Entrée en application du BIR ou Basic Instrument Rating (Aircraft) prévue en septembre 2021 par l’EASA.
Le 18 décembre 2015, l’EASA diffusait la seconde version de son document intitulé « Easier access of General Aviation (GA) pilots to instrument flight rules (IFR) flying » (Un accès plus simple au vol aux instruments (IFR) pour les pilotes de l’aviation générale). Ceci faisait suite à la « Safety Conference on General Aviation » de l’EASA tenue en 2014 à Rome, où un accès plus simple au vol aux instruments a été considéré comme une mesure concrète pour améliorer la sécurité.
L’idée était qu’en augmentant le nombre de pilotes suivant une formation au vol aux instruments, ceci augmenterait les compétences des pilotes en les rendant moins vulnérables aux risques associés à de mauvaises conditions météorologiques, comme la poursuite du VFR en IMC. La majorité des vols IFR se déroulant en conditions VMC, avec une météo meilleure en route en volant au-dessus des nuages, le vol IFR apporterait une meilleure intégration dans le trafic avec diminution des risques de collisions en vol, tout en replaçant les pilotes dans un environnement de formation afin d’améliorer leur niveau de compétences.
Un questionnaire concernant l’IFR a alors été proposé aux pilotes pour remonter tout commentaire, avec 905 retours enregistrés par l’EASA. On notera que la Grande-Bretagne (tenant à son IMC Rating !) y a participé à hauteur de 53,7% des réponses, devant l’Allemagne (11,9%), la Suède (6,1%), la République tchèque (5,3%), la Pologne (3,4%), la Finlande (3,2%), le Luxembourg (2,9%), la Suisse (2,2%), la Norvège (2,2%), la Danemark (1,7%), la France arrivant en 11e place avec 1,3% comme les Pays-Bas…
Avant de développer un projet réglementaire, le groupe de travail de l’EASA a ensuite étudié les différents freins à l’accès au vol aux instruments, les exigences réglementaires, les évolutions souhaitables pour mieux répondre aux attentes. Le groupe de travail RMT.0677 a ainsi planché, notant le faible niveau d’activité IFR pour l’aviation générale en Europe comparé à celui enregistré aux Etats-Unis.
Il était également pointé que le niveau de connaissances théoriques nécessaires était disproportionné par rapport à la qualification IR alors en vigueur tout en notant qu’un accès plus flexible aux formations pratiques serait nécessaire. Les prérequis exigés des instructeurs pouvaient être reconsidérés également à la baisse. Parmi les autres freins identifiés, les coûts de certification des simulateurs et la nécessité d’utiliser la langue anglaise.
D’où la proposition de mettre en place un Basic Instrument Rating (BIR) visant les pilotes de l’aviation générale, volant sur mono (SEP) ou multimoteur (MEP) avec parmi les principes retenus : une formation modulaire basée sur les compétences, des privilèges adaptés aux compétences atteintes, une formation pratique basée sur la réalité du vol aux instruments avec l’accent mis sur la gestion des erreurs et des menaces (TEM) mais avec des standards à l’examen similaires à ceux de l’IR OACI car ces pilotes partageront les mêmes espaces aériens.
Pour les privilèges acquis, il était prévu qu’ils soient liés à des modules concernant le vol en route, les procédures d’approche, etc. permettant d’étaler la formation dans le temps si le candidat ne souhaite dans un premier temps que faire de l’IFR en route. Une fois tous les modules acquis, le pilote aurait des privilèges similaires à la qualif IR mais limités au pilotage d’avions monopilotes, avec des minimas plus élevés lors des approches (+200 ft par rapport aux minimas publiés avec un plancher à 500 ft (3D) ou 600 ft (2D) et une visibilité minimale de 1.500 m). La « revalidation » du BIR était prévue chaque année, alternativement par un vol d’entraînement avec un instructeur IR ou un contrôle de compétences par un examinateur.
Il était même prévu que les exigences de certification des avions et équipements soient mieux proportionnées lors de la certification initiale des avions légers. Il était aussi question de revoir les procédures de départ et d’arrivée sur certains aérodromes ainsi que les procédures en route pour mieux s’adapter aux performances des avions concernés. Un accès peu coûteux aux informations aéronautiques nécessaires au vol IFR était listé dans les objectifs.
Si derrière tout ce projet, l’EASA visait une « amélioration de la sécurité », c’était aussi un accroissement de l’activité de l’aviation générale qui était attendu, et donc une augmentation de l’activité économique avec la formation, l’avionique, la maintenance, la flotte d’appareils, etc. L’impact de l’accroissement des vols IFR était noté comme négligeable en terme environnemental, avec environ 4 millions d’heures de vol pour l’aviation générale chaque année à comparer au 1 billon d’heures de vol (mille milliards) de l’aviation commerciale.
Le projet réglementaire (Noticed of Proposal Amendment ou NPA) a vu le jour en novembre 2016 avec l’officialisation du Basic Instrument Rating (BIR) plus simple que le classique IR. L’Europe se hâtant très lentement, ce n’est que les 23-24 octobre 2019 que le comité de l’EASA a voté pour enfin appliquer ce règlement. L’Opinion devrait être publiée au Journal officiel de l’Union européenne courant du premier trimestre 2020, avec ensuite la publication des AMC (Acceptable Means of Compliance ou moyens acceptable de conformité) et GM (Guidance Material).
Dans les faits, la nouvelle qualification BIR n’entrera en vigueur qu’au 8 septembre 2021 – soit avec près de 3 ans de retard sur le premier calendrier. Comme le LAPL(A), il s’agit d’une qualification purement européenne, donc non reconnue par l’OACI (échelle internationale).
Elle ne sera ainsi utilisable qu’en Europe. Le théorique BIR sera acquis à vie et non pas limité à 7 ans (IR). Modulaire et basée sur les compétences, la formation pratique devrait être développée en trois modules (SEP) ou quatre (MEP). Ces modules sont : 1) Préparation du vol et gestion du vol (« general handling »), 2) Départs, procédures d’approche de précision (3D) et procédures d’approche de non-précision (2D), 3) Procédures IFR en-route. 4) Vol en n-1 sur multimoteur (optionnel).
Cette formation pourra être délivrée hors ATO (Approved Training Organisation) mais devra impérativement s’achever en ATO, ce dernier étant l’organisme présentant le candidat à l’examen pratique du BIR après validation de son niveau de compétence. Par ailleurs, une aptitude à la langue anglaise (FCL 055) ne sera pas exigée, comme c’est le cas pour l’IR OACI, mais ceci devrait limiter son usage aux pays « francophones » acceptant des communications en français – en pratique… la France.
L’actuelle qualification franco-française F-N/IR(A) restera en vigueur jusqu’au 8 septembre 2021 pour permettre aux candidats déjà en formation de poursuivre leur formation IFR sans usage de la langue anglaise. À compter du 8 septembre 2021, ils devront cependant avoir converti leur qualification nationale F-N/IR(A) en qualification européenne BIR afin de pouvoir continuer à exercer leurs privilèges IFR.
Rappelons que l’arrêté du 24 juin 2011 (modifié le 12 janvier 2015) a fixé les conditions de délivrance de la qualification nationale de vol aux instruments de pilote privé avion dite F-N/IR(A). Son théorique a une durée de 36 mois. Cette qualification est restreinte « au territoire national ou aux espaces aériens où les services du contrôle de la circulation aérienne sont rendus en langue française » sauf accord des autres États…
Dans tous les cas, une formation IR, basique ou pas, impose au candidat un effort certain en implication, en temps et en argent pour passer la théorie et la pratique, mais surtout exige une pratique régulière ensuite pour maintenir un bon niveau de compétences. Au vu de l’activité annuelle de la population des pilotes de l’aviation générale en France, volant principalement en aéro-club (les IFR « privés » sont majoritairement des propriétaires… privés et/ou des ATPL pratiquant l’aviation générale), l’arrivée du BIR ne devrait pas modifier significativement l’activité… ♦♦♦
Photos © F. Besse / aeroVFR.com
Ci-dessous, en pièce jointe – pour ceux que cela intéresse – le NPA du 9 novembre 2016, qui a pu être amendé depuis sur certains points ! 230 pages en… anglais !