Certification CS-23 pour le biplace Elixir croisant à 130 Kt à 75% de la puissance avec une autonomie de 6 heures.
PDG d’Elixir Aircraft, Arthur Léopold-Léger annonce ce 30 mars au soir la certification CS-23 (amendement n°5) désormais acquise de la part de l’EASA, en VFR de jour, pour son biplace côte à côte Elixir, motorisé Rotax 912S. La première réunion de certification avec l’équipe de l’Agence européenne a eu lieu le 24 janvier 2017, il y a 3 ans. En « temps normal », cette certification, acquise le 20 mars dernier, aurait dû faire l’actualité du salon Aero à Friedrichshafen car ce n’est pas tous les jours qu’un nouveau monomoteur, conçu depuis la feuille blanche, est certifié. Un virus a chamboulé ce projet…
La certification CS-23 ouvre désormais la porte à la commercialisation du biplace dont plus de 100 pré-commandes (validées par un simple acompte de 2.500 € remboursable sans condition) ont été enregistrées ces dernières années. Pour ce nouveau constructeur français d’avions légers, c’est ainsi l’aboutissement d’un programme industriel commencé il y a plus de cinq ans, avec la présentation officielle d’une simple maquette échelle réduite de l’appareil au salon du Bourget 2015. Il s’agissait alors de proposer un biplace prévu en catégorie européenne LSA (Light Sport Aircraft).
Les trois instigateurs du programme – Arthurt Léopold-Léger, Nicolas Mahuet et Cyril Champenois – utilisent leur expérience, notamment acquise au sein de Dyn’aéro avec sa gamme de biplaces MCR, pour concevoir un biplace non pas livré en kit mais clés en main, tout en prenant en compte les quelques points faibles relevés par les utilisateurs de MCR. La structure est principalement réalisée en fibre de carbone, avec un procédé dit OneShot visant à diminuer le nombre de pièces pour limiter l’assemblage et faciliter l’entretien et la maintenance – ainsi l’aile est réalisée d’une seule pièce.
L’architecture demeure similaire en forme à celle des MCR avec un biplace côte à côte à aile basse et empennages en T. La voilure sera définie avec les conseils de Michel Colomban (concepteur du MC-100 industrialisé par Dyn’aéro sous la désignation MCR), avec une forme en plan trapézoïdale et non pas rectangulaire. L’hypersustentation, avec volets à double fente, est conçue pour offrir une bonne plage de vitesse à l’appareil. Les empennages sont similaires à ceux du MCR avec direction en partie basse de la dérive et profondeur en T de type monobloc.
L’originalité du programme est de sous-traiter différents dossiers, la société Elixir Aircraft devenant un « intégrateur » en charge de la maîtrise d’oeuvre. Le dossier de certification est ainsi suivi par un partenaire allemand, la partie composite réalisée par une société spécialisée dans le domaine nautique, les parties métalliques par un sous-traitant d’Airbus et ATR, etc.
Le prototype est présenté en statique au salon du Bourget, en juin 2017, avec son immatriculation F-HLXR. Il est alors toujours question d’un biplace en catégorie LSA, prévu au prix de 160.000 € HT, offrant 280 kg de charge utile pour 265 kg à vide, visant une vitesse maximale de 153 Kt avec un Rotax 912iS ou 170 Kt avec un 915iS. Les consommations prévues sont de 8/10 l/h en tour de piste, 12 l/h en écolage et 15/16 l/h en croisière rapide.
Le premier vol intervient à La Rochelle fin août 2017. Les fortes chaleurs de l’été 2017 imposent une première amélioration du refroidissement moteur. Après une série de vols, l’appareil entre en chantier durant l’hiver 2017-2018 avec notamment essais de vibrations, essais de structures, améliorations des palonniers, évolutions successives de l’aménagement du cockpit, etc. Le confort de l’équipage n’est pas oublié : sièges ajustables verticalement et longitudinalement, réglage électrique des palonniers en longitudinal, ceintures à enrouleurs, compensateurs électriques (tangage et roulis), supports pour tablettes avec 2 prises USB.
En avril 2018, Elixir Aircraft annonce passer de la certification CS-LSA à la CS-23, une norme mondialement reconnue contrairement à la CS-LSA limitée à l’Europe. La CS-23 permet ainsi de viser de plus larges débouchés commerciaux, avec la possibilité d’obtenir une capacité VFR de nuit voire IFR, d’augmenter les devis de masse. De plus, l’EASA vient alors de proposer une CS-23 « allégée » annoncée pour diminuer les coûts de certification.
En avril 2018, alors que le prototype atteint les 120 heures de vol, les essais statiques de la voilure s’avèrent concluants. Les essais en vol, menés par Didier Ilcinkas (pilote d’essais) et Jean Piatek (ingénieur d’essais), imposent cependant des évolutions de l’appareil. La voilure reçoit ainsi des « fences » (cloisons) pour canaliser l’écoulement aux grands angles et conserver un bon contrôle en roulis lors du décrochage.
La surface latérale arrière du fuselage est accrue par l’arrivée d’une quille pour améliorer la stabilité de route et faciliter aussi la sortie de vrille. Le moteur bénéficie d’une nouvelle entrée d’air, alourdissant un peu la silhouette du biplace, assistée d’un calorstat installé pour réguler le volet de capot du circuit de refroidissement du Rotax.
Présenté à nouveau au salon du Bourget en 2019, l’Elixir dévoile son architecture désormais figée, avec des arêtes de décrochage au bord d’attaque de la voilure pour bénéficier de décrochages « paisibles ». Pour assagir le comportement au décrochage, le braquage des volets a de plus été limité une fois la vitesse minimale visée atteinte (45 Kt).
L’empennage vertical a été modifié au niveau de la jonction dérive/profondeur, secteur déjà connu pour ses décollements aérodynamiques sur les MCR avec vibrations ressenties au niveau du manche. Des Vortex Generators (VG) et des fences à l’intrados de la profondeur apparaissent donc pour réguler les écoulements. Le prototype dévoile la version finale de son tableau de bord en version VFR. Alors que la société s’installe dans de nouveaux locaux à La Rochelle avec 1.500 m2 au sol, le début de production est alors prévu fin 2019/début 2020.
La « production des quatre premiers appareils a débuté récemment » précise Elixir Aircraft. « Les travaux de la future usine d’Elixir Aircraft sur l’aéroport de la Rochelle ont débuté en décembre 2019. La livraison de ces 2.300m² dédiés à la production et à l’assemblage des Elixir était initialement prévue fin mai 2020 ». Il s’agit de passer à la phase suivante du programme : la production et la livraison.
En ayant « agrégé » le dernier cri de différentes technologies dans sa version standard (structure en carbone, moteur à injection, Garmin G3X, VHF 8.33 et transpondeur mode S, roues et freins Beringer, train oléopneumatique, indicateur d’incidence Garmin GI260, parachute de cellule BRS, réservoir anti-explosion), l’Elixir vise le marché des propriétaires privés et celui des aéro-clubs, en proposant également une offre de location.
Parmi les options à venir pour le biplace sont annoncés le Rotax 915iS de 140 ch (turbocompressé) et un pilote automatique Garmin. Dans les cartons, figurent différents développements avec notamment des versions VFR de nuit et IFR, mais aussi une version remorqueur de planeurs – et sans doute un quadriplace dans les cerveaux des instigateurs du programme ! ♦♦♦
Photos © Elixir Aircraft