L’amphibie biplace SkiGull sera le dernier projet du concepteur californien…
En 2011, Burt Rutan a pris sa retraite de la société Scaled Composites qu’il avait fondée pour concevoir des prototypes à la demande de constructeurs, d’organismes dépendant du ministère de la Défense américain ou de milliardaires – comme Paul Allen qui a financé le programme des WhiteKnight (WK) et SpaceShipOne (SS1) pour remporter le X-Prize avec des vols au-delà de 100 km d’altitude.
Mais après un an de réflexion, le concepteur californien s’est remis à la planche de travail pour concevoir un biplace répondant à ses attentes. Deux années de conception ont été nécessaires pour développer le SkiGull, un biplace qui sera présenté officiellement lors du prochain AirVenture de l’Experimental Aircraft Association (EAA) à Oshkosh, en juillet prochain. La médiatisation du programme bénéficiera de la commémoration des premiers vols du VariEze en 1975, il y a 40 ans…
Le prototype est en fin de construction, approchant du premier vol mais aucune image n’a été diffusée à ce jour. Burt Rutan sait faire durer le suspens pour médiatiser la commercialisation de son dernier-né avec un film en cours sur sa carrière. Une chose est sûre : cela ne sera pas un canard mais un amphibie à aile haute et moteur propulsif, aux empennages en T. Le SkiGull sera motorisé par un Rotax certifié modifié avec turbocompresseur, injection, hélice à pas variable et puissance maximale d’environ 130 ch – après avoir imaginé au départ une configuration bimoteur, solution non retenue car non autorisée en Light Sport Aircraft. La structure fera appel aux matériaux composites et au titane en visant un usage en milieu maritime, le sel interdisant l’usage de l’aluminium.
L’architecture générale est du type « trimaran », avec une coque principale au centre assurant 60% de la flottabilité. Les deux pontons latéraux assurent le reste de la flottabilité (40%) ainsi que la stabilité latérale sur l’eau. L’originalité principale provient de « skis » rétractables à l’avant de la coque. Le système des skis rétractables, baptisé « Tri-Marine », a été testé en 2013 sur un lac avec des maquettes tractées – comme le fit Henri Fabre en 1910 pour son premier « hydroplane » de formule… canard ! Ces essais ont permis de valider le comportement aquatique, notamment les performances au décollage.
Se déployant grâce à un système pneumatique à 15 Kt, les skis doivent faciliter le décollage sachant que pour diminuer la traînée aérodynamique, la coque n’aura pas de redan. A l’atterrissage, leur système d’absorption des chocs devrait également amortir le contact sur eau non plate (clapot sur lac ou rivière). Le SkiGull pourrait ainsi utiliser des eaux plus agitées que ces concurrents comme l’Icon A5.
Le SkiGull pourra décoller sans l’usage de ses skis nautiques mais uniquement sur eaux calmes. A l’extrémité arrière des skis se trouvent des roulettes, permettant un usage de pistes en herbe ou en dur, voir des atterrissages sur surfaces enneigées.
La cabine sera à disposition en tandem, avec un cockpit similaire à celui du LongEZ. Un coffre à bagages doit permettre l’emport de cannes à pêche, skis ou clubs de golf. Pour les opérations sur l’eau, le SkiGull devrait bénéficier de deux hélices repliables entraînées par des moteurs électriques, se déployant sur chaque voilure. Il sera possible de faire de la marche avant ou arrière pour approcher d’une plage ou d’un ponton. Cette motorisation additionnelle serait utilisable lors de décollage à masse élevée et pour assurer un tour de piste en cas de panne du moteur principal au décollage… La finesse maximale du SkiGull est donnée pour 23 points.
Si les performances restent calculées (60 miles par gallon soit environ 4 litres aux 100 km parcourus) en l’absence de tout vol, Burt Rutan annonce une distance franchissable permettant de relier la Californie à Hawaï sans réservoirs supplémentaires. Mais pour éviter de voler de nuit, une telle traversée maritime devra être effectuées par bonnes conditions métorologiques car il faudra se poser en mer et passer la nuit sur les flots grâce deux hammacks tendus entre les attaches d’ailes et les empennages !
Avec une voilure de grand allongement et à l’envergure de 13,40 m, le SkiGull est prévu avec des ailes repliables vers l’arrière après pivotement à la verticale (les saumons devront être retirés pour respecter le gabarit routier). L’appareil doit ainsi trouver place dans un garage automobile, pouvant être tracté avec trois équipements routiers additionnels, donc sans nécessiter l’usage d’un remorque. Les capacités Stol doivent permettre des opérations à partir d’une piste de 120 m de long. Une fois l’appareil mis au point, Burt Rutan, désormais âgé de 71 ans, entend silloner la planète avec sa femme Tonya, en bénéficiant d’une distance franchissable de 2.400 nautiques à 23.000 ft ou 1.200 nautiques à la vitesse de 170 Kt.
Après plusieurs dizaines de prototypes conçus au sein de la Rutan Aircraft Factory (RAF) puis la Scaled Composites, Burt Rutan annonce que ce sera son dernier appareil, souhaitant désormais voler pour son plaisir, n’ayant pas toujours eu le temps de le faire sur les appareils conçus auparavant, mis à part le bimoteur push-pull Defiant sur lequel il a enregistré son plus grand nombre d’heures de vol. Les autres appareils diffusés pour le monde de la construction amateur avant l’arrêt de la RAF ont été les VariViggen, VariEze, LongEZ, Solitaire, Quickie et Defiant.
Pour le SkiGull, la diffusion serait prévue sous la forme d’une liasse de plans, comme au bon vieux temps des débuts de la RAF à Mojave avec le VariViggen en bois puis le VariEze en composites. L’appareil devrait pouvoir intégrer la catégorie américaine LSA (Light Sport Aircraft). Rendez-vous en juillet prochain à Oshkosh pour connaître la suite ! ♦♦♦
Images issues du web