Equipée d’ailerons pour améliorer son pilotage en roulis, la réplique du Caudron G-III de l’Amicale Jean-Baptiste Salis a repris l’air après un chantier de plusieurs années…
Après plusieurs années de suspension des vols, le Caudron G-III appartenant à l’Amicale Jean-Baptiste Salis (AJBS), à Cerny-La Ferté-Alais (91), a repris son envol ces derniers jours après un long chantier de modification. Celui-ci a porté sur l’installation d’ailerons sur l’aile supérieure du sesquiplan (l’aile inférieure à une envergure nettement plus courte). Auparavant, la voilure principale utilisait le système original de « gauchissement », avec une torsion de l’aile opérée par câble, afin d’augmenter la cambrure du profil et donc la portance, avec des efforts importants (les deux mains sur le manche…) et une efficacité toute relative.
Si le pilotage en tangage ne pose pas de problème avec une profondeur de bonne surface,
le pilotage en roulis doit se faire « au pied », comme c’était la pratique aux débuts de l’aviation, l’appareil réagissant en effet mieux au roulis induit, d’où l’usage essentiel du palonnier pour « accompagner » le gauchissement ou relever une aile basse, avec deux directions efficaces car placées dans le souffle hélicoïdal – un pilotage non conforme à l’apprentissage actuel, ce qui a valu à un précédent G-III de finir « dans les bosquets » il y a quelques décennies à La Ferté-Alais, lors d’un lâcher machine…
Ainsi, faute de bénéficier souvent de bonnes conditions météorologiques – pas de vent ou bien faible mais l’axe – l’appareil était cantonné lors des meetings à quelques sauts de puce, voire à seulement des roulages. L’arrivée d’ailerons avait ainsi pour but d’augmenter le domaine de vol du monomoteur conçu par les frères Gaston et René Caudron comme biplace de reconnaissance et d’entraînement. Piloté de la place arrière, le G-III a effectué son premier vol en mai 1914 à partir du terrain du constructeur, au Crotoy.
L’appareil original utilise alors le gauchissement comme moyen de piloter sur l’axe de roulis mais des ailerons conventionnels finiront par équiper la voilure supérieure sur les derniers modèles produits durant la Première Guerre mondiale. Bien que le type soit retiré du front courant 1916, 2.450 Caudron G-III seront construits sans que les frères Caudron, par patriotisme, ne fassent payer un droit de licence. Après guerre, malgré ses modestes performances, le G-III va encore faire parler de lui. Le 19 janvier 1919, l’as Jules Védrine se pose sur le toit des Galeries Lafayette à Paris, cassant son G-III à « l’appontage ».
C’est aux commandes d’un G-III qu’Adrienne Bolland réussit, en 1921, la première traversée de la Cordillère des Andes, en réussissant à grimper à plus de 4.500 m pour rejoindre Santiago au départ de Mendoza. Cette traversée des Andes étant réalisée un 1er avril, l’ambassadeur français, prévenu de ce record, ne viendra pas l’accueillir, croyant à une blague… Il est vrai que ce fut un réel exploit au vu du plafond pratique de l’engin…
Le Caudron G-III fait ainsi partie des avions des débuts héroïques de l’aviation. Il ne pouvait donc être absent du plateau de La Ferté-Alais, en notant d’ailleurs que sa silhouette constitue l’emblème de l’Amicale depuis des années. Dans les faits, plusieurs G-III ont volé dans le ciel de l’Essonne ces dernières décennies, dont l’un a fini par rejoindre la collection d’un musée aéronautique en Amérique du Sud.
Le premier avait été sauvé par Baptiste Salis après guerre. Son fils, Jean, avait coutume dans les années 1960 de le présenter en meeting. N’ayant alors qu’une licence de pilote de planeur, l’administration de l’Aviation civile avait fini par lui demander de passer le brevet Avion de l’époque et c’est ainsi que Jean Salis réalisa une navigation solo… en Caudron G-III !
Ainsi, le G-III actuel (une réplique réalisée en 1991) a repris le chemin du ciel ce 12 mai, avec Jean-Pierre Lafille aux commandes. Une série de vols a déjà eu lieu, Pierre Fages et Willy Rawlinson embarquant également à bord, la mise au point consistant à l’ajout de joints d’étanchéïté pour augmenter l’efficacité des ailerons. Le G-III participera ainsi au prochain meeting – Le Temps des Hélices les 23-24 mai – étant programmé les deux jours en début de meeting, avec un plateau sur les « débuts de l’aviation » qui verra en vol le Caudron G-III, l’unique Morane-Saulnier MS-138 en état de vol au monde, le Morane H (réplique) de l’AJBS en compagnie du Morane G (réplique) de l’association Replic’air. ♦♦♦
En illustration : trouvé sur le net, autochrome de Gervais-Courtellemont publié dans « Les Champs de Bataille de la Marne » sous la légende « Un avion de guerre et la journée du 9 septembre 1914 » (source Bibliothèque de Reims).
aerovfr.com dit
Oui, il appartient à un collectionneur qui a également quelques autres machines…
A noter que l’AJBS compte également un Caudron Luciole, le seul à moteur en étoile mais il devrait partir en chantier prochainement pour se refaire une beauté (réentoilage notamment).
Buskoja dit
Vous connaissez l’existence de ce Caudron Luciole basé à Lessay ?