Les éclipses se suivent mais ne se ressemblent pas. Celle d’août 1999 était une éclipse solaire totale. Renseignements pris en amont auprès des services de la DGAC, aucune restriction n’était prévue par l’administration… mais, peu avant la date fatidique, surprise de taille avec une circulaire « sortie du chapeau » à la dernière minute imposant pour voler durant l’éclipse d’avoir la qualification VFR de nuit, d’utiliser un avion équipé VFR de nuit et donc de déposer un plan de vol VFR de nuit !
Cette « ouverture de parapluie » était intervenue quelques jours seulement avant la date de l’éclipse, avec certains commandants d’aérodromes faisant du zèle en placardant la circulaire sur les portes des hangars des aéro-clubs basés sur leurs plates-formes… C’est vous dire la confiance qu’ils avaient déjà dans le système de diffusion de l’information aéronautique ! Tout cela pour quelques minutes de semi-obscurité. A l’époque, mise devant le fait accompli, la FFA n’avait pas bronché, très satisfaite d’organiser un fly-in statique à l’issue de l’éclipse et sans noter que l’administration l’avait « roulé dans la farine » en changeant de stratégie à la dernière minute…
Ce 20 mars 2015, l’éclipse solaire était partielle et vue la couverture nuageuse régnant sur une partie du territoire, nombreux ont été ceux à ne pas la « voir » réellement. Cette fois, ce n’est pas le ministère des Transports qui a fait des siennes mais celui en charge de l’Education nationale. Ces derniers jours, notes au parents et articles dans la presse indiquaient que les enfants allaient être cloitrés dans des salles obscures pour éviter tout risque ! Entrée directe dans les classes sans attendre dans la cour ! Pas de récréation !
Hervé Dole, un astrophysicien, s’est fendu d’un billet paru dans « Le Monde » pour relever l’obscurantisme des dirigeants de l’Education nationale face à un phénomène naturel constituant une opportunité rare pour faire découvrir aux enfants une observation particulière. Et le risque de lésions occulaires est inexistant si les moyens (lunettes spéciales) ou la méthode (regarder les ombres au sol) sont bien précisés, ce qui a été fait sur de nombreux sites internet. Hervé Dole soulignait un risque sans commune mesure avec ceux encourus lors de sorties scolaires à la piscine…
Devant les commentaires ironiques publiés ces derniers jours dans la presse, évoquant des peurs moyen-âgeuses encore présentes au 21e siècle et un manque de courage, l’Education nationale a subitement changé de position dans les dernières heures précédant l’éclipse, autorisant les enseignants à faire découvrir cette dernière aux enfants. Mais vu le temps de réaction du système et la date du changement de stratégie – alors qu’il n’était plus temps pour s’équiper de moyens adaptés – interdiction ou pas, le résultat a sans doute été le même avec peu d’observations faites en milieu scolaire.
S’il a fallu plus de quinze ans à la DGAC pour évoluer sur un tel sujet – encore que les Notams d’interdisant les vols VFR, sur certains terrains seulement, suite au nuage de poussière d’un volcan islandais il y a quelques années, mériterait à eux seuls la médaille d’Or en matière d’ouverture de parapluie ! – pour l’Education nationale, il faudra sans doute attendre la prochaine éclipse… ♦♦♦
Photo © Nasa