L’EASA a édité son plan européen pour la sécurité de l’aviation sur la période 2018-2022.
L’EASA a diffusé ce jour son European Plan for Aviation Safety (EPAS). Ce dernier fait partie intégrante du European Aviation Safety Programme (EASP). Il vise à fournir « un cadre cohérent et transparent pour le travail sur la sécurité au niveau régional, en aidant à identifier les principaux risques et à déterminer les actions à prendre ». Il est là pour « aider à partager les bonnes pratiques et les connaissances » à tous les niveaux, de l’aviation commerciale à l’aviation de loisirs sans oublier les drones.
Ainsi, en 126 pages en anglais, l’EASA précise les actions que l’Agence compte entreprendre dans ce domaine sur les cinq années à venir à la fois pour améliorer la sécurité mais aussi l’impact environnemental du secteur aéronautique. Ce plan sera réactualisé chaque année. Des stratégies prioritaires ont été listées. Elles portent sur différentes facettes :
– Sécurité systémique : il s’agit d’améliorer la gestion de la sécurité au niveau des Autorités et des organisations aéronautiques pour « anticiper plus et mieux de nouvelles menaces et les défis associés », en développant des principes de gestion des risques à la manière des systèmes de gestion de la sécurité (SGS). Le programme Data4Safety (D4S) vise à enregistrer et à analyser des données pour améliorer le système avec rapports d’événements, enregistrement des paramètres de vol, données sur le contrôle aérien et la météo, etc.
Il s’agit de mieux connaître les risques, leur nature afin de vérifier si les actions correctrices le sont au bon niveau. Il s’agit aussi de traquer les vulnérabilités dans le « système ». Une première phase a été lancée en 2017, avec un « prototype » d’évaluation à mettre au point avec quelques partenaires et dans un domaine technique précis avant de diffuser le programme dans sa version opérationnelle en 2020.
Facteurs humains et compétences : avec les nouvelles technologies sur le marché, destinées à améliorer la sécurité, la complexité du système augmente toujours et il est donc important d’avoir les bonnes compétences et les méthodes de formation adaptées pour gérer ces nouveaux défis. Cette facette concernant le « personnel » aéronautique vise à introduire la formation par les compétences (Competency-Based Training ou CBT) à tous les niveaux de l’aviation – un concept qui va débarquer dans l’aviation générale et notamment de loisirs ces prochaines années. Il s’agit d’aller au-delà des compétences techniques (savoir, savoir-faire) et de mieux intégrer les compétences non-techniques (savoir-être).
– Sécurité opérationnelle : en ne retenant ici que les points concernant l’aviation générale, l’EASA note que ces « dernières années, les accidents liés à des avions de loisirs ont entraîné en moyenne 80 décès annuels pour l’Europe (hors accidents mortels concernant les ULM), ce qui en fait l’un des segments de l’aviation connaissant le plus mauvais résultat annuel ». En 2016, 78 décès ont concerné des avions en opérations non-commerciales (résultat le plus élevé) et 20 l’activité vélivole (planeur/motoplaneur), soit les deux activités les plus concernées.
L’EASA précise qu’il est difficle de « mesurer avec précision l’évolution de l’accidentologie en aviation générale suite à une manque de données validées, comme les heures de vol cumulées ». Un atelier sur la sécurité de l’aviation générale a été décidé en 2016 pour « partager les connaissances et décider en commun des actions à mener ». Il s’agira de « déterminer les risques, en prenant en compte les spécificités de l’aviation de loisirs ». Sont cités : prévenir les collisions en vol, gérer la météo, garder le contrôle, gérer le vol.
Au passage, l’EASA annonce une période de « retour au calme » (Cool-down period). Elle précise que depuis le début du nouveau cadre réglementaire européen entamé en… 2002, le « volume de réglementation créé a été nécessairement important ». Désormais, une période plus calme est envisagée pour « stabiliser les système réglementaire et réduire la charge supportée par les Etats membres et l’industrie » ! Ceci ne veut pas dire que le processus est terminé… car certains à l’EASA parlent encore d’au moins dix ans pour que l’édifice soit achevé, soit une nouvelle réglementation qui aura mis plus de vingt-cinq ans entre les projets et l’application définitive !
Le document liste ensuite toutes les actions prévues avec leur dénomination, leurs objectifs, le champ d’application, les dates d’application visées. Cela concerne l’aviation commerciale, l’aviation générale, la maintenance, les aérodromes, les constructeurs, le contrôle aérien, etc. On note au passage le projet d’enregistreurs de paramètres de vol pour les avions légers pour lesquels cette exigence n’existe pas actuellement. Un projet de texte réglementaire (Opinion) est prévu pour 2019 avec application envisagée (Decision) à partir de fin 2020.
Un groupe de travail ménera une étude pour mesurer le bilan avantages/inconvénients de systèmes anti-collision pour les avions de moins de 5,7 tonnes ou moins de 19 places. Parmi les actions à mener en continu pour l’aviation générale, figure l’amélioration de la diffusion de documents faisant la promotion de la sécurité par les Autorités, associations, clubs, assureurs en visant les pilotes et instructeurs via des ateliers de sécurité et des journées ou soirées orientées sécurité des vols. Parmi les axes à développer, figurent des documents visant à rendre « plus efficace » et à « maximiser les gains en sécurité lors des vols de contrôles tous les deux par les instructeurs, notamment les différences entre types d’appareils ».
Toujours pour l’aviation générale, l’EASA veut en 2018 promouvoir la technologie visant à améliorer la sécurité en encourageant l’installation et l’usage de technologies modernes concernant la météo, les applications informatiques, les cartes digitales, les indicateurs d’incidence, la protection du domaine de vol, les systèmes anti-collision – d’où le premier sujet traité par Sunny Swift… L’EASA vise encore à développer le concept de « culture juste » en aviation générale, pour favoriser le retour d’événements sans pénaliser les pilotes et en valorisant les comportements positifs en matière de sécurité.
En 2018, une campagne sur les « garder le contrôle » (terminologie plus positive que de parler de « pertes de contrôle) est prévue, évoquant les performances de l’aéronef, la préparation et la gestion du vol, l’importance de l’angle d’incidence, le concept TEM pour Threat and Error Management (gestion des erreurs et des menaces), la prévention du décrochage, les positions inusuelles et la gestion de crise (éviter la surprise et la sidération après une panne). En 2018 encore, l’un des messages vers les pilotes portera sur la gestion carburant.
Toujours pour 2018 et l’aviation générale, une vidéo devrait voir le jour pour attirer l’attention des pilotes sur la « conscience de la situation météorologique » : préparation et gestion du vol avec débriefing, utilisation des services d’information en vol, intérêt des nouvelles technologies type GPS et applications mobiles (4G), communication avec le contrôle aérien, entrée par inadvertance en IMC, le TEM et les facteurs humains (FH).
Pour 2019, une campagne est programmée pour faire la promotion auprès des pilotes de l’aviation générale du « vol aux instruments ». L’Europe vise également à réduire les risques de collision en vol avec une meilleure conscience de la complexité de l’espace aérien et l’utilisation de la technologie ADS-B – qui ne semble pas avoir les faveurs de l’Autorité française… L’EASA demande aussi que la qualité des aides apportées aux vols de l’aviation générale par les fournisseurs de données concernant la navigation soit améliorée… Tout est dit, non ? ♦♦♦
Le lien vers le document de l’EASA intitulé European Plan for Aviation Safety (EPAS)