à fumer à bord lorsque les batteries sont rechargées ou remplacées mais en dehors de ce point, le commandant de bord n’autorise personne à fumer à bord lorsqu’il l’estime nécessaire dans l’intérêt de la sécurité !
Côté « gestion carburant », le pilote commandant de bord doit vérifier à intervalles régulier que la quantité restante d’énergie électrique utilisée pour la propulsion n’est pas inférieure à l’énergie électrique nécessaire pour atteindre un aérodrome selon les conditions météorologiques et à l’énergie électrique de réserve prévue.
La troisième dérogation, en attente des modifications de la réglementation européenne pour les aéronefs à propulsion électrique, déroge jusqu’au 31 décembre 2022 aux dispositions du règlement UE 1178/2011 « pour y inclure les conditions pertinentes pour l’exercice des privilèges de pilote sur le Pipistrel Virus SW128 ». Ceci concerne donc la délivrance d’un LAPL(A) ou d’un PPL(A) sur ce type d’appareil, ainsi que la prorogation et le renouvellement de la qualification correspondance, le tout sur des SW128 immatriculés au registre français d’immatriculation et au sein d’organismes ATO ou DTO. Une formation LAPL/PPL à 100% sur un SW128 n’est pas possible, notamment avec l’exitence de la navigation de 150 nautiques à faire en solo…
Ainsi, le SW128 est réputé constituer une nouvelle variante de la classe SEP. Elle sera « glissante » dans le cas du LAPL et d’une validité de 2 ans pour une licence PPL, CPL ou ATPL. Le programme de formation à suivre est décrit dans un document Pipistrel (Virus SW128 Difference Training Programme) avec formation en vol à vue et formation traitant des différences, avec extension des privilèges de la qualification de classe SEP avec un moteur à pistons à la variante SW128. L’inverse est également prévu avec une extension de la qualifications SW128 à une variante Moteur à pistons de la qualification de classe SEP.
Pour la licence LAPL(A), les exigences en expérience récente sont les suivantes : avoir effectué 12 heures de vol de manière combinée sur motorisation à piston ou électrique en incluant 1) au moins 3h00 sur des variantes SEP à moteur à pistons, 2) au moins 3h00 sur la variante SW128, 3), un vol d’entraînement sur une variante SEP à moteur à piston, 4) un vol d’entraînement d’au moins 40 mn sur la variante SW128 avec un FI(A) ou un CRI(A). Si l’expérience n’est pas là, il faut avoir effectué un contrôle de compétence sur une variante SEP à moteur à piston… ET aussi sur la variante SW128.
Si le pilote ne souhaite conserver que les privilèges de la variante SW128, le vol d’entraînement requis aura une durée minimale de 40 mn. Le contenu de ce vol doit comprendre les procédures d’urgence en cas de surchauffe de la batterie, les procédures en cas de dysfonctionnement de cette dernière (état de charge, perte de la capacité de la batterie réduisant l’autonomie, surchauffe et incendie de la batterie, perte de puissance). D’autres points précisent les modalités de prorogation, de renouvellement de la qualification de classe SEP, etc.
Les trois dérogations DSAC à télécharger :
DSACvelisNavigabilité
DSACvelisOps
DSACvelisLicences
Profitons du sujet pour préciser les conditions de location prévues par Green Aerolease qui prévoit un déploiement de Vélis Electro dans les clubs. Le tarif est de 2.500 € HT par mois sur la base de 250 heures de vol par an, avec un dégressif pour les heures de vol supplémentaires (environ 90 € HT par heure de vol). Il s’agit d’un service « tout inclus » avec maintenance programmée, assurance, remplacement des batteries, avion loué avec le chargeur.
La pré-commande se fait avec dépôt de 2 mois de loyer non-remboursable en cas d’annulation de la précommande. Ce montant devient la caution le jour de livraison de l’avion, rendue à la fin du contrat de location. Selon, Green Aerolease, les premiers avions arriveront à partir de juin prochain, la moitié d’entre eux aurait déjà trouvé preneur, soit 25 sur les 50 prévus en France. ♦♦♦
Photos © Pipistrel
NB : d’autres précisions sur l’utilisation pratique d’un Vélis Electro avec l’expérience acquise à Toussus-le-Noble par le FabLab fédéral.