Parmi les écueils liés aux motorisations électriques…
Ces derniers temps, avec l’effondrement de l’aviation commerciale du fait de la chute du trafic et les défis liés au réchauffement climatique, il est fort question de « décarboner » l’aéronautique. Les défis techniques sont loin d’être minimes ! Surtout si la masse de la machine est élevée, son nombre de passagers important. D’où les multiples projets en cours de développement s’appuyant non pas sur des avions de ligne, même simplement biturbopropulseurs, mais plutôt sur des monomoteurs de l’aviation générale.
L’aviation légère sert ainsi de support à des développements par la suite pour l’aviation commeciale, offrant sur étagère des plates-formes d’expérimentation destinées à valider des concepts – de l’Extra 300 remorqueur de planeurs au racer de Rolls-Royce. En pratique, l’aéronef 100% électrique reste dans les faits limité à des machines de faible masse ou nécessitant peu de puissance ou sur une durée réduite – d’où le développement des motorisations électriques sur les planeurs n’ayant besoin de puissance que pour se mettre en l’air ou éviter la vache lors d’un circuit.
Ainsi l’aviation légère a ouvert des « portes », avec même le premier biplace 100% électrique certifié EASA en juin dernier avec le Velis Electro proposé par le constructeur Pipistrel. De là à ce que la « transition » du thermique à l’électrique se fasse rapidement, il y a des marges qui tiennent notamment à l’autonomie des batteries.
Mais certains veulent défricher le domaine, avec notamment l’expérimentation de la FFA à Toussus-le-Noble. D’autres se lancent dans l’affaire comme Avialpes (ATO créé en 2012 à Annecy) qui a passé commande d’un Vélis Electro, prévu pour être réceptionné début 2021, tout en cherchant encore des sponsors dans le cadre de son programme Green Aero. Mais une fois l’appareil acquis (près de 180.000 €), il reste encore quelques écueils à passer.
Il semble ainsi difficile de trouver un assureur souhaitant prendre en compte un tel type d’aéronef ! Il apparait que seule La Réunion Aérienne consent à assurer un tel biplace à motorisation électrique, avec une offre atteignant 15.600 € l’année, se répartissant en 1.200 € de Responsabilité civile et 14.400 € pour l’assurance Corps – ce serait le tarif appliqué à la FFA.
Avec de tels tarifs, sur une base de 150 heures de vol par an, la part sur chaque heure revenant au poste de l’assurance s’élève à près de 100 € De quoi encourager les acheteurs à passer commande d’un biplace aux prix de vente plus élevé qu’un appareil similaire à motorisation thermique, tout en notant que le premier doit se limiter à des vols d’une trentaine de minutes seulement.
La frilosité des assureurs ajoute ainsi un paramètre de plus à la « traînée » du concept électrique, annihilant le gain si l’on ne prend en compte que le poste carburant. Surtout avec un engin certifié, comprenant deux groupes de batteries montés en parallèle mais installés de façon indépendante, l’un à l’avant, l’autre à l’arrière de la cellule. Ceci garantit la redondance de la source d’alimentation. En cas de panne d’une batterie, la batterie défaillante est automatiquement déconnectée du système. Une seule est capable de fonctionner de manière autonome et dispose d’une puissance suffisante pour soutenir la montée et la poursuite du vol.
Dans le cadre du processus de certification, les batteries ont subi une série de tests qui ont permettant d’évaluer l’intégrité des blocs de batteries et leur capacité à résister à l’emballement thermique sans oublier les champs électro-magnétiques. Des dispositifs de sécurité sont intégrés dans la conception, les batteries ayant dû démontré leur résistance aux chocs, à l’emballement thermique et aux pannes. Le système de refroidissement liquide se compose d’un radiateur et de deux pompes électriques installées en série, situées derrière le bloc de batteries arrière. Deux ventilateurs axiaux de forte puissance sont installés derrière le radiateur afin de permettre le refroidissement des batteries pendant la charge. Les ventilateurs sont automatiquement contrôlés et surveillés.
Si le moteur du Velis Electro dispose d’un TBO (Time Before Overhaul, temps avant révision) de 2.000 heures, le TBO des batteries est actuellement de 500 heures, indique le constructeur qui précise qu’il faut parler d’autonomie (durée) et non pas de distance franchissable car l’appareil a été conçu « pour l’utilisation typique des écoles de pilotage », à savoir les vols locaux avec « un compromis entre performance, robustesse environnementale (activité par températures « froides » et « chaudes », charge à chaud et à froid) et durée de vie du système de batterie ». Ainsi, « les vols A à B ne font donc pas partie de la mission typique ». ♦♦♦
Photos © Pipistrel