Première présentation sur terrain civil ce jour pour le nouveau Solo Display, le capitaine Jean-Guillaume « Marty » Martinez, à l’occasion du « Temps des Hélices » à La Ferté-Alais…
Parmi les équipes de présentation de l’armée de l’Air – notamment la Patrouille de France avec ses Alphajet et l’Equipe de voltige de l’armée de l’Air (EVAA) avec ses Extra 330SC – figure le Rafale Solo Display (RSD), une présentation en voltige d’un Rafale. En 2016, le pilote du Rafale Solo Display est le capitaine Jean-Guillaume « Marty » Martinez. Agé de 39 ans, chef de patrouille depuis 2007, il totalise 3.150 heures de vol dont 1.200 sur Rafale, et aussi 73 missions de guerre.
Entré dans l’armée de l’Air en 1997, il a été pilote sur Mirage 2000N à Luxeuil, puis instructeur à Salon-de-Provence sur Tucano avant de revenir sur 2000N à Luxeuil. En 2009, c’est la transition sur Rafale au « Gascogne » à Saint-Dizier. Depuis l’an passé, il est pilote-instructeur sur Rafale à l’ETR (Escadron de transition) « Aquitaine », toujours à Saint-Dizier.
Pour devenir pilote Solo Display, il faut faire acte de candidature en répondant à des différents prérequis : être chef de patrouille, totaliser un certain nombre d’heures de vol dont notamment sur Rafale. La sélection débute vers février et s’achève plus de six mois plus tard. Viendra ensuite l’entraînement pour être opérationnel l’année suivant la sélection.
L’entraînement en vol commence en place arrière d’un Rafale piloté par le Solo Display opérationnel, soit dans le cas de Marty, son collègue instructeur Benoit « Tao » Planche, pilote RSD pendant trois années de suite. Il s’agit de découvrir en « conditions réelles » les contraintes d’une présentation lors d’un meeting, l’ambiance d’une manifestation aérienne, les repères pour positionner sa démonstration et bien visualiser l’axe de présentation, etc.
Puis « Marty » a eu droit à deux vols au sein de la Patrouille de France et cinq vols au sein de l’EVAA, pour poursuivre l’apprentissage du « métier » de pilote de présentation, bien différent de celui d’un pilote de chasse. La formation se poursuit par un « stage centrifugeuse » à Brétigny-sur-Orge, qui compte l’une des centrifugeuses les plus sophistiquées au monde. Il reste encore le passage devant un psychologue, pour déterminer l’état d’esprit et la motivation du pilote.
Arrive alors l’entraînement en vol aux commandes d’un Rafale. Le cursus est progressif avec au départ trois vols d’entraînement à la voltige à partir d’une hauteur de 5.000 ft, pour passer en revue les figures utilisables par la suite pour le « ruban » de la démonstration. Les entraînements suivants ont été faits à 2.000 ft, avec « Tao » au sol, placé au « point central » de l’axe de présentation, radio en main pour faire passer en revue 3 ou 4 séquences de figures enchaînées, à raison de 20 mn de vol à chaque fois avant un débriefing au sol.
Puis, ce sera la même chose à 1.000 ft, histoire de se rapprocher progressivement du sol… Puis à 500 ft/sol avec cette fois la version définitive du « ruban », soit l’enchaînement « concocté » par le pilote, chaque démonstrateur mettant sa « touche », avec le passage lent au milieu de la présentation par exemple, permettant une départ de démonstration à grande vitesse, l’énergie permettant une série de figures dans le plan vertical, puis le passage lent avant de réaccélérer pour la fin du programme, histoire de donner du rythme.
L’entraînement comprend également par des séances de simulateurs, avec le passage en revue de plusieurs pannes, de plus en plus critiques, comme la panne des… deux réacteurs M-88 alors que l’avion a le « nez bas ». Une fois « validé », le ruban ne changera pas de toute la saison. Deux versions existent, « beau temps » (avec au moins 3.500 à 4.000 ft de plafond pour passer toutes les figures dans le plan vertical) et « mauvais temps » (sous 2.000 ft de plafond, imposant une adaptation de la série). Mais chaque année, le « ruban » sera nouveau, histoire de ne pas tomber dans la routine.
Pour un pilote-instructeur Rafale à Saint-Dizier, le Solo Display, c’est… en plus du travail habituel avec une « semaine » commençant le jeudi par la préparation du meeting à venir, voire des suivants. Le vendredi sera utilisé pour se mettre en place, sur le terrain du meeting ou la base aérienne la plus proche – Orléans-Bricy dans le cas du meeting de Cerny/La Ferté-Alais. Il y aura alors un vol de reconnaissance de la plate-forme puis un vol d’entraînement.
Pour le « Temps des Hélices » 2016, les conditions météorologiques ce vendredi 13 mai ont retardé le décollage des deux Rafale depuis Saint-Dizier. Deux avions sont toujours de la partie lors d’un meeting, un monoplace et un biplace si les présentations ont lieu en France, le biplace permettant l’emport d’un mécanicien. Deux monoplaces sont retenus pour des démonstrations à l’étranger car si la distance à parcourir est grande, la logistique est alors assurée par un bimoteur Casa 235.
Ainsi, « Marty » et « Tao » ont passé la verticale de La Ferté-Alais ce vendredi 13 mai vers 14h00, le plafond dans la matinée ne permettant pas une arrivée en sécurité avec des entrainements sur le terrain et l’arrivée continue d’avions de collection des quatre coins de l’Europe. Il a fallu attendre la fin de soirée, avec des orages grondant aux alentours du plateau de l’Ardenay, pour faire la répétition de la démonstration devant le directeur des vols, Michel Geindre. « Marty » a alors pu placer son « ruban » au milieu de nuages menaçants, avec des éclairs ici ou là.
Une heure auparavant, les Rafale Marine de l’Aéronavale avaient connu des conditions similaires, l’un des quatre Rafale rencontrant la grêle durant sa présentation, avec des dommages sur la cellule, ce qui explique ce samedi que le « dispositif » Aéronavale n’a compté que trois Rafale accompagnant l’ATL-2 et encadrant trois « vétérans » : un Fouga Zéphyr, un Morane-Saulnier MS-760 Paris et un Breguet Alizé.
Pour « Marty », cette répétition du vendredi était essentielle pour pouvoir effectuer la présentation devant le public lors du meeting, les samedi 14 et dimanche 15 mai. Les conditions météo (plafond, orages) l’ont obligé à travailler « serré », parfois en « sous-vitesse » par rapport aux conditions optimales, sans pouvoir « laisser respirer » la machine entre deux figures, avec les PC bien utilisées – les observateurs ont ainsi pu noter une différence de longueur de flamme en sortie de tuyères, avec deux modèles différents de M-88 installés sur le monoplace, avec une différence de 200 kg de pousssée…
Ce samedi, déposé en avion léger à Bricy vers 11h00, Jean-Guillaume Martinez a retrouvé son équipe de mécaniciens arrivés par la route, tous également volontaires pour faire partie du Solo Display Team. Lors des déplacements, 4 des 35 mécaniciens de l’Escadron de soutien technique aéronautique (ESTA) assurent la maintenance et la mise en oeuvre des avions. Les quatre mécanos ont chacune une spécialisation bien définie.
Un message arrive, le créneau de passage a été décalé par la direction des vols du meeting. Après un repas au mess pour l’équipe et un temps de repos pour le pilote, « Marty » a fait le point par téléphone avec Tao resté à La Ferté. Ce dernier lui a donné les dernières informations locales, lui rappelant la présence d’un vent « rentrant » – c’est à dire venant du nord et donc « poussant » les avions vers le public lors des évolutions alors qu’il s’agit de respecter les distances réglementaires, ce que ne pourront faire tous les pilotes dans l’après-midi avec un vent soutenu…
Au vu du plafond alors annoncé à Orly et à La Ferté-Alais, environ 2.400 ft, le pilote a déjà pris sa décision, ce sera la présentation « mauvais temps ». Le décollage est prévu à 13h29 pour 6 à 7 minutes de transit jusqu’à La Ferté-Alais, suivi de la présentation (9 mn) et le retour, soit un vol bien dense ne devant pas dépasser les 25 mn au total. Tout le monde s’est alors retrouvé sur le parking Escale de Bricy vers 12h45. Sur le béton, les deux Rafale ont déjà été préparés, le biplace, faisant office de « spare », étant prêt si un problème technique de dernière minute intervient sur le monoplace. A l’avion, le pilote et un mécanicien font la visite prévol, torche en main pour vérifier notamment les entrées de réacteurs et les sorties des tuyères.
Puis, à l’écart, « Marty » répète son « ruban », avec les mains mimant les rotations, la tête se tournant parfois vers l’arrière pour visualiser l’éloignement par rapport à l’axe de présentation avant un retour vers le public. Cette « musique » va durer plusieurs minutes, le temps de passer en revue la totalité de la démonstration prévue sur 9 minutes à la verticale de l’aérodrome de La Ferté-Alais.
Vient ensuite l’installation à bord, avec l’aide d’un mécanicien pour se brêler puis mettre le casque. Verrière refermée, groupe de démarrage branché sur le flanc gauche, les deux réacteurs sont mis en route dans un grondement sourd, avec un contrôle visuel par les mécaniciens. Tout est OK, groupe débranché, cales retirées…
Le pilote passe en revue tous les systèmes de l’appareil puis c’est le début du roulage, après un essai de frein. Quelques mètres plus loin, « Marty » s’arrête pour une rapide photo réalisée au téléphone portable pour marquer le départ du parking pour sa première présentation sur un terrain civil et aussi sa première venue au meeting de La Ferté-Alais…
L’avion va alors passer derrière le parking où trônent quelques C-160 Transall et C-130 Hercules, pour atteindre le point d’arrêt de la 07. Dernières vérifications, alignement et même si on ne le voit plus du parking Escale, la mise de gaz des deux M-88 s’entend bien… Décollage, rentrée du train, quelques battements d’aile à l’équipe et c’est la mise de cap vers La Ferté-Alais. Ce sera alors la « démo » avec facteurs de charge positif (9 g « soutenus ») et aussi négatif (le Rafale peut tenir -3 g).
Une vingtaine de minutes plus tard, le Rafale se présente à grande vitesse dans l’axe de la 25 pour un break à gauche suivie d’un 360° avec sortie du train et des volets puis l’atterrissage. Au retour au parking, réacteurs arrêtés, c’est l’accueil au pied de l’échelle par les applaudissements de l’équipe de mécanos et quelques photos souvenir… Le débriefing sera rapide, aucun point à signaler sur la machine. Les mécaniciens n’auront donc pas à utiliser les équipements d’autodiagnostic à bord, permettant d’analyser et de corriger certains problèmes techniques pouvant survenir à l’issue d’un vol.
Il est temps de repartir en avion léger vers La Ferté-Alais pour rejoindre le stand du Solo Display Team pour y signer quelques autographes, discuter avec des passionnés, rencontrer d’autres pilotes. Demain, ce sera le même programme et les week-ends suivants également. De la mi-mai à la mi-octobre, « Marty » a déjà 62 démonstrations programmées au planning avec 25 sites différents, dont certains à l’étranger : en Belgique (Florennes le 25 et 26 juin), en Espagne (Gijon le 24 juillet), en Autriche (2-3 septembre à Zeltweg), en République tchèque (17-18 septembre, NATO Days à Ostrava) et aussi en Grande-Bretagne pour l’Air Tatoo (8-10 juillet).
Pour la France, il faut noter sur vos agendas une présentation à Biscarrosse le 22 mai (Flying Spirit), à Creil le 29 mai (Meeting de l’Air), les 4 et 5 juin à Istres (Meeting de l’Air), le 12 juin au Cap d’Agde (Festival de voltige), le 16 juin à Cazaux, les 18 et 19 juin à Avord (Meeting de l’Air), les 2-3 juillet à Chambley (Free Flight World Master), 14 juillet à Valenciennes, 17 juillet à Pornic, 7 août à Saint-Cyprien, 14 août à Toulon, 21 août à Pons-Avy, 28 août à Verdun (centenaire de la Grande Guerre), 10-11 septembre à Rixheim-Habsheim, 25 septembre à Aix-les-Bains, 6 octobre à Orange et 8-9 octobre à Sainte-Maxime (Free Flight World Masters).
Pour « Marty, ce programme se poursuivra l’an prochain car un pilote Solo Display reste en place durant deux années avant de poursuivre comme coach du pilote lui succédant durant deux années supplémentaires. Pour Benoit « Tao » Planche, la durée comme pilote Solo Display a été repoussée à trois ans, pour se décaler par rapport au salon du Bourget. En effet, on considère qu’un pilote Solo Display est pleinement opérationnel que la seconde année et il s’agissait donc que cette seconde année soit en phase avec le salon aéronautique… ♦♦♦
Photos © F. Besse
https://www.rafalesolodisplay.com