Un BD-5J bientôt en vol en France…
Nicolas Charmont est un passionné de pilotage et de construction amateur. En 1998, à l’âge de 21 ans, il pilote déjà un CriCri à réaction. Pour cela, il a dû se qualifier sur réacteur avec une formation réalisée sur un Fouga Magister civil, lâché compris. Depuis, il a pratiqué différentes machines plus ou moins exotiques, du Piel CP-80 au LongEZ en passant par le Pitts S-1S ou l’hélicoptère léger Mini 500.
Il y a douze ans, il a racheté aux Etats-Unis un lot matière de BD-5B et a décidé de le transformer en BD-5J malgré l’absence de plans. Après beaucoup de réflexion et environ 2.500 heures de travail réparties sur dix ans, il arrive au bout de son projet. Entre-temps, il a racheté un réacteur TRS-18, révisé par une société spécialisée car Microturbo (Safran) n’assure plus la maintenance pour les réacteurs en « usage privé ».
Pour apporter une redondance à la motorisation et par souci de simplification, il a supprimé toute l’électronique initialement montée sur le TRS-18 pour retenir deux pompes à essence. Au sol, les prises Naca latérales, alimentant la turbine, sont obturées par une trappe qui s’ouvre automatiquement dès la mise en route suite à la dépression créée. Une autre trappe, sur un panneau latéral du fuselage, s’ouvre également automatiquement pour ne pas mettre l’intérieur du fuselage en dépression. Au fur et à mesure de l’accélération, cette dernière trappe se refermera toute seule avec la vitesse. Le tout sans intervention du pilote.
Le TRS-18 doit délivrer 105 kg de poussée au régime de 44.000 tr/mn. La croisière doit s’établir entre 160 et 200 Kt (la Vne est fixée à 250 Kt) pour une machine pesant à vide 220 kg pour 450 kg à la masse maximale. L’aile en version courte sur le BD-5J est du type « voilure mouillée » avec 120 litres contenus dans l’épaisseur du profil, les orifices de remplissage se trouvant aux saumons. Les deux ailes alimentent une nourrice de 25 litres placée dans le fuselage et qui doit toujours être pleine.
Une des deux pompes alimente la nourrice, avec si besoin une seconde pompe de secours. L’autonomie de l’appareil ne devrait pas dépasser les 50 mn selon le régime affiché. Entre le régime 50% et le pleins gaz, le temps de réaction du réacteur est d’environ 6 à 7 secondes. A l’atterrissage, un atténuateur de poussée (type inverseur avec deux coquilles métalliques se refermant sur la sortie de tuyère) réduit la course durant l’arrondi et l’atterrissage, sinon le TRS-18 fournit encore 20 kg de poussée résiduelle.
Une modification apportée par rapport à l’original est le principe d’ouverture de la verrière. Sur le BD-5 d’origine, celle-ci basculait à l’horizontale sur le dessus du fuselage. Nicolas Charmont a préféré un système d’ouverture latérale. Le tableau de bord, relativement compact, est bien agencé, bénéficiant d’un horizon artificiel de secours issu d’un Jaguar… On note l’indicateur de température de tuyère (T4) dont le maximum est de 800°C. La commande de train se trouve entre les jambes. Au sol, l’appareil a besoin d’une gueuse placée sur la jambe avant sinon, à vide, il repose sur le patin arrière.
La voilure utilise un profil Naca 64-212, également employé sur le SF-260. La littérature américaine de l’époque évoque de possibles décrochages vifs mais tous les comptes-rendus publiés alors font état de superbes qualités de vol, comme celui publié par Richard Bach (l’auteur de « Jonathan Livingstone, le goéland »), propriétaire d’un BD-5. Malgré sa taille, vue la faible surface alaire, l’appareil bénéficie surtout d’une forte charge alaire. Toutes les gouvernes sont équilibrées statiquement et dynamiquement. La rotation au décollage, vers 75/80 Kt, doit intervenir après environ 450 m de roulage. La vitesse préconisée en approche est de 100/110 Kt. L’appareil est apte à la voltige avec +6/-4 g.
Ce BD-5J a passé la dernière visite Osac ce 10 juin. Il est immatriculé F-PJET, les essais en vol devant se mener en F-WJET. Des essais réacteur ont déjà été menés au sol. Il reste encore à fournir à l’administration quelques papiers avant d’obtenir l’autorisation de vol. Le premier vol devrait intervenir cet été, précédé d’essais de roulage sur la longue piste de Melun-Villaroche. Nicolas Charmont estime à moins de 10 le nombre de BD-5J en état de vol au monde contre plus d’une centaine pour les BD-5 à hélice, ces derniers pouvant bénéficier désormais de plusieurs motorisations qui ont fait défaut à l’époque à James Bede pour mener à bien son programme. Un bien beau projet… ♦♦♦
Photos © aeroVFR.com