Il y a 77 ans, le 13 février 1940, un étrange avion de tourisme disparaissait à Liverpool, dans la rivière Mersey…
Nous étions alors en pleine drôle de guerre et l’aérodrome de Liverpool Speke – aujourd’hui le Liverpool John Lennon Airport – était un repaire de Spitfire à une dizaine de kilomètres de la ville implantée sur les rives de la Mersey et son estuaire. La sublime aérogare, l’équivalent anglais de celle du Bourget ou de Tempelhof, aujourd’hui hôtel de luxe, était remplie de pilotes militaires.
L’aérogare des années 1930 désormais transformée en hôtel… (© Chris J. Wood/ Wikipedia)
Le temps virait à la pluie verglaçante. Trois hommes montèrent à bord de la Rolls des avions de tourisme, avion réquisitionné six mois plus tôt par la Royal Air Force, un Heston Phoenix ex-démonstrateur de la société Heston, basée sur l’aérodrome du même nom. En ouverture de cet article, photo de l’appareil en question avant la transformation de son pare-brise.
Apparu en 1935, le Phoenix était un luxueux cinq-places équipé d’un moteur De Havilland Gipsy Queen, un 6 cylindres en ligne de 200 ch. Ce jour-là, le carburateur givra au décollage et l’avion, train rentré, amerrit sans encombre sur la rivière Mersey située juste en bout de piste de RAF Speke. Les trois personnes indemnes furent secourues et l’avion, le quatrième des six construits, disparut doucement dans l’eau.
En fait c’est son train rentrant original, premier train rentrant britannique à commande hydraulique, qui permit à l’amerrissage d’être sans conséquences pour l’équipage.
Cinq vastes places, une cabine qui était, dit-on, la mieux insonorisée de l’époque, avec cinq sièges en cuir à la disposition originale, un train rentrant hydraulique, une vitesse de croisière de 210 km/h, un rayon d’action de 800 km pour 220 l de carburant, ce Phoenix aurait pu de nos jours renaitre de ses cendres en Cessna 182, RG bien sûr !
Ses moignons d’aile inférieure, abritant le train rentrant, le rendait comparable au Beech Staggerwing beaucoup plus puissant et plus rapide, et surtout beaucoup plus répandu en 1939 (plus de 200 construits à cette époque contre 6 pour le Phoenix)
L’avion coûtait 1.700 livres en 1936 soit environ 10% de plus que son concurrent direct, le Percival Vega Gull, concurrent qui avait le même moteur mais était 30 km/h plus rapide et beaucoup plus endurant (1.400 km). C’était l’époque des « gentlemen riders » qui rêvaient d’aller, en pilotant, de Londres au Cap ou à Sydney.
Or le Phoenix n’alla qu’une fois en Australie, avec le pilote Charles Jimmy Melrose, en effectuant 27 étapes quand, au même moment, le Staggerwing faisait le tour des Amériques ou même le tour du monde. Jimmy Melrose (photo ci-dessus) se tua à l’été 1936 aux commandes de son beau Phoenix tout neuf, dans le mauvais temps, près de Melton (Australie).
Ci-dessus, le Phoenix de Charles Jimmy Melrose, encore plus beau qu’une Jaguar d’avant guerre ! Sur les six Phoenix construits, quatre furent réquisitionnés par la RAF. Un seul a survécu à la guerre avant de faire un atterrissage forcé dans les Alpes, en mai 1952. Son propriétaire et pilote, indemne, en récupéra seulement le moteur… ♦♦♦
Un lien pour retracer l’histoire (en anglais et avec photos) du terrain de Liverpool.