Même si la France a toujours eu un « peu de retard » sur les pays anglo-saxons pour la sauvegarde de son patrimoine aéronautique, la DGAC a décidé ces dernières années de « sauvegarder pour l’avenir sa propre mémoire collective ». Ainsi, la mission Mémoire de l’Aviation civile a notamment publié plusieurs ouvrages « s’attachant à promouvoir la connaissance, la conservation et la mise en valeur du patrimoine aéronautique », ce dernier pouvant être « oral, écrit, mobilier, immobilier » et constitué de « l’ensemble des biens qui présentent un intérêt historique, scientifique ou technique ». Et il faut s’en réjouir !
Dernier en date, un ouvrage évoque la patrouille de Saint-Yan. C’est le manuscrit offert en 2010 par Louis Souchet, l’un des pilotes de cette patrouille. Il y raconte ses souvenirs, de la création de la patrouille en 1955 par le Service de la Formation aéronautique et des Sports aéronautiques (SFASA, ancêtre du SFA qui allait devenir SFACT, SEFA puis ENAC) jusqu’au déroulé des 92 meetings effectués par cette patrouille, destinée à faire « la promotion du pilotage dans les meetings ».
Un an plus tôt, le Centre national de Saint-Yan a débuté la formation théorique et pratique des élèves pilotes de ligne pour alimenter entre autres les cockpits des avions d’Air France. Pour la formation de base, les stagiaires ont droit au SV-4 Stampe avant d’aborder la qualification de vol aux instruments. L’Etat français veut relancer l’aéronautique civile et militaire. L’armée de l’Air fait sa propre promotion avec la Patrouille de France, évoluant sur MD-450 Ouragan dans les meetings nationaux, à la fois pour présenter les matériels aériens développés en France mais aussi pour recruter de futurs pilotes de chasse.
En parallèle, la direction du SFASA imagine donc une patrouille d’avions légers devant se produire dans les meeting pour mieux faire connaître la carrière de pilote de ligne. On pense rapidement aux instructeurs du Centre national de Saint-Yan, connu par sa méthode de pilotage (pente, cadence, exercices de perfectionnement P0-P7, etc.) que le rédacteur-en-chef de la jeune revue Aviasport baptisera « Evangile selon Saint-Yan », méthode qui sera détrônée trente ans plus tard par celle de Saint-Geoirs…
La voltige, les instructeurs de Saint-Yan connaissent… car cela fait partie du cursus de formation des élèves pilotes de ligne, pour voir notamment les positions inusuelles et la vrille. Mais il reste à mettre au point une patrouille acrobatique. Anciens de l’armée de l’Air, les instructeurs Jean Passadori, Olivier Lechevalier, Raymond Vivien et Louis Souchet se portent alors candidats pour monter cette formation constituée de Stampe.
Autres temps, autres moeurs… Les instructeurs n’étaient alors pas limités dans leur entraînement personnel et progressivement, la patrouille a évolué à la verticale du terrain, la fin des entraînements se terminant « le plus souvent par un passage en vol sur le dos, à la hauteur des portes des hangars, voire même un peu plus bas ! C’était une autre époque où cette pratique téméraire était admise »… Après 150 heures de vol d’entraînement, en plus des heures d’instruction, la patrouille est opérationnelle à l’hiver 1955-1956 avec une série de 15 minutes comprenant du vol inversé ou une patrouille avec le leader en vol ventre et les deux ailiers en vol inversé. La dernière présentation aura lieu en octobre 1961. ♦♦♦
C’est à lire en ligne ou en téléchargeant l’ouvrage (8 Mo) via ce lien.
aerovfr.com dit
Louis Souchet à Angers
Reçu par mail de Roger Gaborieau (Bleu Ciel Magazine) le commentaire suivant :
Merci pour cette information. J’ai eu le plaisir de rencontrer Louis Souchet en 2010 à l’occasion de la Coupe d’Anjou, compétition de voltige qui se déroule à Angers, toujours sur Stampe. Pour moi, il fait partie des « grands messieurs » de l’aviation qui forcent le respect et l’admiration. Invité à faire un vol sur SV-4, Louis Souchet nous a gratifié d’une approche en PTU glissée et d’un atterrissage de grand style, comme s’il n’était pas descendu du Stampe depuis Saint-Yan !
Merci également de souligner l’action de la mission Mémoire de l’Aviation civile qui fait un beau travail pour remonter vers nous des tranches de patrimoine historique qui sont autant de petits trésors.
Bonne semaine, bien cordialement.
Roger Gaborieau