Deux ou trois points sur les motorisations électriques…
Comme la plupart des pilotes des années 1960/70, j’ai commencé par l’aéromodélisme. En ces temps-là, tout avion radiocommandé rapide utilisait un moteur thermique d’au moins 5 cm3. Il faisait du bruit et était difficile à démarrer… Cependant commençaient à apparaitre de petits moteurs électriques servant à emmener les planeurs radiocommandés attraper l’ascendance. L’hélice se repliait sur le fuselage mais les batteries étaient lourdes et le moteur peu puissant.
Aujourd’hui, tous les avions modèles réduits sont électriques. Les avions de voltige sillonnent le ciel à toute vitesse pendant 10 minutes. Ils se posent. Le pilote change le pack de batteries et cela redécolle. Plus de nuisances d’autant que les moteurs thermiques sont la plupart du temps bannis près des habitations.
Cette révolution s’est faite en 15 ans. Elle a été rendue possible par, d’une part l’apparition des moteurs électriques sans collecteurs dits « brushless » et, d’autre part par l’arrivée des batteries lithium polymères (LiPo). Dans les débuts, ces dernières avaient tendance à exploser si par mégarde on tentait de les recharger après avoir dépassé le seuil minimal de décharge.
Notre aviation de loisirs va t elle subir la même évolution ? Voila la question à laquelle quelques données et une dose de bon sens vous nous permettre de répondre. Petit rappel : le moteur électrique a été utilisé bien avant le moteur à explosion. Dès 1881, Siemens faisait rouler un tramway où le moteur électrique remplaçait le cheval. La batterie au plomb fut inventée en 1860 et la combinaison batterie au plomb, moteur électrique et chassis de voiturette à cheval permit à Jenatzy d’atteindre un court instant les 100 km/h en 1899 avec la « Jamais Contente ».
Vers 1900, on trouvait dans les rues de Paris des fiacres electriques… Dès lors, parallèlement aux voitures à pétrole, les véhicules automobiles électriques prolifèrent de telle façon qu’au début des années 1920, ils représentaient plus du tiers de tout ce qui avançait de façon autonome sur la planète. On les rencontraient essentiellement en ville : bennes à ordure, arroseuses municipales ou voitures balais, et dans les mines car le moteur électrique est propre (sans fumée), fiable et peu bruyant.
Dès 1911, Paris s’équipa de bennes électriques et les utilisa jusqu’en 1970. Mais il paraît que ça revient… (Courbevoie et Martigues). En effet en 100 ans, même s’ils sont minimes par rapport à ceux des véhicules thermiques, force est de constater que certains progrès ont été faits. Le « progrès » s’est niché principalement dans les batteries, dans les aimants et un peu dans l’électronique nécessaire au moteur.
Voyons tout d’abord les progrès les plus faciles, les progrès du moteur. Pour les véhicules électriques, il existe en gros quatre types de moteur : le moteur à courant continu avec ou sans balais, le moteur à courant alternatif synchrone dit moteur sans balais et le moteur asynchrone. Remarquons que le courant sortant de la batterie est toujours continu et qu’il faut au besoin le transformer en alternatif.
Le moteur à balais
Voici un moteur à balais, 3 bobines, 2 aimants.
Un moteur à balais se compose principalement d’un boîtier métallique cylindrique contenant un stator et un rotor. Le rotor est une partie de l’arbre-moteur qui tourne à l’intérieur du stator. Le rotor compte plusieurs bobines qui peuvent soit avoir un noyau de fer doux ou sont sans noyau. Le stator se compose généralement de deux aimants permanents, montés très près de la partie extérieure métallique du rotor.
Les bobines du rotor reçoivent du courant par le collecteur, lequel est relié au courant continu de la batterie par deux balais (ou charbons) qui frottent sur sa surface. Le collecteur change la polarité de la tension aux bobines à un certain instant lors de chaque tour du moteur, ce qui maintient le moteur en marche. Les moteurs de la voiture de 1899, de la Peugeot 106 électrique des années 2000, de même que celui du premier avion électrique, sont des moteurs à balais.
Le progrès s’est situé dans la réalisation des aimants permanents du stator qui sont devenus, au fil du temps, de plus en plus légers, à force magnétique constante (aimants « terres rares »). Les progrès de l’électronique permettent maintenant de passer à l’autre type de moteur, plus moderne, le moteur dit « brushless », moteurs sans balais ni charbons, donc sans organe de frottement – c’est important pour la fiabilité surtout en aviation.
Le moteur sans balais
Le collecteur qui change le sens du courant est alors remplacé par un dispositif électronique extérieur pour les grandes puissances appelé onduleur. Ce dernier convertit la tension continue de la batterie en trois lignes de courants alternatifs décalés de 120°. Ces moteurs sont donc du type alternatif synchrone, c’est-à-dire qu’ils vont tourner constamment à la même vitesse mais que si on fait varier la charge, c’est la consommation d’électricité qui croit et non le nombre de tours qui diminue.
Enfin, contrairement au stator du moteur à balais, le stator du moteur « brushless » porte les bobines tandis que le rotor est constitué normalement des aimants permanents. C’est la formule d’avenir. Poids réduit, bon refroidissement des aimants et surtout absence de frottement…
Le moteur alternatif asynchrone
C’est le moteur industriel par excellence. Quand on augmente la charge, la vitesse de rotation diminue. Le moteur « glisse » et il faut alors la rétablir en augmentant la consommation électrique. Il est employé dans la voiture de sport Tesla et dans ce cas, c’est l’électronique qui fait tout : transformation du courant continu en courant alternatif par un onduleur perfectionné et contrôle du nombre de tours et du couple.
Les moteurs employés par les voitures électriques de 2017
Le marché du véhicule électrique (ou hybride rechargeable) se partage entre deux technologies :
– Peugeot Ion, Toyota Prius : moteur synchrone à aimant permanent. Inconvénient : la Chine a le quasi monopole des terres rares des aimants de ce moteur.
– Renault-Nissan et Bolloré utilisent un moteur synchrone à rotor bobiné, plus volumineux et lourd, qui nécessite de l’électronique supplémentaire (hacheur)… mais pas de terres rares.
En résumé, la technologie des aimants a permis de notablement alléger le moteur électrique et l’électronique autorise maintenant l’emploi de moteurs synchrones sans balais, ce qui pour l’aviation est évidemment fondamental. L’électronique permet enfin de disposer d’organes performants de commande du moteur qui remplacent les antiques rhéostats que maniaient les éboueurs de Paris ou les « Wattmen » des tramways. Si l’électronique vous fait peur, passez dès maintenant votre chemin.
Et maintenant que faut-il attendre des batteries ? C’est l’object de la deuxième partie de cet article… ♦♦♦
Photo © Pipistrel
Lien vers la deuxième partie de cet article.