Duel autour de records aéronautiques pour deux pilotes dans les années 1950/1960.
Qui s’intéresse au développement de l’aviation à réaction dans les années 1950/1960 n’a pu échapper au duel de deux femmes pour décrocher des records de vitesse et ainsi mettre à l’honneur les productions américaines et françaises… Les médias de l’époque se sont ainsi chargés de relayer les divers affrontements entre Jacqueline Auriol et Jacqueline Cochran.
La Française suit des cours d’histoire de l’art et effectue un baptême de l’air à l’âge de 16 ans.
A 21 ans, elle épouse Paul Auriol, fils de Vincent Auriol qui devient par la suite président de la République. Jacqueline Auriol décide d’apprendre à piloter, faisant sa formation sur SV-4 Stampe, décrochant les 1er et 2e degrés en 1948. Pour se perfectionner, elle pratique la voltige. En juillet 1949, elle est victime d’un accident lors d’un vol comme passagère à bord d’un hydravion, qui s’écrase dans la Seine.
Avec plusieurs fractures du crâne, elle est défigurée. Une vingtaine d’interventions chirurgicales effectuées durant deux années aux États-Unis et une forte dose d’obstination vont lui permettre de retrouver le chemin d’un cockpit, pour passer successivement ses brevets militaire, de vol à voile et d’hélicoptère. Avec différentes industries aéronautiques s’affrontant via des records de vitesse ou d’altitude, elle bat un record de vitesse féminin sur Mistral (855,9 km/h) en décembre 1952.
Le 20 mai suivant, l’Américaine Jacqueline Cochran reprend ce record avec 1.050 km/h. En août 1953, la Française devient la première pilote européenne à franchir le « mur du son », aux commandes d’un Mystère II. L’année suivante, elle rejoint l’Ecole du personnel navigant d’essais et de réception (EPNER) pour devenir pilote d’essais et rejoindre le Centre d’essais en vol (CEV) de Brétigny-sur-Orge. Par la suite, elle sera la première femme à voler sur Concorde, en tant que pilote d’essais.
La lutte entre les deux Jacqueline se poursuit. Jacqueline Cochran, devenue vice-présidente de la Fédération aéronautique internationale (FAI), instance homologuant les records, souhaite garder son titre de « femme la plus rapide du monde ». Elle annonce en mai 1955 que les records féminins seront abolis le 1er juin suivant. Mais le 31 mai, Jacqueline Auriol reprend le record de vitesse avec 1.151 km/h sur Mystère IV ! Jacqueline Cochran revient donc sur sa décision au niveau des records féminins !
La poursuite vers des vitesses plus élevées n’est donc pas achevée pour ces deux femmes pilotes. L’Américaine va atteindre 1.262 km/h sur Northrop T-38 Talon. La Française, 1.849 km/h sur Mirage IIIC puis 2.030 km/h. L’Américaine réplique avec 2.097 km/h sur F-104 Starfighter.
Le parcours de l’Américaine n’est pas moins intéressant. Cinquième enfant d’une famille modeste, elle devient coiffeuse. Un premier mariage lui donne le nom de Cochran et elle transforme alors Jacqueline en Jackie. La rencontre du richissime Floyd Bostwick Odlum, patron de la RKO à Hollywood, va constituer le tournant de sa vie. Il l’aide à lancer un commerce dans le domaine des cosmétiques.
Jackie Cochran, après un baptême de l’air, devient pilote au début des années 1930. Elle passe sa licence professionnelle. Mariée à M. Odlum en 1936 après le divorce de ce dernier, celui-ci accélère la commercialisation de la ligne de cosmétique baptisée Wings avec des opérations publicitaires. Jackie utilise ainsi son propre avion pour assurer la promotion de ses produits. Sa notoriété la pousse à écrire en septembre 1940 à la femme de Roosevelt, président des Etats-Unis, pour créer une unité féminine dans les Army Air Forces, unité qu’elle va commander à partir de 1943.
Après guerre, elle sera la première femme à passer le mur du son, en mai 1953, à bord d’un F-86 Sabre. Devenue consultante pour Northrop, elle décroche des records de vitesse et d’altitude sur T-38A Talon. Elle réalisera des décollages et atterrissages sur porte-avions, participera à des courses en P-51 Mustang, sera la première femme à devenir présidente de la FAI de 1958 à 1961. Jackie Cochran nous a quittés le 9 août 1980, Jacqueline Auriol le 11 février 2000.
Dans le cadre de la Journée Internationale de la Femme et à l’occasion du 100e anniversaire de la naissance de Jacqueline Auriol, l’Aéro-Club de France et l’Association Française des Femmes Pilotes (AFFP) organiseront à Paris une conférence sur Jacqueline Auriol et Jacqueline Cochran le mercredi 8 mars à 19h00. La conférence de cette « Soirée des Femmes dans l’Aviation » sera suivie d’un documentaire sur le même sujet, diffusé par France 3 l’an passé. ♦♦♦
Photos © CEV / FAI / USAF
– Conférence-projection le 8 mars à 19h00, à l’Aéro-Club de France, 6, rue Galilée, 75116 Paris. Métro Boissière. Participation : 5 €. Inscription souhaitée avant le 22 février via communication@aeroclub.com
Ci-dessous :
– Jacqueline Auriol lors de l’un de ses vols sur Mirage IIIC.
– Jackie Cochran sur l’aile d’un F-86 en compagnie de Chuck Yeager et le chef-pilote d’essais de Canadair, Bill Longhurst.