Rappels de quelques règles pour une bonne veille anti-collision.
Il y a quelques jours, aux Etats-Unis, une collision en vol a eu lieu, à quelques centaines de pieds de hauteur, en courte finale sur un terrain non contrôlé, avec des conséquences dramatiques. Les équipages d’un DA-20 (un élève et son instructeur) et d’un Bonanza ne se sont pas vus… Les conditions météo étaient bonnes… Contrairement à ce que l’on imagine, les collisions en vol ne surviennent pas par mauvaises visibilités mais plutôt par excellentes conditions, quand le trafic est important…
Ainsi, toutes les études montrent que des collisions en vol ont lieu durant toutes les phases de vol et à toutes altitudes mais en règle générale, elles interviennent par bonnes conditions météo, de jour et à basse hauteur, là où se pratiquent principalement les vols VFR. Une grande majorité d’accidents survient ainsi près des aérodromes, en phase de montée ou de descente, voire dans le circuit de piste. Si des appareils IFR peuvent être concernés, il s’agit principalement de trafics VFR. Tout pilote peut être concerné, quelle que soit son expérience, du débutant au pilote très expérimenté.
Même si des équipements anti-collision commencent à se répandre dans les cockpits (type PowerFlarm) et si l’usage du code transpondeur offre une protection vis-à-vis des avions de ligne équipés d’un TCAS, les accidents surviennent essentiellement entre appareils de l’aviation générale, dans les basses couches. La méthode la meilleure bien que parfois insuffisante demeure le « voir et être vu ». Retour sur les bonnes pratiques en la matière…
Une veille anti-collision impose de « voir et être vu ». Pour voir, il faut mettre en place des techniques de « scanning » et donc passer un maximum de temps avec les yeux tournés vers l’extérieur et non pas dans le cockpit. S’il faut mener des actions dans le cockpit (changement de fréquence, remplissage d’un log de nav, consultation de la carte…), cela doit être fait par brèves périodes séquencées « intérieur-extérieur ». D’où la nécessité d’une bonne préparation du vol en amont afin de limiter le temps passé ensuite « dans le cockpit ». Si un ou des passagers sont à bord, il faut les faire participer à la veille.
Pour « voir et être vu », d’autres moyens sont à mettre en oeuvre. Les feux anti-collision et les phares allumés constituent une sécurité passive additionnelle, surtout quand on arrive dans un secteur à forte concentration d’appareils : passage à la verticale d’un VOR, proximité d’un aérodrome actif, secteur touristique souvent survolé… Le mieux, à la préparation du vol, est cependant d’éviter les zones à forte concentration d’aéronefs.
Un autre moyen est d’utiliser la radio, pour s’annonçer (afin d’être vu…) et pour écouter (pour voir les autres…). D’où l’importance d’une bonne phraséologie, avec une localisation en 3 dimensions imposant une altitude, une orientation (un cap ou une provenance) et un temps de passage à la verticale d’un terrain par exemple. Ces indications, précises, permettront à d’autres trafics d’obtenir une bonne « image mentale » de l’espace aérien, en notant la localisation des différentes « menaces », en accentuant la recherche des autres trafics ainsi précisés et non vus.
Qu’est-ce qu’un pilote peut faire pour améliorer sa veille « anti-collision » ? Avant tout, regarder dehors… mais pas n’importe comment ! Il faut bien connaître les limites de la vision humaine, avec les particularités des cônes et batonnets formant la rétine, mais aussi l’angle de vision nette qui se limite à 10/15° quand la vision périphérique, moins précise, peut atteindre plus de 180°.
Il faut également « voir » et non pas simplement « regarder », c’est-à-dire poser son regarder plusieurs secondes pour permettre l’accommodation de ses yeux. Ceci peut prendre du temps sur un fond monochrome (ciel clair) ou contrasté (relief, champs, zone urbaine). Il faut de plus ne pas oublier les angles morts inévitables sur tout appareil et donc bouger la tête régulièrement pour diminuer leur impact.
Les pièges sont nombreux. Ainsi, un appareil sur une trajectoire convergente sera « immobile » dans le pare-brise, et il sera difficile d’identifier ce risque grandissant, surtout si le pare-brise n’a pas été bien nettoyé et que le « trafic » est noyé au milieu d’impacts de moucherons… Il faut également prendre en compte les vitesses relatives car en quelques secondes, un « trafic » peut devenir rapidement un risque majeur de collision quand deux appareils convergent en face à face à plus de 200 km/h chacun soit 400 km/h de vitesse relative.
Aussi, durant toutes les phases de vol, un balayage continu du regard (scanning) doit être effectué. Il s’agit d’analyser des « volumes » autour de vous en tournant la tête à chaque fois de 10 à 15° puis de prendre le temps d’observer avant de redéplacer sa tête. Tourner constamment la tête n’est pas la bonne solution !
De plus, les zones non visibles doivent être « surveillées » attentivement, soit en modifiant la trajectoire de l’appareil (en remise de gaz, on peut décaler sa trajectoire en parallèle de la piste pour éviter un éventuel trafic en montée initiale, on peut lever ou baisser une aile pour mieux voir d’un côté…), soit en se faisant une bonne image mentale de la position des trafics dans un tour de piste…
Même par mauvais temps, même si la fréquence est « morte », même si aucun trafic n’est visible, il ne faut pas faire l’impasse sur une annonce radio quand on prévoit une verticale d’un terrain. Et si un trafic fait des annonces avec une trajectoire convergente ou en tour de piste, il est bon de se signaler en auto-information et de lever tout doute, par exemple si le trafic face à vous n’a pas précisé son altitude… Attention à ne pas se concentrer seulement sur un trafic vu ou entendu, il faut surveiller le reste du ciel…
Restez vigilant, même en tour de piste sur terrain contrôlé ! Assurez bien la sécurité avant de virer. En étape de base, controllez l’absence d’une finale directe pouvant être menée sur une mauvaise fréquence ! En finale, surveillez votre ombre et si vous en voyez deux… ♦♦♦
Lecture conseillée : Les limites du « voir et être vu ».