Des aventures aériennes, en VFR et sans radio, à nous faire dresser les cheveux sur la tête… Des voyages sortis de la bibliothèque de Jean-Philippe Chivot.
Suite de l’épisode 3…
Episode 4 : Tirana-Rome-Marseille
Le départ de Tirana s’avère difficile : l’automne est bien avancé, le mauvais temps est bien présent. Une barre de nuages bas verrouille l’accès à la mer. Le matin du départ, un avion de ligne allemand a renoncé à l’escale de Tirana. Des lambeaux de nuages bas se trainent sur la mer. Pourtant le pilote décolle malgré des prévisions météo peu engageantes sur la traversée de l’Adriatique et sur la côte italienne.
En slalomant entre les nuages il atteint la mer qui lui semble bien agitée et il se met à louvoyer pendant une demi-heure entre des grains sinistres. Les nuages se déchirent près de la côte italienne et l’avion se retrouve poussé par un fort vent du sud-est. Mais passé Foggia, il faut traverser les Appenins, à peine 180 km de montagne dont les sommets sont dans les nuages. L’équipage reste sous la couche et progresse de cuvette en cuvette, en attendant parfois plusieurs minutes qu’un bord se dégage pour en sortir et faisant constamment d’impressionnantes variations de cap.
Louise Marie peine à situer la position exacte sur la carte mais le pilote finit toujours par progresser vers l’ouest. Le vent du sud, le sirocco, se met de la partie et secoue violemment l’avion. Le pilote ruse avec les rafales et même recule un instant par rapport au sol en tentant de négocier un col. Il finit par passer en traversant une averse cinglante et devant lui s’ouvre une vaste plaine menant à la mer. Arrivé à Naples, le baron, fatigué, pense y atterrir mais il craint que le sol inondé ne l’empêche de redécoller. Il décide donc, toujours sous la pluie, de continuer vers Rome (plan de Roma Littorio).
Arrivé sur les faubourgs du sud-est de la ville éternelle, un immense nuage noir pluvieux stagne sur le centre. Renoncant à le traverser pour atteindre le terrain de Roma Littorio, aujourd’hui Roma Urbe toujours dans son jus mussolinien, il va se poser sur le terrain le plus proche, le terrain militaire interdit de Centocelle. Il y pleut si fort que les militaires renoncent à aller voir l’avion et restent sous le hangar ! Ci-dessous, la base de Centocelle en 1937, aujourd’hui grand parc archéologique très proche au sud-est du centre ville de Rome.
L’étape Rome-Marseille fut tout aussi difficile mais l’absence de montagnes fit prendre quelques risques au pilote. Le temps de la mi-décembre était toujours exécrable. L’avion resta au large des côtes trois heures durant, suspendu entre un ciel de déluge et une mer démontée. Il sortit une fois d’un stratus en virage au ras de l’eau. Une autre fois, le moteur en toussant exprima sa mauvaise humeur. D’averse en averse, l’équipage gagna la Côte d’Azur où le soleil fit une timide apparition. Le Vega Gull se posa joyeusement à Marignane avant la Noêl.
Puis, en trois jours, l’équipage atteignit le Bourget où le Vega Gull allait se refaire une beauté avant le tour d’Afrique déjà prévu à la mi-janvier 1938 ! ♦♦♦ Jean-Philippe Chivot
Prochaine saison : le tour d’Afrique en… hiver.