L’histoire du groupe de chasse GC III/3 en 1939-1940.
Avec le numéro 13 de la collection « Histoire des unités » aux éditions Lela Presse, Bernard Philippe et Bertrand Hugot entraînent le lecteur à la poursuite du groupe de chasse GC III/3 formé au printemps 1939, ce troisième groupe de la troisième escadre étant alors basé à Dijon-Longvic. Les avions d’entraînement sont des Dewoitine D-500/501 obsolètes avec leur cockpit ouvert et leur patin arrière, qui plus est des machines usées, aux moteurs habitués aux pannes.
En juillet 1939, l’unité est équipée en Morane-Saulnier MS-406. Les emblèmes Condor pour l’escadrille 5 et Pirate pour la 6 sont retenus mais ils ne seront pas peints sur les chasseurs faute d’une officialisation. L’activité opérationnelle commence mal car avant même la déclaration de la guerre en septembre 1939, l’unité doit rejoindre Salon-de-Provence en vue de possibles attaques italiennes dans le sud du pays. Mais lors du convoyage Dijon-Salon, le 28 août 1939, une patrouille de sept avions rencontre des difficultés.
Le leader, suite à un problème de pression d’huile de son Hispano-Suiza, fait demi-tour et passe le commandement à son second. Ce dernier poursuit le vol malgré une préparation sans doute insuffisante. Le dispositif rencontre de la brume épaisse en Saône-et-Loire. Au lieu de monter, contourner ou faire demi-tour, le leader entraîne la patrouille sous la couche… Au final, sept appareils perdus, trois pilotes tués et quatre blessés après avoir accroché les arbres, ce qui ne participe pas à la confiance que l’état-major peut placer dans cette jeune unité.
La guerre déclarée, le GC III/3 remonte dans le nord, se trouvant basé à Ochey près de Nancy, pour protéger la Zone d’opérations aériennes Est. C’est là que fin septembre sera enregistrée la première victoire sur un Messerschmitt 109E, malgré une querelle interne au groupe sur l’attribution de ce score… Une autre « victoire » est moins réussie quand en octobre 1939, par méprise, un Mureaux 115 est attaqué, pilote blessé et avion sérieusement endommagé… Quelques jours plus tard, surpris par la nuit au retour de l’escorte d’un Potez 63, deux MS-406 se posent en campagne, l’un sur le ventre, l’autre passe sur le dos.
Au fil des pages, on suit l’activité de l’unité au jour le jour durant la Drôle de guerre de l’hiver 1939-1940, jusqu’à son repli à Beauvais en avril 1940, un mois avant le déclenchement de l’offensive allemande. Ce sera alors la Bataille de France, avec une unité qui se déplace, de Maubeuge à Pontoise en repassant par Beauvais. Une partie de l’unité reçoit des Dewoitine D-520 mais cette transformation progressive de l’unité intervient trop tardivement. Les missions s’accumulent cependant, comme les victoires, jusqu’aux derniers combats en juin, suivi du repli sur Perpignan pour préparer le départ vers l’Afrique du Nord.
On note souvent les conditions difficiles rencontrées par les pilotes : sans carte parfois à bord, avec des radios bien souvent défaillantes, un train d’atterrissage qui ne veut pas toujours rentrer, des pannes d’inhalateurs… Quand les radios marchent, les différentes unités ne sont pas sur les mêmes fréquences faute de consignes. Quand les MS-406 doivent accompagner un Mureaux 115/117, avion de reconnaissance totalement dépassé, ils doivent zig-zaguer sans cesse pour ne pas les dépasser mais quand il s’agit d’accompagner des bombardiers Breguet 693, ces derniers les laissent sur place faute de performances suffisantes pour les protéger…
Cette unité est peu connue, rarement citée car ses missions ont surtout consisté à escorter des avions de reconnaissance et elle a de plus connu une vie mouvementée – du premier convoyage dramatique à la perte de plusieurs de ses commandants en service aérien – malgré 39 victoires revendiquées dont 31 confirmées sûres. Alors que l’on s’achemine l’an prochain vers les 80 ans de la Bataille de France, il était bienvenu de retracer son historique malgré le peu d’archives disponibles.
Les deux auteurs se sont appuyés sur les cahiers d’ordre, les journaux de marche des escadrilles, les carnets de vol des pilotes et les archives privées des familles que l’on sait n’être pas toujours pérennes au gré des successions. Avec un contenu dense, abondamment illustré de plus de 300 photos d’époque tirées en grande partie de collections privées, de plans ou de cartes, d’extraits de carnets de vol et de 27 profils en couleurs et complété d’annexes (biographies de pilotes, détails des sorties et des victoires, liste des avions utilisés, etc.), cet ouvrage s’avère un bel hommage aux combattants aériens de 1940. C’était il y a seulement 80 ans… ♦♦♦
Photos © Lela Presse. Profil © Yann Le Gal
– Le GC III/3 en 1939-1940. Condors et Pirates au combat, par B. Philippe et B. Hugot. Histoire des unités n°13. 208 p. 38,00 € https://www.avions-bateaux.com
Ndlr : dans la même collection, à lire également « Furies et Crocodiles : Morane au combat dans la Bataille de France, le GC III/7 ».