Telle serait la question pour les aérodromes non contrôlés…
La circulation aérienne autour des aérodromes a bénéficié le 12 juillet 2019 d’un nouvel arrêté « relatif aux procédures générales de circulation aérienne pour l’utilisation des aérodromes par les aéronefs », point alors évoqué sur aeroVFR.com par cet article. La totalité de l’arrêté de juillet 2019, remplaçant celui du 17 juillet 1992, est consultable ici. Il est applicable depuis début septembre 2019.
En passant de 1992 à 2019, les règles générales sont globalement conservées notamment en matière de procédures d’intégration mais quelques divergences peuvent être constatées, notamment sur les dérogations à l’altitude publiée du circuit d’aérodrome. Ainsi, l’arrêté de 1992 stipulait que « dans la mesure où des dispositions différentes ne figurent pas dans les consignes particulières (…) une hauteur différente peut être utilisée pour les besoins de formation au pilotage ». Cette disposition permettait d’évoluer soit sous la hauteur du tour de piste publiée (basse hauteur) soit au-dessus (notamment pour les exercices d’encadrement à la verticale du terrain).
Avec l’arrêté de juillet 2019, si l’on peut toujours réaliser des tours de piste basse hauteur pour les besoins de la formation, la liberté de choisir une altitude supérieure à l’altitude du tour de piste n’existe plus ! Et quand bien même le pilote se serait régulièrement intégré en début de vent arrière à l’altitude du circuit, il ne peut ensuite remonter à 1.500 ou 2.000 pieds dans la vent arrière pour réaliser un encadrement si l’on prend les mots à la lettre, ce que font les juristes.
Les exercices d’encadrement restent néanmoins possibles sur les terrains contrôlés après clairance. Il en serait a priori de même pour les terrains AFIS. En effet, l’arrêté de 2019 permet de rejoindre la fin de vent arrière ou l’étape de base à partir d’un quelconque point situé hors ou au-dessus du tour de piste, sous réserve de respecter certaines règles (AFIS ouvert et pas d’autre aéronef dans la circulation d’aérodrome, ce qui limite déjà la pratique…).
En conséquence, sauf à modifier l’arrêté du 12 juillet 2019, et hors du cas de l’AFIS utilisé dans les conditions ci-dessus, tout exercice d’encadrement réalisé sur un terrain non contrôlé pourrait ainsi engager la responsabilité pénale et civile du commandant de bord, c’est du moins la position que pourraient préciser noir sur blanc des rapports d’enquêtes dans le cadre de procédures d’accident visant à établir les responsabilités de chacun.
Bref, il en va de la légalité de l’exécution d’exercices d’encadrement sur les aérodromes non contrôlés, une pratique très courante, en formation et même en test pratique ! Or l’arrêté de juillet 2019 n’aborde pas le sujet : volonté du législateur dans sa grande sagesse… ou oubli administratif de la prise en compte d’un exercice faisant partie intégrante du cursus de formation d’un pilote ?
Le législateur a pourtant bien pris en compte un autre exercice dérogeant à la règle de l’altitude du tour de piste publiée et à respecter en temps normal. Ainsi, « des circuits à basse hauteur peuvent être effectués pour des besoins de formation avec un instructeur à bord, à une hauteur différente de la hauteur du circuit d’aérodrome sans toutefois être inférieure à 90 m (300 pieds) au-dessus de la surface, après clairance sur un aérodrome contrôlé ou entente préalable entre pilotes sur les autres aérodromes. La trajectoire suivie est alors un circuit court afin de ne pas s’éloigner de la piste. Ils ne peuvent être effectués que sous réserve ne pas gêner les autres aéronefs évoluant dans la circulation d’aérodrome » précise l’arrêté.
Ainsi, des tours de piste basse hauteur sont toujours possibles (sauf interdiction mentionnée sur la carte VAC) sur des terrains non contrôlés selon les conditions mentionnées ci-dessus, mais ce n’est pas le cas des encadrements, manoeuvres non explicitement indiquées dans le texte du nouvel arrêté. Au quotidien, cela pourrait être un frein supplémentaire à la pratique car si le terrain est contrôlé, c’est que généralement le trafic y est important et que « placer » un encadrement » n’est pas toujours simple. Mais si certains jours de la semaine, par exemple, ce terrain devient non contrôlé car le trafic y est bien moindre qu’au pic d’activité du week-end, les encadrements ne sont plus possibles ! Ce point de droit n’a évidemment pas échappé à la BGTA et au BEA…
Autre problème que font apparaitre ces subtilités de lecture attentive de l’arrêté de juillet 2019, les tours de piste basse hauteur ne peuvent être effectués que dans « le cadre de la formation », comprendre un stagiaire accompagné d’un instructeur à bord. Ainsi, un instructeur voulant garder la main et réaliser en solo son propre entraînement personnel ne pourrait plus le faire ! Ou alors en étant obligé d’embarquer un élève-passager ou un autre instructeur pour pouvoir réaliser ses propres tours de piste basse hauteur.
On n’arrête pas le « progrès » ! ♦♦♦
Photo © F. Besse / aeroVFR.com