Outre-Manche, simplification en vue pour la visite médicale des PPL volant sur avions non-EASA tandis que les LAPL ont déjà droit à la visite médicale par un médecin généraliste, comme le veut l’EASA.
Tout pilote – suivant de près l’évolution réglementaire en cours depuis quelques années et au moins encore jusqu’au 8 avril 2018 (au plus tôt !), avec notamment l’introduction progressive d’une nouvelle réglementation issue de l’EASA – sait que pour la licence LAPL (Light Aircraft Pilot Licence), l’EASA a retenu pour les candidats à cettel licence une simple visite médicale chez un… médecin généraliste, ce dernier devant préciser une « non contre-indication à la pratique du pilotage ».
Sur ce point, en France, le Conseil médical de l’Aviation civile (CMAC) a mis son véto, exigeant toujours – sans doute par habitude et manque de réflexion – une visite médicale par un médecin aéronautique (classe 2). Les membres de ce conseil n’ont visiblement toujours pas compris que les causes médicales n’apparaissent que très rarement dans les rapports d’accidents. Les causes médicales sont infinitésimales et quand elles apparaissent (crise cardiaque, rupture d’anévrisme), elles n’ont pas pu être appréhendées à la visite médicale…
Cela fait des années que les pays anglo-saxons ont préféré mettre en avant les connaissances non-techniques (connaissance de soi, facteurs humains, conscience de la situation, prise de décision, système de gestion de la sécurité, etc.) pour améliorer la sécurité tandis que la méthode de « pilotage à la française » poursuivait dans son auto-satisfaction avec l’approche cartésienne des connaissances techniques.
Or dans plus de 80% des causes d’accidents, ce sont les causes humaines qui arrivent en tête, raison de plus pour travailler cette facette et non pas croire encore à la nécessité d’un « sur-homme » dans les cockpits, façon visite médicale de l’Etoffe des Héros ! Bref, il faudra sans doute une génération de plus pour que la mentalité du CMAC puisse évoluer – viscosité mentale !
Les Anglais – dont le taux d’accidentologie est meilleur que le nôtre – ont fait un pas de plus ces derniers jours. Non seulement ils ont déjà mis en application la visite médicale par un médecin généraliste (le médecin de famille) pour les candidats et brevetés LAPL, mais désormais, ils annoncent vouloir étendre cette pratique aux titulaires du PPL… anglais, c’est-à-dire les pilotes volant sur des avions non-EASA (avions de collection, avions de construction amateur, ex-avions militaires). L’objectif mis en avant est de diminuer les coûts pour les pilotes et leur faire également gagner du temps.
Cette « simplification » de la visite médicale, outre-Manche, ne concerne pas les pilotes professionnels ni les pilotes de présentation effectuant des présentations lors de meetings – ceux-ci devront continuer à passer une visite médicale auprès d’un médecin aéronautique. Cela ne sera pas le cas des instructeurs qui pourront bénéficier de la nouvelle donne.
Dès que ce projet deviendra réalité au cours de cette année (la CAA évoque la fin de l’été), les pilotes anglais titulaires d’un PPL ou d’un NPPL maintenu malgré l’Europe (une licence anglo-britannique strictement équivalente à l’ancienne licence franco-française TT remplacée par le PPL européen) devront simplement répondre aux critères de la visite médicale du permis de conduire. Une déclaration signée du médecin généraliste pourra toujours faire l’affaire. Ceci concernera également les pilotes de montgolfières. Les vélivoles ne sont pas précisés car outre-Manche la visite médicale n’est pas obligatoire…
Pour « valider » leur « médical », en confirmant répondre aux critères évoqués ci-dessus, les pilotes anglais devront compléter un formulaire en ligne sur le site de la CAA, et ce une seule fois pour les pilotes de moins de 70 ans. Les pilotes de plus de 70 ans devront le faire tous les trois ans. La CAA, avant de faire cette proposition, a mené une étude des risques associés à ce projet réglementaire tout en analysant les causes d’accidents d’avions légers et notamment les cas où un pilote aurait été mis en incapacité pour cause médicale. Les risques aux tiers ont également été pris en compte ainsi que l’approche réglementaire similaire menée aux Etats-Unis.
Bref, à l’issue de l’étude des risques, ceux-ci ont été jugés suffisamment faibles ou inexistants – en d’autres termes, ce n’est pas le maintien de ces contraintes inutiles en termes de visite médicale qui vont améliorer le niveau de sécurité… – pour faire évoluer la réglementation anglaise en matière de visite médicale.
En France, le CMAC va s’en tenir à l’obligation d’une visite médicale de classe 2. Mais dites donc, il ne serait pas temps de faire faire une visite médicale aux membres du CMAC ? Il semble que leurs auditions et leurs vues baissent ces derniers mois puisqu’ils n’arrivent pas à voir ou entendre ces évolutions dans les autres pays… et de plus, la DGAC avalise le fait de ne pas appliquer une directive de l’EASA. Ils ne vont quand même pas pouvoir répéter cette fois que la France n’arrive pas toujours à faire entendre ses messages face à de nombreux autres pays… ♦♦♦
Ndlr : cette évolution réglementaire fait suite à une consultation des pilotes par la CAA, consultation à laquelle plus de 1.500 pilotes ont participé dont 96% ont été favorables à l’évolution envisagée par la CAA. La genèse du projet et l’analyse de la consultation (34 pages) à lire en anglais avec ce lien.
aerovfr.com dit
Dans un compte-rendu de comité directeur, fin 2015, la FFA précisait que « les relations entre les médecins aéronautiques et le pôle médical sont difficiles, en raison notamment d’une lecture différente des textes par la DGAC et d’un formulaire médical inadapté à nos visites de pilote de loisirs (visite classe 2). La FFA et le CNFAS demandent une réunion avec la DSAC DGAC afin de rencontrer le pôle médical et évoquer le LAPL ». Pas lu d’écho sur le sujet depuis…
FERAL dit
Bonjour, voici un excellent article et je partage totalement le point de vue exposé.
Cela dit, n’y-a-t-il pas une confusion entre le pôle médical de la DGAC, dorénavant compétent sur les décisions règlementaires et l’application du FCL / part medical et le CMAC, toujours existant mais dont les prérogatives se limitent à traiter les litiges entre les parties prenantes (stakeholders dans le jargon EASA) et le pôle medical de la DGAC ?