Suite du dossier avec les dernières inventions des idéologues de Cologne.
La possibilité ou non de prochainement comptabiliser les heures de vol effectuées sur des appareils dits d’Annexe 2 a déjà fait l’objet de plusieurs articles sur site, depuis février 2018 et encore en juillet de l’an passé. On s’en souvient, soudainement, des juristes de l’Agence européenne de l’Aviation civile (EASA) avaient découvert que certains avions utilisés pour proroger des qualifications de classe SEP n’avaient pas été certifiés par l’Agence ! Et donc, les heures effectuées à leurs commandes ne pouvaient être prises en compte pour la formation initiale, la délivrance d’une licence et même la prorogation d’une SEP. Faut-il leur rappeler que des Airbus certifiés en Europe volent tous les jours, en ayant été certifiés avant la naissance de l’EASA ?
L’affaire avait alors fait grand bruit avec cette limitation prévue pour les aéronefs d’Annexe 2 comprenant les CNRA, CDNS, CDNR et CNRAC. Si l’on prend les appareils de construction amateur (CNRA, pour Certificat de navigabilité restreint d’aéronef en France), ce sont plusieurs centaines d’appareils qui ainsi étaient touchés par cette mesure, notamment pour un usage dans certains aéro-clubs français. La FFA et la DGAC avaient alors fait remonter l’information vers Cologne, la première insistant sur un « casus belli » en la matière. D’autres représentants d’usagers, en Europe, avait fait de même.
Depuis, la communication n’a pas brillé sur le sujet, de tous les bords. Il semblerait que le dossier ait cependant évolué ces derniers mois et l’on s’orienterait (conditionnel…) – comme l’IAOPA-Europe l’avait déjà précisé – vers l’acceptation des Annexes 2 pour la formation initiale, la prorogation d’une qualification de classe SEP et même pour la délivrance d’une licence si l’appareil répond aux exigences imposées par l’examen pratique du LAPL/PPL.
L’EASA sait très bien imposer des contraintes aux usagers mais quand elle se trouve devant un « mur » qu’elle s’est elle-même créé, elle sait aussi déroger à ses propres contraintes (Faites ce que je dis, pas ce que je fais, quand un problème réglementaire me dérange, je le supprime !) et donc pour évacuer le problème des Annexes 2, la solution a été de les faire disparaître… Mais bien sûr ! Il fallait y penser. Ainsi, en septembre dernier, les Annexes 2 seraient devenus des Annexes 1. Astucieux, non ?
Mais les idéologues de Cologne n’auraient – hélas… – pas encore dit leur dernier mot. Dans les ex-Annexes 2 figurent en effet les aéronefs de collection, immatriculés en France avec un certificat de navigabilité restreint d’aéronef de collection ou CNRAC. Et là, il n’est pas encore certain que les heures de vol enregistrées aux commandes d’un CNRAC puissent être comptabilisées pour proroger une SEP… Qu’il n’y ait pas de formation initiale, voire de test pour la délivrance d’une licence, on peut le comprendre car ce sont des appareils généralement pas aux normes actuelles (équipements, instrumentation, etc.) et certains sont d’ailleurs des monoplaces.
Mais ne pas prendre en compte les heures de vol pour la prorogation SEP – si c’est bien le cas à ce stade de la « réflexion » à Cologne… – cela marche encore sur la tête dans les bureaux de l’Agence. Ainsi, un pilote volant sur Stampe, Chipmunk, Bücker Jungmann, T-6 ou Mustang ne pourrait pas prendre en compte ces heures pour les 11 (+1 avec FI) nécessaires à la prorogation d’une qualification de classe SEP. Un pilote volant sur Stampe immatriculé en F-AZ serait dans ce cas mais pas forcément le pilote volant sur un Stampe encore sous F-B en CDNR/CDNS ? Un pilote comptabilisant 20 heures de Mustang, notamment dans un environnement exigeant tel que c’est le cas en meeting, ne pourrait bénéficier de ces heures de vol !
La décision finale pour prendre en compte ou non les heures de vol effectuées sur les ex-appareils dits d’Annexe 2 devrait être prise à Cologne courant du mois de février prochain.
Il serait peut être bon que toutes les institutions aéronautiques concernées, de près ou de loin, par le maintien en état de vol d’aéronefs de collection montent réellement « au créneau » dans ce dossier… Avez-vous lu autre part que sur aeroVFR.com des informations sur le sujet récemment ? Le silence sert l’EASA car tout n’est qu’une question de rapport de forces
de nos jours…
Ne pas prendre en compte les heures faites sur un CNRAC, c’est quelque part favoriser le départ d’appareils anciens vers d’autres pays (le Royaume Uni notamment où le respect du patrimoine aéronautique a toujours été bien plus élevé qu’en France, hypothèse encore plus plausible si la Grande-Bretagne est libérée de cette contrainte via le Brexit et la sortie du périmètre de l’EASA…). C’est aussi à court terme diminuer le nombre de meetings dans les années à venir, si les heures de vol sur CNRAC, souvent coûteuses – maintenance et consommation de carburant obligent – ne peuvent plus être prises en compte.
C’est encore envoyer un message incohérent aux pilotes de ces appareils, en leur signifiant dans les faits que leurs heures d’entraînement sur leurs aéronefs de collection n’ont aucune valeur, un comble pour une Agence qui se dit préoccupée par la sécurité aérienne de l’aviation civile, à tous les niveaux, dans toutes ses facettes et notamment pour l’aviation générale… ♦♦♦
Photo © F. Besse / aeroVFR.com