Pour passer à la pratique des mesures Calipso, un essai concernant l’avion d’un aéro-club a servi de cas concrêt. Ce club dispose d’un Robin DR-360, type déjà classé en catégorie D sur le site Calipso, mais cet appareil est équipé, depuis 2003, d’un silencieux Gomolzig. En l’absence d’un Certificat acoustique (EASA) et sans l’ancien Certificat de limitation de nuisances (CLN) – situation liée à certains avions Robin… – il a été jugé intéressant d’avoir une mesure scientifique du niveau exact d’empreinte sonore de cet appareil bénéficiant d’un silencieux, tout en notant que les mesures Calipso sont gratuites durant les trois premières années d’application du dispositif.
L’inscription auprès du Laboratoire de mesures acoustiques dépendant du Service technique de l’Aviation civile (STAC, Toulouse) s’est faite par mail, via le site Calipso et il a fallu « un certain temps » et quelques relances pour avoir confirmation d’une date pour les mesures, après reports multiples suite, entre autres, à des conditions météorologiques défavorables ayant entraîné des retards dans le planning des essais d’autres appareils.
Les essais sont menés sur deux aérodromes, Moissac pour le sud de la France, Montargis pour le nord. Quelque temps avant la date retenue pour les mesures, un mail des responsables des mesures a précisé les modalités pratiques : horaires, avion à évaluer à la masse maximale donc avec les pleins, avec de préférence des passagers et du lest additionnel si besoin.
Sur l’aérodrome, les équipements mis en place par le STAC comprennent entre autres un bus servant de « PC opérationnel d’où est conduite la campagne de mesure » (centralisation des données, contact radio permanent avec le point de mesure acoustique et avec l’appareil en vol, prise de décision sur la validité des passes, etc.) et une station de mesure acoustique dont « les microphones et calibreurs acoustiques sont vérifiés, dans les six mois précédant les mesures, par le Laboratoire national d’essais (LNE) ».
Appareil posé à Montargis-Vimory, le processus a débuté par la mise en place de divers équipements sur la casquette du tableau de bord, dont un GPS et un tachymètre électronique se basant sur la mesure optique du régime hélice, mais aussi par l’identification de cette dernière (inspection du bord d’attaque, mesure exacte de son diamètre, etc.). La pesée électronique a suivi avec passagers (dont des membres de l’équipe du STAC) pour porter la masse maximale exactement aux 1.000 kg prévus. Les conditions des essais ont ensuite été validées avec notamment le lâcher d’un ballon-sonde (pression, humidité relative entre 30 et 95%, vent) permettant notamment de confirmer l’absence d’une inversion de température (5 à 35°C max au sol) qui pourrait fausser les mesures et quantifiant le vent qui doit rester dans certaines limites (10 Kt max, 5 Kt plein travers max).
Après un briefing explicatif des trajectoires à suivre en vol et signature du protocole (ce dernier prévoit la publication des données obtenues sur le site Calipso), mise en route et décollage… L’essai a consisté alors à réaliser plusieurs passages à la verticale de l’installation de mesure, constituée de sonomètres placés près de la piste, et ce à différents régimes jusqu’au plein gaz ou à une vitesse indiquée précise, correspondant à 1.45 de la vitesse de décrochage en lisse. Pour que les points de mesure soient exploitables, il faut rester lors des passages sur le « trait » à la fois dans le plan horizontal et dans le plan vertical (entre 640 et 960 ft pour une valeur nomimale de 800 ft).
La hauteur de 800 ft a été retenue par le protocole de mesure afin « d’obtenir une émergence suffisante du bruit de l’avion par rapport au bruit de fond, en particulier pour les survols opérés à faible vitesse. Les niveaux de bruit sont ensuite corrigés pour refléter le bruit que produit l’avion à une hauteur de 1.000 ft (hauteur courante du circuit de piste qui constitue la principale source de gêne ressentie par les riverains) ».
Pour aider le pilote à rester dans la « fenêtre de mesure » (un cône de 10° à la verticale du point de mesure), le technicien en place droite dispose d’un ordinateur portable présentant un instrument similaire à un VOR-ILS, facilitant le « guidage ». Un ou deux passages permettent à un pilote de suivre les « barres de tendance » en ayant aussi un oeil sur l’installation au sol pour réaliser la meilleure verticale possible aux bons paramètres – avec la nécessité de respecter la hauteur et d’anticiper le régime moteur pour tenir une vitesse par exemple, sans à-coups à la manette des gaz…
Une fois la « passe » effectuée, les équipes au sol confirment par radio la fin de la mesure. Le technicien à bord communique alors sur la fréquence, en précisant le numéro de l’essai, les différentes valeurs notées dans le cockpit par les équipements enregistrant trajectographie et tachymétrie (vitesse indiquée, altitude, régime hélice, etc.). Une dizaine de passages dans les deux sens seront nécessaires pour couvrir la plage recherchée, soit de 20 à 30 mn de vol environ.
Les mesures acoustiques donnent naissance par la suite à un compte-rendu détaillé, formules mathématiques comprises, adressé au propriétaire et précisant la classification de l’appareil en question. Au final, le DR-360 (Lycoming O-320D2A, hélice Sensenich 74DM6S5266, régime maximal de 2.700 tr/mn en continu), équipé d’un silencieux Gomolzig, tel que suivi pour ces mesures acoustiques à Montargis, a été classé en catégorie B, avec 46,4 dB(A) d’indice de performance sonore, contrairement à un DR-360 sans silencieux, classé en D. D’où l’intérêt de disposer d’un silencieux ! Qu’on se le dise… ♦♦♦