Les cinq finalistes de l’édition 2019.
Chaque année, la commission Patrimoine de l’Aéro-Club de France propose son Grand Prix, ayant pour « vocation de favoriser la sauvegarde du patrimoine aéronautique international et de le faire connaître au plus vaste public, en gratifiant une action particulièrement exemplaire de préservation ou de restauration dans ce domaine ». Un jury, composé de personnalités du monde de l’aéronautique et de la culture, choisit dans un premier temps cinq finalistes parmi les dossiers reçus.
Chaque dossier doit retracer la vie de l’objet patrimonial (aéronef, bâtiment, objet d’art…)
et comporter notamment la finalité de la restauration, une présentation historique de l’appareil, la chronologie de sa restauration, etc. La restauration doit avoir été terminée dans les 24 mois précédant la date limite de dépôt du dossier. Les coupes remises aux lauréats sont « destinées à récompenser le travail d’individus ou d’associations à but non lucratif ». Pour l’édition 2019, voici les finalistes, les résultats (trois coupes Gifas, AIRitage et Saint-Exupéry, deux diplomes de finalistes) devant être déclarés le 4 novembre prochain :
SNCASE Aquilon
Créée en novembre 1990 et basée à Rochefort, l’Association nationale du musée de l’aéronautique navale (ANAMAN) a pour but « d’entretenir, de restaurer et de développer les collections d’aéronefs, de moteurs et d’équipements, mises à sa disposition par la Marine nationale et le musée de l’Air et de l’Espace ». Déjà finaliste en 2018, elle récidive cette année avec son SNCASE Aquilon n°53.
Photos © ANAMAN
L’Aquilon est la version française du De Havilland Sea Venom, lui-même dérivé du De Havilland Vampire construit en France sous le nom de Mistral. Version navalisée du chasseur bipoutre, l’Aquilon a été produit sous licence de 1952 à 1955 par la Société nationale des constructions aéronautiques du Sud-Est (SNCASE) à Marignane. QUatre versions, mono et biplaces, furent développées pour l’Aéronavale. Après un premier vol en 1952, c’est en mai 1955 que la flottille 11F en sera équipée, puis la 16F.
Ce fut le premier jet embarqué opérationnel pour l’Aéronavale, remplaçant les Hellcat et utilisé aux côtés des Corsair. Retiré des porte-avions en 1963, le type sera encore utilisé pour l’entrainement jusqu’en 1966 à partir de bases terrestres. Le n°53 est l’un des 101 Aquilon produits par la France. C’est un monoplace de la dernière version, ayant volé à partir d’avril 1956. Réformé dix ans plus tard puis exposé à Lann-Bihoué, il est récupéré en 1977 par les Ailes Anciennes du Bourget. Sa restauration débute avant de rejondre, en 1991, le musée de l’Aéronautique navale à Rochefort. Le chantier va reprendre en 2011 pour s’achever en 2018 après 10.000 heures de travail.
Mauboussin 125 Corsaire
Le Mauboussin 125 Corsaire n°177 est l’un des biplaces de sport, à cockpit en tandem, construit par le constructeur français Mauboussin, dans les années 1930. Le prototype du M120 décolle pour la première fois en décembre 1937 avec un Salmson 9AD, un 9-cylindres en étoile de 45 ch. Il donnera naissance à de nombreuses versions dénommées M121, M123, M125, M127, M129… selon la motorisation utilisée. Le M125 n°177 a été construit en 1938. Lors de sa restauration, des cocardes françaises et les bandes du Débarquement ont été retrouvées sous la peinture, laissant penser qu’il a participé à des opérations de liaison à la Libération.
Photos © Jean-Pierre Touzeau
Né avec un Minié de 75 ch, c’est l’un des cinq M125 à récevoir en 1953 un Régnier de 75 ch, plus fiable. Utilisé par plusieurs aéro-clubs dont celui de Romilly-sur-Seine, il sera récupéré en 2006 par l’association Mauboussin Aero Collection, basée à Troyes et animée par Robert Collin. C’est le 1er août 2018 qu’il a repris l’air. Passé sur le registre des CNRA, l’élégant biplace est désormais immatriculé F-PCES.
Bölkow Phoebus
Le Bölkow Phoebus est l’un des premiers planeurs en « plastique ». Conçu et produit dans les années 1960 par le constructeur allemand Bölkow, sa construction fait appel à la fibre de verre et à la résine, une technologie nouvelle à l’époque où la majorité des planeurs étaient en bois et toile. Le Phoebus sera la seule production vélivole de l’ingénieur Ludwig Bölkow, sa société fusionnant en 1969 pour devenir MBB (Messerschmitt-Bölkow-Blohm) et produire des avions légers (Bo-208 Junior) mais surtout des hélicoptères (Bo-105 puis BK-177) et des missiles (Milan, Hot).
Photos © Abel Lenoir
Prévu pour la classe Standard, le monoplace Phoebus affiche 15 m d’envergure pour 37 de finesse maximale à 90 km/h. Sa version Phoebus A, sortie en 1964, est à train fixe. En 1967, le Phoebus B bénéficie d’un train rentrant, dispositif désormais autorisé par la FAI pour la classe Standard. Il y aura encore le Phoebus C de classe libre, sorti en 1967 avec 17 m d’envergure. Le dossier de ce planeur est présenté par Abel Lenoir qui a mené ce projet de l’âge de 15 à 19 ans.
Il s’agit du Phoebus C n°923, immatriculé F-CDOK, construit en 1969 et accidenté en 1985. Le chantier de réparation a débuté en 1991 avec dossier technique pour de multiples stratifications mais aussi de la mécanique, du bois et des dossiers administratifs. Le vol d’essai a eu lieu en mai 2018.
De Havilland Chipmunk
Avion d’entraînement, le De Havilland Canada DHC-1 Chipmunk a effectué son premier vol en mai 1946 et il sera produit jusqu’en 1961, prenant la suite du Tiger Moth. Conçu au Canada par l’ingénieur polonais Wsiewolod Jakimiuk, le biplace en tandem sera utilisé par plusieurs forces aériennes, au Canada, en Grande-Bretagne mais aussi au Portugal où il sera produit sous licence. L’appareil est motorisé par Gipsy Major, un 4-cylindres en ligne de 145 ch.
Photo © Nigel Stevens
L’appareil présenté par Nigel Stevens, récupéré à l’état d’épave, a été utilisé par la force aérienne égyptienne, l’un des 56 biplaces commandés en 1950. Le serial 1655, construit en Grande-Bretagne en 1953, sera ainsi utilisé par l’Egypte à partir de 1954. Etalée sur 19 ans, sa restauration aux couleurs égyptiennes a demandé plus de 5.000 heures de travail avant de pouvoir porter l’immatriculation F-AZNS. L’appareil a repris l’air début 2018. Durant ce chantier, Nigel Stevens en a profité pour rédigé trois ouvrages détaillant de A jusqu’à Z un projet de restauration d’un aéronef de collection…
SCAN N1203 Norécrin
Ce Norécrin a été restauré au sein des Ailes Anciennes de Savoie (AAS). Il s’agit d’un 1203 type III de 1957, le n°359, soit l’un des derniers construits par la Société nationale des constructions aéronautiques du Nord (SNCAN) à Sartrouville, sur les 378 Norécrin de différents types produits.
Photos © F. Besse / aeroVFR.com
Acquis en 1984, l’appareil a repris le vol en octobre 2018, dix ans après le début du projet et 38 ans après son dernier vol. Le chantier a été estimé à 8.000 heures de travail, à la fois pour remettre au standard la cellule métallique et le moteur Snecma-Régnier 4L00 de 147 ch. Devenu F-AYVV, ce Norécrin figure désormais sur le registre des avions de collection. L’histoire du Norécrin et la restauration du n°359 fait l’objet d’un reportage de 34 pages dans le Mook n°2 d’aeroVFR.
Le Norécrin sera le dernier avion léger destiné au marché civil produit par la SNCAN. Celle-ci s’orientera ensuite vers les avions de transport militaire (du Nord 2501 Noratlas au C-160 Transall) ou civils (Nord 260 et 262), les avions d’entraînement (N3202) et de liaison (N3400) sans oublier des prototypes à réaction restés sans suite (Gerfaut, Griffon). Le Norécrin est emblématique du renouveau de l’aviation légère en France, après la Libération. L’avion est moderne pour l’époque avec sa cabine fermée, son train rentrant, voire sa VHF. Issu d’un prototype biplace ayant remporté le concours des biplaces organisé par l’Etat à Marignane en 1946, ce quadriplace était l’avion de voyage par excellence au sein des clubs dans les années 1950. ♦♦♦
Photo d’ouverture © F. Besse / aeroVFR.com