Permettre l’évolution d’appareils, notamment anciens, et ce sans certification ou homologation supplémentaires et coûteuses…
La « décision » de l’EASA concernant la réglementation CS-STAN a été publiée hier. Ce n’est donc qu’une étape supplémentaire du processus réglementaire avant d’atteindre l’application définitive de cette évolution des textes ! Le processus était en route depuis le 6 octobre 2014 avec la volonté de l’EASA de proposer un texte réglementaire pour les changements standards et les réparations standards (Certification Specifications for Standard Changes and Standard Repairs soit CS-STAN dans le jargon à Cologne).
Après dix ans de processus réglementaire pour dynamiser l’aviation générale en Europe
– mais c’est bien sûr, Eureka ! – l’EASA a enfin pris en compte que « trop de réglementation tue la réglementation » (elle le répète depuis l’arrivée de M. Ky à sa tête mais sans passer à des actes concrets), et que le ras-le-bol était déjà dépassé depuis des années avec des contraintes bureaucratiques allant souvent à l’encontre de la sécurité – un comble pour une Agence européenne dont la dénomination évoque pourtant la sécurité aéronautique !
Ainsi, les CS-STAN ont pour but – sous certaines conditions, faut quand même pas pousser ! – de permettre certaines évolutions sur des avions… sans exiger une approbation provenant de l’EASA ou du bureau d’études (DOA ou Design Organisation) du constructeur. Ceci concernera les avions de moins de 5,7 tonnes de masse maximale au décollage, les appareils à voilure tournante de moins de 3,175 tonnes et les planeurs, motoplaneurs, montgolfières et dirigeables dits ELA1 et ELA2 (European Light Aircraft). Les CS-STAN ont permis à l’EASA, lors de ses présentations au salon Aero à Friedrichshafen, en avril dernier, de tenir un discours enfin positif ou du moins porteur d’espoir que l’on n’espère pas – une fois de plus – déçu prochainement !
En pratique, à quoi cela va-t-il bien servir ? Si l’on a bien compris l’esprit de ce texte non applicable encore, avec les CS-STAN, il devrait être envisageable (utilisons le conditionnel de prudence…) d’intégrer par exemple des équipements participant grandement à la sécurité des vols mais qui n’ont pas été prévus au départ par le constructeur. Si vous volez sur un DR-400 construit dans les années 1970, les Avions Robin ne pouvaient pas évoquer à l’époque l’usage des GPS, moving-maps et toute autre avionique moderne. Les agents de l’OSAC vont encore vous dire aujourd’hui : « Stop ! Non conforme au manuel de vol » même si ce dernier a été rédigé à la main en 1970 ! Ils en sont restés encore au 20e siècle…
Ainsi, il sera possible d’utiliser des équipements non homologués par l’EASA ou le constructeur, ce qui exigeait auparavant la dépose d’un dossier technique, accompagnée évidemment d’une redevance EASA et un coût de développement pas toujours économiquement viable quand le type est ancien et que peu d’appareils peuvent être encore concernés – une modification ne se justifiant pas pour le constructeur ou facturée à prix d’or à un unique client. Ainsi, on pourrait imaginer la mise en place par un atelier et selon les « règles de l’art » d’une prise allume-cigare sur le circuit électrique de l’avion pour alimenter un GPS portable, gage de sécurité, alors qu’aujourd’hui, les agents de l’OSAC vont encore vous dire : « Non conforme au manuel de vol, le schéma électrique sur le manuel de ce DR-400 de 1970 n’indique pas une telle prise pour un GPS »…
Il sera possible d’installer sans trop de complication des équipements comme une VHF, un transpondeur, un FLARM, changer les phares d’atterrissage par des LED (aujourd’hui, les agents de l’OSAC les plus arcqueboutés sur les textes vous font déposer les lampes d’origine automobile qui sont pourtant plus efficaces notamment pour le VFR de nuit…). Il sera possible d’installer des appuis-tête (aujourd’hui, si vous mettez une housse automobile de protection sur les sièges d’un avion, des agents de l’OSAC vous les font retirer car « non conformes » !). Si les nouveaux équipements en avionique imposent la pose d’une antenne, sa mise en place sera grandement facilitée – aujourd’hui, les agents de l’OSAC vont vous répéter « Cela n’est pas conforme au manuel de vol original » (refrain…).
Il sera possible d’installer des ceintures à enrouleurs sur un appareil dont le manuel de vol évoque de simples ceintures conventionnelles (aujourd’hui, les agents de l’OSAC…). Il sera possible sans discussion sans fin d’utiliser pour certains appareils le carburant 91/98UL Hjelmco ou d’installer un indicateur d’incidence (incidencemètre) comme la FAA le prône depuis quelques mois pour améliorer la sécurité outre-Atlantique.
Il sera encore possible de changer certains instruments de vol. Aujourd’hui, un agent OSAC peut encore vous déclarer que votre indicateur de dépression sur un DR de 1970, au diamètre de 35 ou 40 mn sur la console verticale, instrument issu des Avions Robin, n’est pas… conforme au manuel de vol. Celui-ci, datant de 1970, évoque un indicateur de 80 mm de diamètre – qui n’est plus disponible ! – placé en plein milieu de la planche droite du tableau de bord et qu’il faudrait remettre à la place du rack de radionavigation !
Avec les CS-STAN, il en sera également de même pour des réparations jusqu’à un certain niveau d’importance, en utilisant des méthodes ayant fait leur preuve par le passé avec des personnes qualifiées pour le faire. Et l’EASA de considérer que le niveau de sécurité sera maintenu dans ces conditions. En un mot, les CS-STAN devraient (conditionnel) diminuer un peu les coûts d’exploitation et permettre surtout de moderniser à moindre coût des avions d’ancienne génération sans passer par le « hachoir bureaucratique » qui décourage les propriétaires d’améliorer leur sécurité ou les pousse à le faire… en dehors du cadre réglementaire.
Les commentaires sur ce projet réglementaire peuvent être déposés sur le site de l’EASA jusqu’au 6 janvier 2016. En fonction des commentaires reçus, des modifications pourront être ou non apportées au projet initial avant que l’Opinion (stade ultime d’un projet réglementaire permettant son application pratique) ne soit publiée courant 2016. ♦♦♦