Il y a près de dix ans, l’idée de standardiser les règlementations aéronautiques au sein des pays de l’Europe, sous la bannière de l’EASA, a paru géniale. Avec un territoire similaire à celui des Etats-Unis, l’aviation générale allait enfin pouvoir s’affranchir des frontières et les pilotes circuler plus simplement. Il fallait y croire… L’EASA entendait simplifier la réglementation, uniformiser les règlements, dynamiser l’aviation générale en Europe. Comment aurait-il été possible de s’opposer à une telle politique ?
En 2014, avec le nouveau report de l’Aircrew à 2018 – au plus tôt ! – ce règlement mal ficelé, compliquant souvent les choses, rajoutant des couches de contraintes, on ne peut que constater le gâchis réalisé par l’EASA en moins de 10 ans. Bilan : un chaos réglementaire ! Après un premier report d’un an, l’Agence européenne, devant les lacunes avérées de ses évolutions envisagées et sous le tollé en provenance essentiellement de Grande-Bretagne, a dû remettre tout le dossier dans les tiroirs en promettant une « troisième voie », différente des systèmes nationaux actuels mais moins contraignante que le projet européen envisagé. Tout cela pour çà ! Et il faudrait croire aux nouvelles promesses…
Mais ce n’est pas tout, après l’Aircrew, c’est le règlement SERA qui risque de battre de l’aile très prochainement… L’Union européenne voulait en effet standardiser les Règles de l’Air avec la mise en application, au 4 décembre prochain, de ses Standardised European Rules of the Air, plus simples à énoncer sous le nom de SERA. Mais voilà que ce jour, la CAA britannique annonce que l’application des SERA sera repoussée en Grande-Bretagne, sans donner de date précise. Outre-Manche, il n’y aura ainsi ce 4 décembre aucune modification des Règles de l’Air britanniques sauf si les SERA sont… identiques aux règles anglaises !
Cette décision a été prise pour éviter un « impact » sur l’aviation anglaise… Les pilotes anglais auraient dû, à compter du 4 décembre prochain, passer par exemple de la règle quadrangulaire à la règle semi-circulaire pour déterminer les niveaux de vol en croisière. De plus, la CAA annonce qu’elle ne changera pas les hauteurs minimales de survol et que les vols VFR et VFR Spécial pourront toujours être effectués de nuit.
La CAA a demandé des dérogations sur tous ces points. Ainsi, la CAA veut maintenir sa règle « en dehors des nuages » pour les conditions VMC en espace contrôlé, pour bénéficier d’une flexibilité tant côté aéronef que côté contrôle aérien, sans passer au VFR Spécial. La CAA ne veut pas non plus entendre parler des nouvelles valeurs de visibilité pour pouvoir proposer du VFR Spécial si le pilote en contact peut maintenir les conditions VMC.
L’Autorité britannique ne remet pas en cause la totalité du SERA mais si le projet est appliqué dans sa globalité, elle pense que cela apportera des restrictions importantes à l’activité de l’aviation générale. Peut-on se moquer des Anglais qui ne veulent pas de toutes les évolutions quand on sait que la DGAC veut maintenir ses « propres » hauteurs de survol, plus contraignantes que celles envisagées par les SERA ?
Bref, deux pays européens pourraient appliquer un jour des Règles de l’Air européennes « standardisées » qui ne sont pas dans les faits… standardisées. Vous y comprenez quelque chose, vous ? ♦♦♦