Troisième épisode sur la publicité des constructeurs d’avions légers…
Pour retrouver le second épisode de cette saga publicitaire…
En 1936, alors que les premiers bruits de botte résonnent en Europe, on passe au « 4 places » vraiment moderne, d’abord en Angleterre car l’industrie aéronautique militaire n’y produit que des prototypes pour un pays qui pense éviter tout conflit.
Ainsi le Percival Vega Gull fut l’avion de tous les records et en France, il écrasa la concurrence Caudron. Le Baron de Foucaucourt alla du champ d’atterrissage de son château près de Beauvais jusqu’en Norvège puis en Lituanie. Descendant ensuite par la Yougoslavie, il rejoignit Alger, traversa le Sahara, suivit le côte de l’Afrique de l’Est, alla à Madagascar puis au Cap et remonta jusqu’au Cameroun où il loupa un décollage à cause d’une termitière mal placée. Avec un avion identique, le président de l’aéro-club de Lorraine alla de Nancy à Saigon, etc.
Le Vega Gull fut aussi la monture préférée de la mondialement célèbre aviatrice néo-zélandaise Jean Batten, fille (de pub) du ciel devenue, les années passant, la Garbo des Cieux. Puis la pub française s’y mit… timidement car Louis Renault voulut en profiter pour vendre ses voitures. Et quand il ne vendait que des avions, sa publicité n’y allait pas avec le dos de la cuillère… Le Simoun, le meilleur du monde : 4 places, 25 litres aux 100 km et croisière à 290 km/h – en réalité un petit 250 km/h…
Mais en Angleterre, la publicité Renault fut moins « pub », donc plus directe…
Très curieusement, les Allemands, construisant en secret des avions de guerre, firent en 1938 de la publicité en Angleterre (Arado) pour des avions de paix, donc privés, techniquement équivalents sinon meilleurs à ceux de leurs concurrents…
Le Messerschmitt 108 Typhoon, fabriqué en France après guerre sous le nom de Nord 1000, était un sacré avion de grand tourisme que la belle et célèbre aviatrice allemande Elly Beinhorn pilota ces années-là aux quatre coins du monde.
En Amérique, ce fut le délire. Loin de la guerre et face à une crise qui s’éloignait, les constructeurs s’en donnèrent à coeur joie dans les « super planes » qu’ils essayèrent, en vain d’ailleurs, de vendre en Europe. Voici le catalogue des « super planes » de 1937…
Et voici le détail pour les deux avions privés les plus recherchés de nos jours… Le Beech Staggerwing, l’avion des magnats du pétrole pour aller voir leurs terrains de jeux, et le Spartan Executive, le summum du luxe de l’avion privé monomoteur à piston.
Ces avions figurèrent sur les premières publicités pour des avions d’affaires permettant d’économiser… du temps, car « le temps, c’est de l’argent » pour les gens qui en ont ! Avec ses 450 ch, un Staggerwing peut croiser à 300 km/h avec 4 à 5 personnes à bord.
La publicité de Beech fit aussi appel aux femmes pilotes pour trois raisons :
– si le Staggerwing est piloté par des femmes, c’est qu’il est facile à piloter ! Ce qui est, en fait, assez loin de la vérité car le Staggerwing a une forte tendance à rebondir avec enthousiasme à l’atterrissage…
– si le Staggerwing est piloté par de nombreuses femmes, c’est qu’il est fiable et sûr, car les femmes sont réputées moins casse-cou que les hommes !
– enfin, photographier des femmes pilotes est plus attractif que photographier des hommes !
Le Spartan Executive, toujours avec un Pratt de 450 ch, croise un soupçon plus vite que le Beech 17 Staggerwing mais il est entièrement métallique et son pilotage ressemble à celui d’un mini North American T6.
Bien loin de ces préoccupations, la France de 1937 tentait de rattraper son retard en aviation militaire et ne laissait à ses constructeurs que la possibilité de construire des avions légers pour l’aviation populaire, aviation destinée à constituer un vivier de pilotes militaires.
Les avions dédiés à cette aviation se comptent sur les doigts d’une main. On avait prévu qu’il en fallait au moins 600 pour les 130 sections d’aviation populaire. Et fin 1937, le résultat fut un total de 190 avions dont 20 Léopoldoff et 50 Salmson Cricri. Les Caudron Luciole, Potez 60, Peyret Taupin et Farman Moustique ne furent que très peu utilisés. Subsistent en état de vol à la Ferté-Alais un Taupin à moteur de Traction avant Citroën, un Salmson Cricri et un Leopoldoff. La publicité pour ces avions fut alors bien triste…
…tandis que nos amis britanniques conservaient, face aux mêmes problèmes, un soupçon de rêve…
Bref la guerre éclata et les avions privés furent en Europe cloués au sol, se détériorant lentement en attendant des jours meilleurs dans des hangars pleins de toiles d’araignées. Toutefois, pendant la « drôle de guerre », de janvier à mai 1940, nos amis belges eurent le droit de voler dans un rayon de 10 km autour de cinq aérodromes judicieusement choisis…
Mais, pour conclure cette période, il faut constater que de 1940 à fin 1941, les Américains continuèrent à construire et à vendre des avions de loisirs comme le montrent ces publicités de 1940. Un Aeronca facile à piloter et le tout nouveau Piper Cub J4, biplace côte-à-côte de mars 1940 dont la production fut stoppée net après Pearl Harbour. Ce Piper J4 n’était certes pas un foudre… de guerre, car, sous-motorisé avec un fuselage bien large, il se trainait à un 110 km/h en croisière avec son Continental de 65 ch.
Le prochain épisode verra la folle renaissance de l’aviation privée dans l’immédiat après guerre, de 1944 à 1955… ♦♦♦